cet article de nos camarades du PTB exprime un enthousiasme pour Bernie Sanders « gauche authentique ». Ce qui me semble le plus juste dans leur analyse est l’idée que le candidat ne sera rien sans un mouvement et sans des forces organisées y compris syndicales. Le parti démocrate dont il est le candidat ne représente en rien cette force qui demande à naître et c’est la principale leçon que nous devrions en tirer partout dans le monde où l’on assiste à des mouvements radicalisés, « que faire? aurait dit Lénine alors que nous avons laissé détruire les partis dont les temps nouveaux ont un urgent besoin ?
Les États-Unis connaissent un regain d’activisme syndical. Et trois quarts des nouveaux adhérents dans les syndicats aux USA ont moins de 35 ans (Photo FF15).
Pour ouvrir une discussion globale sur nos perspectives historiques dit l’auteur de l’article Denis COLLIN, je partage sa vision sur bien des points quant à la nécessité de dénoncer ce que l’on tente de nous imposer ce qu’a été mai 68. parce que ce que l’on peut reprocher à son analyse pertinente sur bien des points c’est qu’elle est comme les autres sur cette époque là, elles surestiment certaines figures et sousestiment l’existence d’une forte CGT et d’un parti communiste qui ont donné un tout autre visage à mai 68 que dans le monde, en allemagne, au Japon, où la révolte était celle de jeunes étudiants… Mais même sous cette forme-là je n’ai jamais eu que méfiance pour le bilan historique de mai 68 qui s’avère à mes yeux être la pire des corruptions de la gauche et de l’espérance révolutionnaire, celle d’un Mitterrand en train de se décomposer et de tout détruire autour de lui, mes mémoires (le temps retrouvé d’un communiste. Delga. 2019) font état de cette analyse et c’est pourquoi je crois qu’un critique à la fois de mai 68 et de sa représentation qui sont réellement une sorte de tradition de la gauche qui pèse comme un cauchemar sur le cerveau des vivants, je ne sais mêle plus si le PCF pourra être sauvé de la débâcle telle qu’elle s’amplifie y compris dans la célébration des 100 ans du pCF confié à des soixante-huitards nostalgiques et des marxistes de salon. (note de Danielle Bleitrach)
« La tradition de toutes les générations mortes pèse comme un cauchemar sur le cerveau des vivants. » (Karl Marx, Le 18 brumaire de Louis Bonaparte)
Nous vivons depuis plus d’un an une sorte de « mai 68 rampant », des Gilets Jaunes au mouvement contre la réforme des retraites, la grande majorité du peuple semble en train de faire sécession. Dans le même temps, par toutes sortes de canaux, ce pouvoir qui déploie une violence supérieure à celle du pouvoir gaulliste en 68 tente de se présenter comme l’héritier de 68. Dans l’escouade des idéologues au service du pouvoir, une place particulière est accordée aux « revenants » de mai 68. Daniel Cohn-Bendit, le célèbre « anarchiste » et Romain Goupil, le guérillero du Quartier latin vont à l’assaut de tous les médias pour défendre la loi sur les retraites et leur idole, Emmanuel Macron.
Il y a bien longtemps que Guy Hocquenghem a écrit sa Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary (1986). Il y donnait une série de portraits saignants : Serge July, Finkielkraut, BHL, Glucksmann, Cohn-Bendit, Roland Castro, Coluche, Arrabal, Bizot, Patrice Chéreau, Marguerite Duras, Marin Karmitz, Bernard Kouchner… Ces grands révolutionnaires étaient devenus des bourgeois installés dans le beau monde. Toute cette petite camarilla continue d’officier, eux ou leurs héritiers en ligne directe. Certains sont devenus ministres comme Kouchner, d’autres conseillers des princes comme Castro, passé de Mitterrand à Macron (ils ont la peau dure, ceux-là !). On y ajoutera le sénateur Henri Weber, ex-auteur de Mai 68, une répétition générale. Et d’autres, moins connus que l’on retrouve socialistes puis macronistes dans des bataillons de notables qui donnent irrésistiblement l’envie d’entonner la chanson de Jacques Brel, « Les bourgeois, c’est comme les cochons… »
On peut se dire que c’est un classique : soyez rouges dans votre jeunesse, vous avez bien le temps de blanchir ! Ou encore cet adage assez débile, « celui qui n’est pas révolutionnaire à 20 ans n’a pas de cœur, celui qui l’est encore à 40 ans n’a pas de tête. » Ce qui est nouveau, ce n’est pas le changement de camp, la trahison aux cheveux blancs, c’est que, pour ces gens, il n’y a pas de trahison, pas de véritable changement de camp, et que leur « révolution » de 1968 n’était au fond que les premiers cris du nouveau-né des années 80 à nos jours : le « néolibéralisme » qui s’épanouit avec Macron. Il faut pour comprendre cela revenir sur 68 et la suite, comprendre comment l’échec de ce qui fut, pour nombre d’entre nous un vaste mouvement révolutionnaire a ouvert une nouvelle période de la domination capitaliste.
Intrication de trois grands mouvements
Mai 68 est un nœud, un moment de l’histoire où s’entremêlent trois mouvements qui semblent converger et qui vont se désintriquer au profit d’un seul de ces mouvements et au détriment des deux autres. Intrication, cela veut dire non seulement que les mouvements différents qui composent mai 68 se combinent de manière parfois explosive, mais aussi que les courants politiques réels et les individus n’appartiennent pas nécessaire à l’un ou l’autre mais sont à la fois dans l’un et l’autre.
Nous avons, d’une part, un mouvement ouvrier classique, un soulèvement dans la lignée de 1936 contre les conditions de vie que la « modernisation » du capital impose aux travailleurs. Il y a des prémices : la grève des mineurs de 1963, les mouvements de jeunes ouvriers chez Citroën à Rennes ou chez Berliet à Caen, mouvements très durs qui voient de nouvelles couches de la classe ouvrière affronter les CRS, les protestations contre les ordonnances de 1967 sur la Sécurité sociale, etc. Une nouvelle couche d’OS directement arrachés à la vie rurale et qui ne connaissent pas le sens de la discipline de la vieille classe ouvrière bien encadrée par le PCF et la CGT. Dans ce mouvement ouvrier en pleine mutation, il faut aussi noter l’arrivée massive des ingénieurs, cadres et techniciens, la « nouvelle classe ouvrière » chère à Serge Mallet et dont le PSU se voulait de fait le représentant politique attitré.
Ce mouvement va prendre le dessus à partir du 14 mai par la grève avec occupation partie de la SNIAS à Nantes et de Renault à Billancourt, mouvement qui va s’étendre comme une trainée de poudre. Avant le 13 mai, c’est le mouvement étudiant qui tient le haut du pavé, avec Cohn-Bendit (mouvement du 22 mars), Jacques Sauvageot (UNEF), rejoint par le SNESup dirigé par Alain Geismar. À partir du 13 mai, ce sont les syndicats qui reprennent la main. Le mouvement se terminera avec les accords de Grenelle, qui furent loin d’être négligeables : importante augmentation du SMIG, quatrième semaine de congés payés, nouveaux droits syndicaux dans l’entreprise. La reprise fut difficile parce que l’occupation des usines avait fait naître des espoirs d’un changement plus profond. Les dirigeants syndicaux doivent s’y reprendre à deux fois pour faire avaler les accords de Grenelle (voir le fameux épisode du discours de Séguy à Renault-Billancourt). Les comités de grève qui n’ont jamais réussi à se centraliser font de la résistance et bien après mai 68 beaucoup pensaient que ce n’était qu’un début et que le mai réussi était devant nous. Mais ce fut, de fait, le dernier grand mouvement ouvrier où la question d’un horizon socialiste fut posée dans la lutte même.
