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La Turquie est maintenant « surveillée étroitement » aussi par la Chine

23 Déc

 

http://www.vz.ru/opinions/2015/12/22/785345.html

22 décembre 2015, Photo: ITAR-TASS

Par Evguéni Satanovski, Directeur de l’Institut du Moyen Orient

Traduit du russe par Marianne Dunlop

Cela peut sembler surprenant, mais des experts à Pékinsuivent de très près les actions à la fois de la Russie et de la Turquie, et les services de renseignement chinois ont tiré des conclusions désagréables et très significatives concernant la Turquie.

Ankara, avec son mélange habituel d’agressivité et d’espoir de réduire au minimum les dommages causés par les conséquences de ses propres actions, est à la recherche de nouveauxfournisseurs d’énergie et de nouveaux alliés dans sa confrontations avec la Russie, tout en maintenant ses plans d’agression contre la Syrie et l’Irak.

La plus haute forme de «défense active» des intérêts d’Ankara dans le conflit syrien a été la destruction par un avion de chasse turc d’un bombardier russe. De toute évidence, les services secrets turcs en coordination avec les partenaires de l’OTAN avaient prévu de capturer les pilotes russes, mais les islamistes soutenus parAnkara n’ont pas réussi à mener à bien une partie de l’opération terrestre.

Le fait que les analystes chez nous surveillent de près la politique de la Turquie en Syrie, est connu. Ce que l’on sait moins c’est que les actions de la Russie et de la Turquie ne sont pas examinéesmoins attentivement par les experts chinois.

Cependant, leur point de vue est très révélateur, sachant que Pékin maintient une politique d’équidistance pour la plupart des pays du monde. Ses relations avec la Russie ne sont pas moins importantes que ses relations avec l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie, mais dans le conflit syrien,Pékin soutientclairement Moscou.

Les Chinois notent que le gouvernement turc a soutenu l’EI, souhaitant détruire la Syrie et capitaliser sur le commerce de contrebande du pétrole. Selon eux, l’EI produit rien que sur les gisements « Al-Tank » et « Al-Omar » (l’EI dispose d’environ 10 champs pétroliers) de 20 à 40 mille barils par jour.

Au prix de 10 $ par baril, les terroristes gagnent de 200 à 400 mille dollars. Les hommes d’affaires turcs obtiennent une marge de deux à trois fois plus car le prix moyen mondial du pétrole atteint 39 $ le baril.

Selon les médias chinois, le salaire d’un soldat ordinaire de l’EI est de 400 dollars. Pour l’entretien de 30.000 soldats,il faut assurer le fonctionnement stable de deux champs de pétrole pendant une semaine par mois. La partie turque,même en considérant des volumes plus faibles de fournitures de pétrole syrien, gagne des centaines de millions de dollars chaque année.

Les services de renseignement chinois ont tiré des conclusions très peu flatteusessur la Turquie suite à l’étude des documents photo et vidéoconcernant l’attaque contre l’avion militaire russe. Dans une interview avec des journalistes, l’un des leaders du groupe turc « Loups gris », a dévoilé son rôle clé dans l’assassinat du pilote russe.

Les militants de cette organisation ont pris part aux pogromes de restaurants et de boutiques chinoises, et à des manifestations en 2015, accompagnéesd’attaques contre les touristes chinois et brûlé le drapeau chinois en face de l’ambassade de RPC. Selon les agences de renseignement en Thaïlande, ce sont les membres de ce groupe qui ont organisé l’attaque terroriste à Bangkok, dont la cible étaient les touristes chinois.

Selon les analystes chinois, le rôle d’Ankara dans la formation de l’EI est confirmé par les déclarations de l’ancien ministre des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu (actuellement Premier ministre), faites en 2014 dans le cadre de l’arrestation en Thaïlande de 400 Ouïgours chinois, qu’il a appelé illégale. Il est connu que l’ambassade de Turquie délivrait à ceux qui voulaient aller à la guerre contre les « infidèles » en Syrie, des passeports et des billets pour Istanbul.