Le deuxième mouvement était celui de la radicalisation politique de toute une frange, notamment de la jeunesse étudiante comme prolongement de la situation internationale. La génération de ceux qui avaient combattu la guerre d’Algérie retrouvait ceux qui dénonçaient la guerre américaine au Vietnam et qui prenaient comme nouveau modèle, face à une URSS un peu démonétisée, la révolution cubaine (« Un grand espoir, c’est Cuba », chantait Colette Magny, comme réponse à son « J’ai le mal de vivre »). Beaucoup d’espoirs, parfois un peu puérils, beaucoup de confusions et d’illusions aussi. Derrière ce mouvement, les grandes puissances (URSS et Chine) agissaient aussi en coulisses. Et puis il y eut le « Printemps de Prague » et l’espoir d’une convergence entre les mouvements pour la démocratie à l’Est et contre le capitalisme à l’Ouest. Pour des jeunes gens qui pour la première fois avaient une vue directe sur le monde (par la télévision), il y avait matière à penser et à chercher ce qu’étaient les fins ultimes de l’humanité.
Le troisième mouvement est celui de la modernisation du capitalisme, du passage d’un capitalisme fondé sur la transmission du patrimoine au capital mobile qui se mettait en place et que la modernisation industrielle avait préparé — en France comme ailleurs. Le gaullisme était vraiment trop « vieille France », trop engoncé dans ses préjugés, bien que là aussi les choses commençaient à changer puisque c’est le gaulliste Lucien Neuwirth qui avait fait légaliser l’usage de la pilule contraceptive, au grand dam de la plupart de ses collègues. La liberté sexuelle devint un mot d’ordre chez les enfants de la bourgeoisie ; il y avait belle lurette que les ouvriers enfreignaient allégrement les « normes » bourgeoises en cette matière : en l’absence de patrimoine à gérer, on y pratiquait souvent l’union libre (on « vivait à la colle »), mais les bourgeois étaient encore coincés, nous dit-on : la pratique des « rallyes » pour orienter les mariages, qui existe toujours aujourd’hui, se doublait pourtant des booms, où les stupéfiants étaient de règle chez les rejetons de la bonne société, et ce bien avant 68 (le cinéma en offre de nombreux témoignages). Quoi qu’il en soit, « l’héroïque bataille » pour la liberté sexuelle était dans l’air du temps et recouvrait un contenu politique qu’on peut résumer par « à bas les normes ! » Cette partie du mouvement de 68 représentait très précisément « l’extrême gauche du capital » et Cohn-Bendit était son porte-parole attitré. Le « mouvement du 22 mars » né à Nanterre sous la houlette du futur macronien défendait cette idée ébouriffante : permettre aux garçons d’avoir accès à la cité des filles.
Ces trois mouvements étaient complètement intriqués et l’on trouve la même intrication en Italie, mais ni aux États-Unis, ni en Allemagne, par exemple, où la composante ouvrière du mouvement est absente. L’idée largement partagée à « l’extrême gauche » d’un vaste mouvement révolutionnaire mondial est notoirement fausse, mais elle a entretenu la flamme et permis l’existence de mouvements dits révolutionnaires assez importants dans toute une série de pays avancés.
Le déclin du mouvement ouvrier
À partir de 1968, nous assistons, à travers des soubresauts, à un long déclin du mouvement ouvrier organisé, c’est-à-dire des grands partis ouvriers de masse et des syndicats. Après une pointe dans les années 80, le PCI se saborde au congrès de Bologne (1991) pour devenir « social-démocrate », puis démocrate tout court en fusionnant avec une aile de la démocratie chrétienne. Le PSI, miné par la corruption de son chef, Craxi, disparaît à peu près du paysage. Les tentatives de maintenir un espoir communiste en Italie, avec le Partito Comunista Rifondazione finiront aussi par s’enliser. En Allemagne, nous assistons à un lent déclin du SPD qui n’est plus aujourd’hui que l’ombre de lui-même. En France, le PCF a commencé à décliner à la fin des années 70 pour presque s’effacer après la disparition de Georges Marchais, ne survivant que grâce à ses alliances électorales avec le PS, alliances qui dans le même temps contribuaient aussi à son déclin. Le PS français n’a jamais été véritablement un parti ouvrier, faute de liens sérieux avec la classe ouvrière organisée. Il était devenu un parti des classes moyennes salariées et des intellectuels. Mais son lien avec l’histoire en faisait tout de même une sorte de « parti ouvrier ». Sa quasi-disparition dans le macronisme n’est peut-être pas définitive, mais elle est tout de même une confirmation de ce déclin du mouvement ouvrier traditionnel. Cela ne signifie pas que la lutte des classes a disparu. « La classe ouvrière a le dos au mur », disaient les « lambertistes » avant 68. C’est maintenant que cette proposition prend tout son sens. Toutes les batailles récentes, après 1995 qui fut le dernier grand mouvement qui ait eu à peu près gain de cause, ont été perdues. Non seulement le mouvement ouvrier n’a plus engagé de bataille pour gagner de nouveaux acquis, mais il a été incapable de défendre ses positions et nous assistons, en France, mais aussi dans toute l’Europe à des reculs importants. Symboliquement, la défaite des mineurs britanniques battus par Mrs Thatcher en 1983 exprime toute la période et le conflit présent autour des retraites doit être compris dans ce contexte. Il est nécessaire de s’interroger sur cet affaiblissement du mouvement ouvrier, car les explications traditionnelles par la trahison des appareils ou la méchanceté de la bourgeoisie sont ridicules. Et si l’on s’avance dans cette recherche, on sera obligé d’aller loin. Je laisse ici la question ouverte. Y a-t-il une fatalité qui fait que la classe ouvrière soit vouée à l’impuissance politique (comme aujourd’hui) ? Doit-elle toujours subir une représentation politique qui finit par préférer l’ordre existant au danger d’un changement révolutionnaire ? Faut-il accepter la thèse, défendue par Costanzo Preve, selon laquelle les classes subalternes ne peuvent jamais devenir des classes dominantes ? Quoi qu’il en soit, on peut comprendre des pans entiers du gauchisme post-soixante-huit comme des tentatives pour trouver des substituts à la classe ouvrière qui se révélerait incapable d’accomplir la mission historique que le marxisme orthodoxe et sa version marxiste-léniniste lui avaient attribuée. Plus de classe ouvrière comme « sujet révolutionnaire », place aux nouveaux sujets révolutionnaires : la « petite bourgeoisie radicalisée », les « nouvelles avant-gardes larges ayant rompu avec le réformisme dans la tactique des luttes », tout ce que l’on pouvait trouver dans les écrits de Daniel Bensaïd, notamment le fameux bulletin intérieur de la Ligue communiste (BI 30) publié en juin 1972. Dans ce texte Jebrac-Ségur-Bensaïd spéculait même sur les « vertus militaires de la paysannerie » et imaginait une guerre de guérilla rurale l’échelle du continent européen. Je sais qu’aujourd’hui il faut dire du bien du grand penseur Bensaïd, mais à ce niveau de délire, on s’interroge… Le plus important est bien cette élimination progressive de la classe ouvrière et ce mouvement vers la petite-bourgeoisie « radicalisée » dont nous voyons maintenant les manifestations éclatantes.
La seule lueur de reprise d’un mouvement social sérieux est venue d’où l’on ne l’attendait pas, avec les Gilets jaunes, mouvement atypique, mais incontestablement populaire mêlant salariés et travailleurs indépendants, comme dans les premières heures du mouvement ouvrier, et pratiquant l’action directe. Une large partie de l’intelligentsia de gauche n’a rien vu, souvent rien compris à ces manifestations où la couleur jaune était l’uniforme, le chant révolutionnaire La Marseillaise et le drapeau un drapeau tricolore ! Plus rien à voir avec la « convergence des luttes », les « Nuits debout » et autres spectacles pour petits bourgeois. Ce qui est à l’ordre du jour, c’est la reconstruction d’un mouvement populaire, dont la composante ouvrière au sens large est essentielle mais fait la jonction avec les autres composantes des classes laborieuses et dont la base pourrait ne plus être entreprise mais la commune, le quartier, base dont le rond-point est l’emblème.
Les impasses de l’anti-impérialisme
Le deuxième aspect est la révélation de l’impasse politique de l’anti-impérialisme. Évidemment, sur le plan moral, l’agression américaine au Vietnam était insupportable, comme le fut la mainmise sur le Chili le 11 septembre 1973. Défendre inconditionnellement les nations agressées par l’impérialisme n’est pas seulement un devoir « révolutionnaire », mais aussi un devoir de quiconque est attaché à la démocratie et à la souveraineté des peuples, toutes choses proclamées par la révolution « bourgeoise » de 1789. Mais cela n’implique pas le soutien politique aux gouvernements des nations agressées. Être contre les guerres menées contre l’Irak en 1991 (merci Mitterrand !) et 2003, ce n’est évidemment pas soutenir Saddam Hussein, tyran spécialisé dans la pendaison des communistes. Dénoncer les ingérences US au Venezuela n’implique pas de se rallier au « bolivarisme » de Chavez ou Maduro. Mais ces distinctions étaient trop subtiles pour nos « anti-impérialistes » qui se mirent en devoir de trouver partout des gouvernements révolutionnaires sui generis, comme le Parti communiste vietnamien, et pendant un temps le Front Uni National du Kampuchéa (le FUNK, autrement dit les sinistres Khmers rouges).
Cet anti-impérialisme avait deux effets : premièrement le développement d’une complaisance, pour le moins, envers les régimes staliniens qui étaient classés, peu ou prou, parmi les anti-impérialistes ; et, deuxièmement, de nourrir une vision de l’histoire dans laquelle l’intelligentsia petite-bourgeoise tient le rôle principal. Le premier aspect est peut-être même le moins important. Après tout pour vaincre le pire des dangers on peut faire alliance avec le diable et même avec sa grand-mère et l’Union soviétique avait joué un rôle majeur dans la défaite du nazisme. Le plus important est le deuxième aspect : nous avons un mouvement historique qui place au premier plan la classe petite-bourgeoise, intellectuels, militaires, indépendants, etc., et elle prétend accomplir les fins ultimes de l’humanité ! En effet, les principaux mouvements révolutionnaires anti-impérialistes sont aux mains de cette classe et le mouvement ouvrier n’y joue aucun rôle ou un rôle minoritaire, quand il ne s’oppose pas à ces nouveaux « sujets historiques ». Ce ne sont même pas les chefs petits-bourgeois des ouvriers. Leur base est essentiellement paysanne en Chine, au Vietnam, au Cambodge et même dans la plupart des pays d’Amérique latine. Il y a une classe ouvrière active en Argentine, en Bolivie et bientôt au Brésil, mais elle restera totalement imperméable au discours des guérilleros. Le destin du marxisme est désormais étroitement lié à ces classes intermédiaires qui trouvent dans la « dictature du prolétariat » une couverture idéologique adéquate pour légitimer leur action en vue du pouvoir, qu’elle se sent fondée à exercer. Elle doit pour cela combattre les puissances capitalistes étrangères. J’ai développé tout cela de manière un peu approfondie dans Le cauchemar de Marx. Mais dans ces mouvements exotiques, la petite bourgeoisie intellectuelle européenne, qui ne sait pas trop bien quel sera son avenir, va trouver un idéal auquel s’identifier. Il y a de nombreuses théorisations de ce déplacement de l’axe de la pensée révolutionnaire : l’encerclement des villes par les campagnes (Mao), les damnés de la terre (Frantz Fanon), etc. Les élucubrations du congrès de Bakou des peuples d’Orient (1920) vont être reprises sous des formes diverses en remplaçant l’opposition entre prolétaires et bourgeois par l’opposition entre nations impérialistes et nations prolétaires — une thèse que l’on trouve déjà chez Mussolini dans les premières années du mouvement fasciste.
Si l’on revient sur cette histoire, on comprend mieux l’islamophilie d’une large partie des groupes d’extrême gauche d’aujourd’hui. Un musulman est par définition un représentant des nations prolétaires, alors qu’un ouvrier blanc et hétérosexuel est un membre de l’aristocratie ouvrière vendue à l’impérialisme — il y a même des citations de Lénine toutes prêtes ! On comprend mieux avec quelle constance cette « petite bourgeoise radicalisée » a su conquérir les lieux du pouvoir intellectuel pour imposer progressivement sa façon de voir le monde, pour conquérir l’hégémonie comme on dirait en paraphrasant Gramsci. Il y a un dernier point à souligner. Le soutien « anti-impérialiste » aux luttes armées a développé une vision militaire de la vie politique. Dans Le bon, la brute et le truand, le personnage joué par Clint Eastwood dit : « tu vois, le monde se divise en deux catégories, celui qui a un pistolet chargé et celui qui creuse et toi tu creuses. » C’est la vision du monde qu’ont développée les partisans de la lutte armée : les armes décident de tout. Il n’est donc pas très étonnant que certains d’entre eux aient rejoint sans sourciller le camp de l’impérialisme US quand ce pays s’est engagé dans une politique d’exportation par les armes des « valeurs de l’Amérique ». C’est ainsi que l’ancien chef du Service d’ordre de la Ligue communiste, Romain Goupil, s’est retrouvé comme l’un des porte-parole des « néocons » à la française en soutenant l’intervention américaine contre l’Irak en 2003.
Tout cela doit être nuancé. La révolte morale contre le domination est fondamentalement juste. La défense de la liberté est universelle et il faut reconnaître la sincérité de l’engagement politique révolutionnaire de beaucoup de jeunes. Il faut seulement en comprendre les limites : cet engagement peut conduire au socialisme, c’est-à-dire au « vieux mouvement ouvrier », issu de l’Internationale Ouvrière. Mais il peut aussi nourrir une pensée cynique, l’idée que tout est possible et que tous les moyens sont bons pour gagner. Sinon, comment expliquer que la révolte morale débouche sur le soutien à des régimes abominables ?
La révolution sociétale
La « révolution sexuelle » est le point de départ de la prise de conscience de soi d’une nouvelle classe ayant vocation exercer le pouvoir dans tous les domaines, le pouvoir politique dès que possible, mais aussi le pouvoir dans le monde de la culture et le pouvoir idéologique avec un but : en finir avec les normes étouffantes, « vivre sans temps mort » et « jouir sans entraves ». En finir avec les normes bourgeoises, c’est d’abord en finir la vieille morale familiale, ce qui n’est pas pour déplaire aux plus lucides des membres de la classe capitaliste. La famille est un obstacle à la fluidité nécessaire au marché du travail. En outre, la liberté sexuelle a deux avantages : elle ouvre un nouveau marché, le marché du sexe sous toutes ses formes, et, en second lieu, elle procède de cette « désublimation répressive » dont parle Marcuse — comment user de l’énergie sexuelle pour augmenter le profit. Le libertarisme sociétal est devenu le cheval de Troie de la liquidation de toutes les normes protégeant les individus. « Vivre sans temps mort » : voilà un mot d’ordre que n’importe quel capitalisme reprendra à son compte. Il ne doit y avoir aucun temps mort pour le travail pendant la journée de travail et dans la vie elle-même il ne doit y avoir aucun temps mort pour entreprendre, commercer, acheter et vendre, aucun temps qui ne soit sacrifié à Mammon ! Quant à « jouir sans entraves », c’est le mot d’ordre sous-jacent à la plupart des publicités. Évidemment, ceux qui veulent jouir sans entraves, qui veulent « tout, tout de suite » (autre mot d’ordre de VLR), ceux-là sont dans le sens de l’histoire, dans le sens du « progrès » et ils devront être prêts à en payer le prix.
On pourra objecter que le capitalisme est capable de tout récupérer, et qu’il peut récupérer les révoltes qui sont dirigées contre lui. Sans doute. Mais dans le cas d’espèce, ce sont les « rebelles » eux-mêmes qui ont expliqué pourquoi le néolibéralisme (ils lui ont donné un autre nom) était l’avenir qu’il fallait faire advenir. L’idéal du mode de production capitaliste est la « société liquide » (Zigmunt Bauman), une société d’individus en mouvement, d’individus sans appartenance, une société qui réalise pleinement les vœux de Deleuze et Guattari dans leur livre de 1972, L’Anti-Œdipe. C’est un autre héros intellectuel de l’extrême gauche, Michel Foucault qui va faire de l’extension de la « liberté » capitaliste et de l’abolition des normes la véritable émancipation. La French Theory, le « postmodernisme » va sonner la fin du grand récit révolutionnaire (cf. Lyotard) et transformer la « rébellion » en carburant de la machine capitaliste.