Pour freiner les activités de recrutement en faveur de l’EI, les services secrets de Chine et de Thaïlande ont pris un certain nombre de mesures. Au cours des 10 premiers mois de 2015, les services du Ministère de la sécurité publique de la République populaire de Chine (MSP)ont arrêté 109 de leurs compatriotes qui rentraient de Syrie, et 20 citoyens turcs qui recrutaient parmi les chinois musulmans. Ilsont saisi 653 passeports vierges de citoyens de la République de Turquie et 200 demandes de visas d’entrée à l’ambassade de Turquie à Bangkok.

Un célèbre analyste militaire chinois, le contre-amiral Zhang Zhizhong, a déclaré que la raison de la faible réaction de l’OTAN s’explique par les compétences de l’aviation de longue portéede Russie.

Selon le président du Conseil pour l’informatisation de l’APL le contre-amiral Yin Zhuo, les actions de la Turquie sont une provocation planifiée à Washington et Bruxelles, mais ils n’ont pas anticipéla réaction du président Poutine. Selon lui, l’armée turque ne s’attendait pas au déploiement rapide de S-400, et un facteur supplémentaire pour calmer Ankara était le placement sur les chasseurs-bombardiers Su-34 de missiles « air – air ».

Les médias chinois, au sujet des actions de M. Erdogan, ont déclaré qu’il ne s’agissait pas juste d’un «coup de poignard dans le dos », mais que « son comportement rappelle l’action de reptile venimeux qui attaque en embuscade, puis se retire en attendant le résultat. »

Les experts chinois estiment que l’élite politique turque va poursuivre la politique de relations tendues avec la Russie, mais à la fin sera acculée, puisque l’OTAN comprend le niveau réel de la puissance militaire de la Russie et refuse de soutenir Ankara.

La Turquie est deuxième acheteur mondial de gaz naturel russe, un grand importateur de pétrole russe, charbon et métaux, le plus grand importateur de blé et huile de tournesol. Théoriquement, Ankara peut trouver d’autres fournisseurs, mais seulement à un prix plus élevé.

Doha ne trouve pas rentable de fournir du gaz naturel à la Turquie : Ankara comme un partenaire stratégique du Qatar exige des remises et des prêts préférentiels et pour Doha il est plus rentable de vendre ses matières premières vers l’Asie et l’Europe.

La Turquie peut s’approvisionner en pétrole auprèsdu Kurdistan irakien, personnellement contrôlé par Erdogan et Barzani. C’est leur entreprise familiale. Les difficultés dans cette région sont liées aux actions militaires contre l’EI et l’élimination des itinéraires de contrebande de pétrole (que les Kurdes «mélangent» avec le leur), et la pression de la Turquie sur les groupes armés du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Les détachements du PKK dans le Kurdistan irakien jouent un rôle majeur dans la lutte contre l’EI, tenant Kirkouk, riche en pétrole. Toutefois, cela ne vaut que dans le cas où le régime turc actuel se maintiendra. Sinon, les choses peuvent changer très rapidement.

Le projet de relancer le gazoduc Trans-Anatolien (TANAP) de l’Azerbaïdjan à la Turquie est privilégié par Ankara, mais il ya quelques sérieux obstacles à sa mise en œuvre. Bakou, ni aujourd’hui ni dans l’avenir ne peut pas remplir seul l’ensemble du volume de la canalisation de gaz. Il ne peut donner que 16 milliards de mètres cubes. Afin de porter le volume au niveau de la consommation intérieure en Turquie, il est nécessaire de combler un déficit de 40 milliards de mètres cubes.

Il ya deux façons : acheter du gaz en provenance de Russie ou du Turkménistan. MaisAnkara n’obtiendra pas les rabais offerts par Gazprom dans le cadre du « Blue Stream » ou du « Turkstream » mis en sommeil. Tous les autres moyens d’obtenir des hydrocarbures seront pour la Turquie plus coûteux et nécessiteront des investissements supplémentaires dans la construction d’infrastructures.

Celaconcerne principalement la version turkmène. Pour la mettre en œuvre, il faut poser un gazoduc sous la mer Caspienne, ce qui exige le consentement des Etats riverains, y compris la Russie et l’Iran. Erdogan, cependant, essayera de développer l’option du gaz turkmène.

Source:« Courrier militaro-industriel «  (publié en version abrégée, la version complète de l’article est disponible sur le site)

 

 
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Publié par le décembre 23, 2015 dans Asie

 

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