Des individus interchangeables, ni hommes ni femmes, ni jeunes ni vieux (d’ailleurs il n’y a plus que des jeunes dans le monde postmoderne), des forces de travail mobiles et des consommateurs occupés à consommer, voilà ce qu’a fabriqué la révolte des soixante-huitards, du moins ceux qui se présentent sous cette étiquette et construisent le récit de 68 à destination des médias dominants d’aujourd’hui. Le lien entre le macronisme et les héros de la « révolution sexuelle » d’antan se fait facilement. Macron, tout en essayant de se garder de sa droite, est favorable aux innovations « sociétales », il est prêt à laisser toutes sortes de bouffons (comme Bellatar) occuper la scène et il s’affiche volontiers avec les anciens soixante-huitards, devenus les soutiens des lanceurs de LBD et de grenades lacrymogènes contre des manifestants qui, eux, n’ont pas de pavés en main…
Ce qui était intriqué est dénoué. L’époque peint maintenant du gris sur du gris. La page de 68 est tournée, mais encore faut-il la penser sérieusement. Ces quelques réflexions ne visent qu’à ébaucher des lignes suivant lesquelles des élaborations plus rigoureuses pourront être conduites. Nous avons eu de nombreuses analyses politiques mais nous manquons d’une vraie compréhension sociale et psychologique de l’ensemble de cette période historique et cette compréhension nous aiderait grandement à l’heure où s’impose la nécessité de reconstruire un mouvement de résistance au capitalisme et de transformation sociale.
Les marxistes soutiennent que même si les individus ne peuvent pas changer le cours objectif de l’histoire à volonté, l’individu peut parfois jouer un rôle majeur, dit la BIBLIOTHEQUE MARX, cet article publié par le Morning star est-il « un principe de consolation » devant la médiocrité actuelle des leaders politiques, voir celle des penseurs. Quand on n’a pas de Fidel Castro en magasin, on peut se consoler en se disant que si ça n’avait pas été Marx s’eut été quelqu’un d’autre. Mais personnellement j’aime mieux la réponse de Fidel Castro à la question. Il disait que « le génie politique » était plus courant que le génie artistique et scientifique et qu’il naissait du mouvement social, que la Révolution provoquait la naissance non seulement de ce type de génie mais de toute une floraison d’individus capables de mener l’affaire à bien et d’installer un nouveau type d’Etat. Parce que le génie politique et là la référence est Machiavel a trois capacités : « voir ce que les autres ne perçoivent pas », tirer une flèche sur une cible que personne ne perçoit dit Machiavel. Le second trait vient de là, il lui faut convaincre les aveugles de ce qu’il voit, être une Cassandre n’a aucun intérêt. Enfin i faut qu’il s’ache s’entourer et créer autour de lui un collectif qui sache à la fois le respecter et lui dire la vérité. » Si l’on considère le cas Castro on voit qu’il a toutes les caractéristiques avec un entourage qu’il élargit au peuple tout entier par un dialogue permanent et une attitude totalement irréprochable de don de soi. Si nous n’avons pas de Fidel Castro en magasin, il faut bien voir à quel point la plupart de nos politiciens sont éloignés de ce génie politique, opportuniste au jour le jour, abscons, impopulaires et arrogants. (note et traduction de danielle Bleitrach)
SI VOUS ÊTES une personne âgée, il est probable que l’histoire que vous avez eue à l’école était principalement une liste de dates de rois, de reines et de (vieux) premiers ministres.
Si vous êtes jeune, il est probable que vous en aurez appris plus sur les «mouvements» – la guerre civile américaine, peut-être sur le mouvement des droits civiques (mais probablement très peu sur la révolte paysanne, les débats de Putney, le chartisme ou les mineurs) grève, et probablement presque rien sur les luttes de classe en Europe).
Quoi qu’il en soit, il est probable que les noms des individus figurent en bonne place. Hitler a «déclenché» la seconde guerre mondiale: l’assassinat de l’archiduc Ferdinand (à Sarajevo par Gavrilo Princip, personnage moins connu, mais en quelque sorte un héros pour les Yougoslaves) a déclenché la première guerre mondiale.
Nous parlons de l’ère victorienne, de la France napoléonienne, du darwnisme, du thatchérisme – et, bien sûr, du marxisme!
Pour les marxistes, l’histoire essaie de regarder au-delà des individus pour examiner les raisons pour lesquelles les gens, y compris ceux dont vous n’aurez jamais entendu parler et ceux dont les noms n’ont jamais figuré dans aucun document écrit, ont agi comme ils l’ont fait.
Pas seulement les circonstances et les motivations individuelles, mais pourquoi les gens ont agi ensemble, collectivement.
Il s’agit de savoir comment les gens gagnent leur vie, comment ils voient le monde et ce qu’ils font pour le changer et pourquoi, en particulier en tant que membres d’un groupe plus large – leur classe.
Aucun individu, aussi talentueux, capable, méchant ou clairvoyant puisse-t-il déterminer le cours principal du développement historique.
Cela ne signifie pas que les individus ne sont pas importants – ils le sont. Et dans certaines circonstances, le rôle joué par les individus peut être déterminant.
Sans Wat Tyler, Jeanne d’Arc, Henry VIII, Cromwell, Napoléon, Hitler, Mussolini, Staline, Mao, Kennedy, Gorbatchev, Thatcher, Blair (ajouter Trump et Johnson et Corbyn), l’histoire des périodes dans lesquelles ils vivaient serait incomplète , Pour dire le moins.
Un «jeu de devinettes» en relation avec le rôle des individus dans l’histoire est: pourquoi ont-ils fait ce qu’ils ont fait?
Un autre (abandonné par les historiens sérieux) est le «contrefactuel»; que se serait-il passé – et à quoi ressemblerait le monde aujourd’hui – s’ils avaient agi différemment?
L’un des textes marxistes les plus influents était Le rôle de l’individu dans l’histoire de Georgi Plekhanov.
Cela a été écrit comme une attaque contre la théorie du «homme grand» de l’histoire – popularisée par l’écrivain Thomas Carlyle – et en particulier comme une polémique contre les Narodniks russes qui ont souligné le rôle de l’action directe et le héros révolutionnaire (éventuellement armé d’une bombe ) dans la transformation du tsarisme.
Plekhanov a soutenu que l’histoire ne doit être considérée ni comme la conséquence des actions d’individus «d’en haut» ni du mouvements «d’en bas».
La relation est dialectique, et démêler ces liens est l’un des intérêt de l’histoire en tant que sujet, et devient vital si nous voulons essayer non seulement d’interpréter le monde, mais de le changer.
La thèse de Plekhanov comportait un certain nombre d’éléments. L’une était assez abstraite – la relation entre le «libre arbitre» et le fatalisme.
Il a soutenu que le changement historique ne pouvait plus être considéré comme la conséquence d’une nature humaine innée, ou comme la manifestation de la volonté divine.
Le «développement des forces productives» était la base la plus générale du changement historique, car il était étroitement lié aux changements de la société.
Mais il y a aussi ce qu’il a appelé des «causes particulières» – des facteurs spécifiques et contingents liés à la situation existante à tout moment et en tout lieu.
Enfin, il a déclaré: «L’influence des causes particulières est complétée par le fonctionnement des causes individuelles […] et d’autres« accidents »grâce auxquels les événements prennent enfin leurs caractéristiques individuelles.
«Les causes individuelles ne peuvent pas entraîner de changements fondamentaux dans le fonctionnement des causes générales et particulières […] Néanmoins, il ne fait aucun doute que l’histoire aurait eu des caractéristiques différentes si les causes individuelles qui l’avaient influencée avaient été remplacées par d’autres causes du même ordre. «
Les marxistes soutiennent que si les individus ne peuvent pas changer à volonté le cours objectif de l’histoire, néanmoins l’individu peut parfois jouer un rôle majeur.
Comme l’a déclaré Lénine: «L’idée de nécessité historique ne sape en rien le rôle de l’individu dans l’histoire: toute l’histoire est constituée des actions des individus».
Le point de vue marxiste le plus proche est peut-être que les individus se présentent pour jouer un rôle important dans les événements lorsque le besoin ou l’opportunité se présente: «vient le temps…» Mais c’est aussi un processus dialectique – en agissant pour changer les choses, l’individu change également.
Comme Marx l’a dit dans Capital, le socialisme et la lutte pour y parvenir sont un élément majeur de ce qu’il a appelé «la réalisation de soi de la personne» et les transitions des individus en «êtres humains pleinement développés».
Tout cela s’applique aux changements négatifs ainsi qu’aux changements progressifs. Sans Staline, l’histoire soviétique – et en fait l’histoire du mouvement communiste mondial jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale et après celle-ci – aurait pu suivre un cours très différent.
Mais comme dans l’Allemagne nazie, le «culte de l’individu» masque même ici les circonstances objectives qui ont permis à une personne d’exercer une telle influence dominante – dans le premier cas, la nécessité pour le jeune État socialiste de se défendre contre les attaques de l’extérieur et de l’intérieur. (beaucoup d’entre eux l’imaginaient) et dans le cas de l’Allemagne nazie, le chaos de la république de Weimar et la montée du fascisme comme «solution» à une crise plus générale du capitalisme.
L’argument ne s’applique pas seulement aux personnalités politiques, mais aussi à la science et à la culture.
La science (par exemple) est souvent conçue comme une connaissance ou des «faits» purs, indépendamment de la façon dont ils sont produits, contrôlés ou utilisés.
Les marxistes contesteraient cela, soulignant que tout au long de l’histoire, le contenu changeant des connaissances scientifiques – qui sont comprises à tout moment dans le temps comme des faits – sont étroitement liés aux conditions sociales de leur production, bien que d’une manière dialectique plutôt que déterministe.
Marx, écrivant à Engels à propos de la théorie de l’évolution de Darwin par sélection naturelle, a commenté: «Il est remarquable de voir comment, parmi les bêtes et les plantes, Darwin reconnaît sa société anglaise avec sa division du travail, la concurrence, l’ouverture de nouveaux marchés, les« inventions »et la lutte malthusienne. pour l’existence ».
Darwin lui-même n’a été incité à «rendre public» que lorsqu’il a découvert qu’Alfred Wallace, travaillant dans l’archipel malais, avait pensé – et écrit – dans le même sens.
En 1931, une délégation soviétique est arrivée à l’improviste lors du deuxième Congrès international d’histoire de la science à Londres, où son chef, Boris Hessen, a présenté un document intitulé Les racines socio-économiques des principes de Newton.
Hessen a soutenu que les Principia d’Isaac Newton – peut-être le traité scientifique le plus important de la civilisation occidentale – étaient intimement liés aux conditions sociales de sa production.
Les lois du mouvement de Newton et sa «découverte» de la gravité n’étaient pas un don de la providence divine, pas (seulement) le produit du génie individuel (ou la conséquence d’être frappé par une pomme qui tombe).
Ils répondaient à des problèmes techniques spécifiques du capitalisme ancien, en particulier la nécessité d’améliorer la navigation maritime, le développement de nouvelles machines et d’armes balistiques en temps de guerre.
Dans aucun cas, le fait que les théories scientifiques soient liées au contexte social de leur production signifie qu’elles sont «fausses» ou manquent d’objectivité.
Mais il remet en question la vision conventionnelle des scientifiques (et de la science) comme autonomes, ayant un impact «sur» la société mais n’étant pas influencés par la société.
Le marxisme lui-même, bien sûr, est un produit de son temps. Lénine a dit des œuvres de Marx et Engels qu’elles étaient «le successeur légitime du meilleur que l’humanité ait produit au 19e siècle, tel que représenté par la philosophie allemande, l’économie politique anglaise et le socialisme français».
Ces trois courants ont leur propre fondement dans les actions des individus et du contexte social dans lequel ils agissent.
La réalisation de Marx et Engels a été de s’appuyer sur eux et de les relier à une vision du monde qui a fourni une partie du contexte social et politique dans lequel les révolutionnaires ultérieurs ont joué leur rôle dans le développement de la théorie et de la pratique – à la fois l’interprétation et le changement de la société.
Finissons donc avec le marxisme lui-même. L’attribution de noms individuels à des périodes historiques ou à des théories scientifiques est elle-même (comme l’a suggéré Plekhanov) le résultat de circonstances historiques.
Marx était sans aucun doute une figure imposante, mais il en était de même pour une multitude d’autres. Si ce n’était pas Marx qui avait lancé le bal (incidemment, ni Marx ni Engels n’aimaient le terme marxisme), cela aurait certainement été quelqu’un d’autre – bien que notre compréhension de l’histoire humaine et de la société aurait pu prendre plus de temps à se développer et aurait pu développé d’une manière quelque peu différente.
Cette réponse a été collectivement révisée par les participants à la série Introduction au marxisme à la Marx Memorial Library and Workers ‘School. Les détails de ce cours et d’autres peuvent être trouvés à www.marx-memorial-library.org.uk .
«À Cuba, il n’y a pas d’analphabètes, ni d’enfants sans couverture médicale», alors l’ex-athlète nie la pauvreté de l’île. Ce qu’il nous dit également c’est la manière dont Trump a choisi d’étrangler Cuba plus qu’aucun président ne l’a fait jusqu’ici. Il me semble que nous devrions en tirer deux conséquences, ne pas nous contenter de liker ce texte mais renforcer la solidarité et les protestations à l’ambassade et aussi, si l’on peut aller directement leur porter notre solidarité en tant qu’amis et touristes. Le nombre des touristes français a baissé l’an dernier mais il est vrai que là aussi la politique de Macron qui étrangle les Français, pèse sur les plus pauvres mais aussi les couches moyennes a ses effets (note et traduction de Danielle Bleitrach).
Javier Sotomayor THE NATION
Le recordman mondial et détenteur du record depuis 1988 Javier Sotomayor a nié que Cuba était « pauvre » et a blâmé l’embargo et le président américain, Donald Trump, pour les « difficultés » de l’économie de l’île, dans une interview publiée ce samedi par le journal Espagnol La Vanguardia.
« Ne me dites pas que Cuba est pauvre », a répondu Sergio Heredia à Barcelone. « Nous ne sommes pas pauvres. À Cuba, il n’y a pas d’analphabètes, pas d’enfants sans couverture médicale. Pas d’enfants, pas d’adultes. Et il n’y a pas de personnes souffrant de malnutrition. Dans les sports, les sciences et l’éducation, nous sommes parmi les meilleurs au monde », a-t-il ajouté.
Après l’insistance de son intervieweur, l’ex-athlète cubain a également déclaré: « Nous souffrons économiquement de limitations. Nos dirigeants ont changé, mais la politique reste la même. Avec Obama, elle a avancé. Avec Trump, nous avons reculé par deux fois. Trump est le président américain le plus dur avec nous que tout ce que nous avons vécu »
Selon Sotomayor, l’embargo imposé par les États-Unis à Cuba affecte non seulement l’île mais aussi « qui veut avoir des affaires » avec le gouvernement. « Il y a des banques qui ne peuvent pas entrer. Des hôtels qui suspendent leur participation. D’autres qui ferment. En raison du blocus, certains de nos athlètes n’ont pas encore reçu les prix internationaux gagnés », a-t-il déclaré.
En outre, lors de l’interview, le recordman cubain a rappelé « les années Obama », dans lesquelles « une grande amélioration du tourisme a été notée ».
« Beaucoup d’Américains sont venus. Nous sommes devenus à la mode. Les hôtels n’étaient pas suffisants pour approvisionner et les maisons privées non plus », a-t-il déclaré avant de confesser au journaliste qu’il avait profité de ce moment pour ouvrir une entreprise, le Sports Bar 245, qui a fini par fermer.
En 1993, Javier Sotomayor a atteint 2,45 mètres et établi le record du monde du saut en hauteur qu’aucun autre athlète n’a réussi à battre jusqu’à aujourd’hui. Cependant, l’ex-athlète était devenu détenteur du record du monde cinq ans plus tôt, en 1988, lorsqu’il avait sauté 2,43 mètres.
Le Cubain a également été couronné champion olympique à Barcelone en 1992 et a été six fois roi du monde.
L’Etat va reprendre l’exploitation jusque-là assurée par Arriva, la filiale de Deutsche Bahn. C’est la deuxième nationalisation en deux ans, alors que le gouvernement prépare une remise à plat plus large du système de franchises mis en place au moment de la privatisation du secteur.
Les trains opérés par Arriva dans le nord de l’Angleterre transportent 108 millions de passagers par an. (AFP)
Publié le 29 janv. 2020 à 19h38Mis à jour le 29 janv. 2020 à 20h01
L’Etat fait son grand retour dans le secteur ferroviaire outre-Manche. Alors que la privatisation du milieu des années 1990 est particulièrement critiquée , le gouvernement de Boris Johnson a annoncé mercredi la renationalisation des lignes ferroviaires du nord de l’Angleterre, que gérait jusque-là la filiale de Deutsche Bahn Arriva, et connues pour une qualité de service que le ministre britannique des Transports Grant Schapps a qualifiée de « cauchemardesque ».
C’est la deuxième nationalisation en deux ans, après celle des lignes de l’est de l’Angleterre à la mi-2018, jusque-là opérées par Virgin Trains East Coast. Et d’autres pourraient suivre, comme la South Western Railways, a prévenu le gouvernement.
La privatisation du secteur, qui a donné lieu à la création de 16 franchises régionales confiées à des opérateurs privés ou non (dont la SNCF), est loin d’avoir donné les résultats escomptés . Retards, annulations, surcoûts et autres inefficiences : beaucoup d’opérateurs peinent à atteindre les revenus auxquels ils se sont engagés pour décrocher leur franchise. Le matériel roulant tarde à être renouvelé, et le réseau ferré appartenant à la société publique National Rail, à être modernisé.
Geste politique fort
Le gouvernement se prépare ainsi à revoir tout le dispositif. L’ex-directeur général de British Airways, Keith Williams, doit bientôt rendre un rapport très attendu, qui devrait préconiser de mettre à bas le système de franchises, sans aller pour autant jusqu’à une complète renationalisation.
L’Etat jouera son rôle d’« opérateur en dernier ressort » sur les lignes du nord en reprenant la main sur leur exploitation au 1er mars, soit 5 ans avant la fin de la concession accordée en 2016 à Arriva. Il a déjà promis d’agrandir 30 gares pour qu’elles puissent accueillir des trains plus grands, de veiller à une meilleure propreté des wagons ou encore de continuer à remplacer le matériel roulant. Invoquant la vétusté des infrastructures et les grèves, mais reconnaissant qu’« un nouveau plan est nécessaire », Arriva a dit « comprendre la décision du gouvernement ».
Il s’agit d’un geste politique fort vis-à-vis des élus et des électeurs des anciens bastions travaillistes du nord de l’Angleterre qui ont largement voté conservateur aux élections législatives de la mi-décembre. Boris Johnson, qui leur a promis d’investir dans les infrastructures, joue sur du velours : les retards sont particulièrement nombreux sur ces lignes desservant des villes comme Manchester, Leeds, Liverpool et Newcastle (seuls 50,6 % des trains ont été à l’heure entre le 10 novembre et le 7 décembre, contre 62,2 % en moyenne au niveau national) et les annulations aussi (7,3 % des trains contre 4,7 %).
Nul ne sait si la vague de mouvements anti-néolibéraux qui secouent la planète et la France peut effectivement aujourd’hui transformer la situation face à un pouvoir politique qui prétend ne lui laisser aucun espace, devenir de plus en plus autoritaire, mais ce qui est en train de se produire comme ici aux Etats-Unis est une radicalisation sur laquelle les partis tentent encore de surfer. Ils jouent encore les vieilles habitudes en tentant d’intégrer cette poussée qui partout va évoluer. Elle concerne en priorité la jeunesse mais pas seulement et elle est certainement le phénomène le plus intéressant du moment (note et traduction de Danielle Bleitrach)
Les participants écoutent le sénateur Bernie Sanders (I-Vt.) Parler lors d’un rassemblement à Sioux City, Iowa, dimanche. (Salwan Georges / The Washington Post)
Les responsables démocrates sont de plus en plus alarmés par le fait que le sénateur Bernie Sanders pourrait acquérir un élan imparable grâce au vote primaire qui débutera la semaine prochaine. Mais ils craignent également que tout effort anti-Sanders ne se retourne contre le parti démocrate, ce qui les a empêché jusqu’ici de réellement bloquer Sanders pour l’instant.
Le seul soupçon d’un mouvement anti-Sanders organisé risquerait d’aliéner les partisans parfois belligérants de l’indépendant du Vermont et d’entretenir l’idée que le processus est «truqué», disent de nombreux démocrates en privé. Les candidats de Democratic House dans les quartiers swing disent qu’ils sont nerveux à l’idée de courir avec le même ticket que Sanders, mais eux aussi hésitent à le dire publiquement.
Cela conduit certains centristes démocrates à avertir que le silence risque d’aboutir au fait qu’il soit trop tard quand on souhaitera s’y opposer.
Le parcours politique de Bernie Sanders
Pour comprendre comment Bernie Sanders est devenu candidat à la présidentielle, il faut commencer au Vermont. (Joyce Koh / The Washington Post)
« Les gens doivent commencer à prendre Bernie très au sérieux – il y a un risque vraiment important qu’il devienne imparable s’il gagne ces premiers États en grand nombre », a déclaré Matt Bennett, vice-président exécutif pour les affaires publiques de Third Way, un groupe démocrate centriste.
Mais malgré «certaines discussions entre des gens qui se tordent la main», a déclaré Bennett, «ce n’est pas comme si notre téléphone sonnait avec au bout une masse de gens qui disent:« Faisons quelque chose ». «
Third Way a lancé mardi un e-mail aux démocrates de l’Iowa disant que Sanders avait un «arrière-plan politiquement toxique» et que «ses positions d’extrême gauche repousseraient les électeurs swing». Et la majorité démocratique pour Israël, un groupe de démocrates pro-israéliens, a réservé 700 000 $ dans des publicités télévisées qui commenceront à être diffusées mercredi, apparemment l’effort le plus concerté à la télévision jusqu’à présent pour attaquer Sanders.
Mais ces mouvements restent l’exception au sein du parti. Certains démocrates disent avoir commis une erreur en 2016 en s’opposant à Sanders et à ses partisans, et ils répugnent à l’idée de risquer de recommencer la même manœuvre. D’autres avertissent que traiter Sanders trop doucement, cependant, pourrait conduire à une répétition de l’expérience des républicains de 2016, lorsqu’ils ont sous-estimé Donald Trump jusqu’à ce qu’il soit trop tard pour l’arrêter.
De toute façon, l’anxiété est palpable.
« Si Bernie est sur le ticket en tant que candidat, je n’ai aucune chance », a déclaré un candidat de Democratic House dans un quartier swing, s’exprimant sous couvert d’anonymat de peur de contrarier les partisans de Sanders. « Et si vous écriviez cela, je risque d’exploser au primaire. »
Le candidat a ajouté: «Bernie a un véritable public. Mais c’est une minorité, et il repousse beaucoup de gens. »
Sanders accueille dimanche des bénévoles et des sympathisants à son bureau de terrain à Ankeny, Iowa. (Salwan Georges / The Washington Post)
Ce récit de l’angoisse croissante au sein du Parti démocrate face aux risques de nommer un socialiste pour s’opposer au président Trump est basé sur des entretiens avec deux douzaines de responsables, stratèges et dirigeants. Ils disent que Sanders pourrait être écrasé par la machine Trump s’il était le candidat; en même temps, ils craignent que le dire officiellement ne remue son armée féroce et loyale.
Les partisans de Sanders – et ils sont nombreux, y compris des personnalités influentes telles que la représentante Alexandria Ocasio-Cortez (DN.Y.) – soutiennent que les critiques ne voient pas la réalité d’aujourd’hui. La véritable erreur des démocrates, disent-ils, serait de nommer un candidat qui ne parvient pas à exciter la base, tandis qu’une candidature Sanders dynamiserait non seulement les démocrates mais attirerait également de nouveaux électeurs au parti.
Mais d’autres disent que Sanders, malgré tout son succès, n’a jamais été soumis à un examen minutieux et que la campagne Trump l’aurait éviscéré s’il était le candidat, déterrant toutes sortes de déclarations douteuses ou absconses de la longue politique politique peu orthodoxe du sénateur de 78 ans.
« Sanders serait particulièrement problématique en tant que candidat », a déclaré Ben LaBolt, ancien assistant du président Barack Obama, car il est « un candidat largement non testé ».
Cet argument a été encore plus clairement exprimé dans le message de Third Way envoyé mardi aux démocrates de l’Iowa.
« Si Bernie Sanders devient le candidat, les chances de Trump de remporter un deuxième mandat augmentent considérablement, c’est pourquoi l’équipe Trump l’a qualifié de candidat » idéal « », lit le document de deux pages. «Démocrates de l’Iowa: veuillez ne pas faire ce que Trump veut que vous fassiez.»
Les spots de 30 secondes d’un super PAC connecté à la majorité démocratique pour Israël, quant à eux, présentent Iowans expliquant leurs préoccupations quant à savoir si Sanders peut gagner en novembre.
«J’aime Bernie. Je pense qu’il a de bonnes idées. Mais le Michigan? Pennsylvanie? Iowa? Ils ne vont tout simplement pas voter pour un socialiste », explique un électeur du nom de Michael Kuehner dans l’annonce. Un autre Iowan, Darby Holroyd, a déclaré: «J’ai des inquiétudes concernant la santé de Bernie Sanders, compte tenu du fait qu’il a eu une crise cardiaque.»
Sanders a eu une crise cardiaque en octobre qui l’a obligé à être hospitalisé et l’a brièvement éloigné de la campagne électorale.
Mark Mellman, président de la majorité démocratique pour Israël et du super PAC aligné, a déclaré que son groupe avait commencé à planifier la campagne il y a plusieurs semaines quand il est devenu clair que Sanders pourrait être le candidat, ajoutant qu’il n’avait travaillé avec aucun autre groupe.
Bien que les publicités se concentrent sur l’éligibilité, Sanders, qui serait le premier président juif, a attiré la colère de certains groupes pro-israéliens en qualifiant le Premier ministre du pays, Benjamin Netanyahu, de «raciste» et en faisant campagne avec les représentants. Rashida Tlaib ( D-Mich.) Et Ilhan Omar (D-Minn.), Qui soutiennent un mouvement controversé de boycott d’Israël.
Sanders a tweeté un message mardi soir accusant les publicités de forces riches et puissantes qui s’opposent à lui.
« Ce n’est un secret pour personne que nous nous attaquons à l’establishment politique et aux gros intérêts, qui diffusent maintenant des annonces d’attaques contre nous dans l’Iowa », a déclaré Sanders dans le tweet. «Mais nous avons le peuple et notre mouvement populaire l’emportera.»
Le directeur de campagne de Sanders, Faiz Shakir, a envoyé un appel de fonds sur la base des attaques.
« Nous avons une petite avance dans l’Iowa avant le caucus de lundi », écrit-il. «Mais des groupes extérieurs attaquent et espèrent nous arrêter. Bernie a besoin de nous tous si nous voulons riposter et gagner. »
La représentante Alexandria Ocasio-Cortez (DN.Y.) pose pour un selfie après avoir pris la parole dimanche au rassemblement Sanders à Sioux City. (Salwan Georges / The Washington Post)
Ceux qui s’inquiètent pour Sanders n’ont pas fusionné autour d’une alternative claire, laissant le vote centriste éclaté parmi une poignée de candidats, dont chacun présente des vulnérabilités.
Certains électeurs s’inquiètent de l’âge et de l’acuité de l’ancien vice-président Joe Biden – il a 77 ans – tandis que d’autres craignent que l’ancien maire de South Bend, en Inde, Pete Buttigieg, 38 ans, n’ait pas été testé. Si le sénateur Amy Klobuchar (D-Minn.) Ou Mike Bloomberg, l’ancien maire de New York, gagne en force, cela pourrait encore plus embrouiller les esprits.
Pendant ce temps, Sanders a montré des signes de consolidation du soutien de l’aile libérale du parti aux dépens de la sénatrice Elizabeth Warren (D-Mass.). Et même les détracteurs de Sanders reconnaissent à contrecœur qu’il attire de grandes foules énergiques et apporte de nouveaux visages au parti Les républicains ont également observé avec prudence, craignant que Sanders ne fasse appel à une souche de l’électorat similaire au bloc qui a soutenu Trump il y a quatre ans.
« Une grande partie du parti était naïf envers les forces de Bernie et ne réalisait pas à quel point il était bien positionné jusqu’à la semaine dernière », a déclaré Dan Pfeiffer, ancien conseiller d’Obama. «Cela va très bien pour Bernie.»
Si Sanders remporte une forte victoire dans l’Iowa lundi, selon certains démocrates, la semaine avant la primaire du 11 février dans le New Hampshire pourrait devenir une fenêtre cruciale pour l’étouffer, bien que Sanders ait remporté le New Hampshire de manière décisive il y a quatre ans.
Les agents démocrates disent que les premiers efforts pour trouver les principaux donateurs pour un effort anti-Sanders ont été infructueux. Ceux qui ont eu de tels pourparlers disent qu’il était plus facile d’effrayer les donateurs sur la perspective d’une présidence Warren, car ils étaient plus enclins à croire qu’elle pourrait être élue et appliquer des politiques de grande envergure.
«Je n’ai entendu parler d’aucun groupe de personnes se regroupant pour dire:« Comment pouvons-nous arrêter Bernie? »A déclaré Pfeiffer. « Mais je suis certain que cela aurait l’effet inverse que celui envisagé. »
Les démocrates inquiets d’une scission cet automne entre les factions pro et anti-Sanders du parti, quel que soit le vainqueur, citent plusieurs épisodes récents.
Certains des meilleurs alliés de Sanders, par exemple, ont exprimé leur indignation cette semaine face à une liste de candidatures que Tom Perez, président du Comité national démocrate, envisage pour les comités lors du congrès du parti cet été.
« La DNC devrait avoir honte d’elle-même, car c’est vraiment une gifle pour les gens qui demandaient une réforme », a déclaré lundi Nina Turner, la coprésidente nationale de la campagne Sanders, dans une interview accordée à Status Coup . « Et si la DNC croit qu’elle va s’en tirer en 2020 avec ce qu’elle a fait en 2016, elle se trompe d’époque. »
Et lors d’un faux caucus organisé lundi soir à Des Moines, les partisans de Sanders sont sortis quand il est devenu clair qu’ils n’atteindraient pas le seuil de 15% nécessaire pour gagner des délégués, plutôt que de prêter leur force à un autre candidat. Pour certains critiques, cela suggère que les contributeurs de Sanders pourraient abandonner le parti si Sanders n’était pas le candidat.
Biden, en campagne mardi dans l’Iowa, s’inquiétait ouvertement de la façon dont les partisans de Sanders se comportaient et si ce n’était pas lui le candidat du parti.
« Vous ne pouvez pas faire ce genre de choses », a déclaré Biden, se référant au débrayage des partisans. « Ça va faire une différence. »
Lorsqu’on lui a demandé si le parti pouvait s’unir derrière Sanders s’il était le candidat, Biden s’est arrêté pendant plusieurs secondes.
« Nous le devons. Je ne vais pas porter de jugement maintenant », a-t-il déclaré. « Mais je pense juste que cela dépend de la façon dont nous nous le traitons entre maintenant et le moment où nous aurons un candidat. »
Pourtant, il a dit: «Je pense que oui, je pense que nous pouvons nous unir. Nous devons nous unir. »
Des partisans de Sanders écoutent lors d’un rassemblement au State Historical Museum de l’Iowa à Des Moines le 20 janvier (Salwan Georges / The Washington Post)
Mais beaucoup d’autres s’inquiètent de savoir si le parti pourra se réunir.
«Bien sûr, cela m’inquiète», a déclaré l’ancienne sénatrice Barbara Boxer (D-Californie) dans une interview. «C’est une question. Si nous voulons gagner, nous devrons nous unir. »
Ces préoccupations expliquent pourquoi les rivaux de Sanders ont largement évité de l’attaquer – ou de s’opposer les uns contre les autres. À mesure que les sondages lui donnaient de la force plusieurs de ses collègues candidats ont commencé à le critiquer plus directement au cours du week-end , mais la plupart des attaques sont restées indirectes.
Une vulnérabilité potentielle pour Sanders dans la primaire démocrate pourrait être les problèmes d’armes à feu, parce que le parti est de plus en plus uni autour du contrôle des armes à feu et Sanders a dévié de cette position dans le passé.
Le dossier de Sanders de soutenir certaines mesures en faveur des armes à feu, y compris la protection des fabricants contre toute responsabilité, est revenu à plusieurs reprises lors de la primaire de 2016. Mais même Biden – qui fait de la question une partie standard de son discours de sfond – l’a rarement soulevée cette fois-ci.
De même, un super PAC soutenant Biden – le genre de groupe nominalement indépendant qui est souvent utilisé pour lancer des attaques – n’a pas l’intention de critiquer Sanders, aet préfère diffuser des annonces louant la biographie et l’éligibilité de Biden.
Un effort coordonné pour diminuer Sanders pourrait se retourner de façon spectaculaire, a averti Steve Grossman, ancien président de DNC. Cela causerait des dommages importants « s’il apparaît d’une manière ou d’une autre qu’il y a une tentative de se mêler du processus », a déclaré Grossman, qui a approuvé Buttigieg.
« Les démocrates doivent attirer de nouveaux électeurs », a-t-il ajouté. «Ces électeurs – électeurs pour la première fois, électeurs activistes – réagiraient extraordinairement négativement et pourraient potentiellement s’éloigner du parti s’ils sentaient que les gens interféraient de manière inappropriée.»
Au-delà de cela, certains anciens du parti ont doucement ridiculisé l’idée que «l’establishment» pourrait monter un effort coordonné pour éliminer Sanders, même s’il le voulait.
« Quiconque pense que le Parti démocrate peut truquer n’importe quoi – se fait des illusions », a déclaré Joe Trippi, un consultant démocrate. «Les deux partis n’ont plus ce pouvoir. Si le Parti républicain avait pu arrêter Trump, il l’aurait fait. »
Pourtant, il a ajouté: «C’est une bonne rhétorique. Le part est-elle un bon drapeau? Pour la campagne Sanders, bien sûr. «
Élection 2020: ce qu’il faut savoir
Mise à jour 28 janvier 2020
Douze principaux candidats sont en course pour la nomination présidentielle démocrate, dont quatre sénateurs qui siègent également en tant que jurés dans le procès en destitution du président Trump . Le dernier sondage Washington Post-ABC News montre l’ancien vice-président Joe Biden et le sénateur Bernie Sanders (I-Vt.) Émergeant comme des leaders dans le domaine.
Matt Viser est un journaliste politique national pour le Washington Post. Il a rejoint le journal en octobre 2018. Il était auparavant chef adjoint du bureau de Washington pour le Boston Globe, où il a couvert le Congrès, les campagnes présidentielles en 2012 et 2016 et le mandat de John Kerry en tant que secrétaire d’État. Suivre
Annie Linskey est une journaliste politique nationale axée sur la campagne présidentielle de 2020 pour le Washington Post. Avant de rejoindre The Post, Linskey était le journaliste principal sur les démocrates pour le bureau de Washington du Boston Globe pendant la campagne de 2016. Elle a rendu compte de la Maison Blanche d’Obama pour Bloomberg News et BusinessWeek. Suivre
Un groupe de jeunes communistes a décidé d’éditer son propre matériel dans lequel il expose ses analyses,ici il s’agit de décrire le rôle de Blackrock, la multinationale financiarisée dans la destruction de notre système de protection sociale avec la complicité active de macron et de son gouvernement.
Mais ces jeunes-gens vont plus loin, ils interpellent la gauche et le parti communiste sur le rôle que doit jouer la souveraineté nationale dans la défense de la souveraineté populaire. C’est court, clair, précis.
Comme lepessimisme est un luxe que nous ne pouvons pas nous permettre, ce blog va être très attentif au point de vue des jeunes qui tentent de créer une issue politique.
voici la suite de ce que je vous décrivais à mon retour de Béziers , finement analysé par Daniel Schneidermann.Les mêmes qui gardent un pieux silence sur la manière dont les manifestants sont massacrés par les flics de Castaner dénoncent l’inadmissible « violence » des mêmes… C’est extraordinaire et surtout c’est une saisissante illustration de la nature de classe de l’Etat et de ses appareils « hégémoniques » (Gramsci), comment s’obtient le consensus, par le matraquage idéologique et si cela ne marche pas on passe au vrai matraquage (note de danielle Bleitrach)
Confession du jeudi : je ne suis pas un auditeur régulier des Grandes gueules de RMC. Horaires peu adaptés à mon rythme de matinaute, coupures pub à la mitrailleuse, rythme speed. Pas ma came. Depuis quelque temps, je voyais néanmoins buzzer des extraits des interventions d’un syndicaliste de Sud Rail, Anasse Kazib. Tiens tiens ! Inattendu, me disais-je. Mais après tout, dans une période de lutte sociale, il est normal qu’on entende sur le plateau la voix d’un travailleur en lutte.
C’est fini. Enfin, il est vraisemblable que c’est fini. Même si RMC, pour l’instant, ne le confirme pas, Anasse Kazib ne reviendra pas (voir notre enquête). Deux crimes lui sont imputés : il n’a pas condamné assez fort l’interruption par des grévistes d’une émission des GG à Béziers. Et il a participé, dans une délégation SNCF-RATP, à l’occupation du hall de la CFDT. Comme l’a dit le co-animateur Alain Marschall : « Pour moi, c’est motif d’exclusion. » Autrement dit, Kazib devait choisir : on ne peut pas gueuler à la fois « sur » RMC et dans la rue « contre » RMC. Le coup de gueule de plateau doit rester sur le plateau. La parole doit être déconnectée de tout acte, la bouche détachée du bras. Or, comme l’a résumé le jeune syndicaliste dans une formule qui témoigne d’une grande maturité sur les medias : « On ne peut pas être une grande gueule au micro et fermer sa gueule dans la vie ».
L’exclusion -probable- d’Anasse Kazib a le mérite de dessiner clairement les limites de l’expression des luttes sociales dans les medias dominants. De préférence, il n’y est admis que par l’intermédiaire de porte-paroles, d’intercesseurs, qui jouent souvent le rôle de punching balls. Quant à l’acteur des luttes lui-même, on veut bien dans le cercle enchanté des gueulards raisonnables le recevoir, bien entendu. On y est même, d’une certaine façon, obligé : question de crédibilité. Mais il sera bien avisé de ne pas être trop éloquent, ou plutôt, de se cantonner à l’éloquence assignée aux prolétaires, du type « coup de gueule » (le fameux « vous êtes un faux Gilet jaune », du directeur de Match Bruno Jeudy à Christophe Couderc, un Gilet jaune à l’argumentation trop articulée). On sait maintenant en outre qu’en cas d’affrontement entre ses camarades de lutte et son media, il devra mettre sa grande gueule au service dudit media. Autrement dit, il n’est toléré que traître. Merci pour la démonstration.
ces gens d’une société d’investissement qui s’obstinent à m’envoyer leurs conseils de placement de capitaux que je n’ai pas, conseils inspirés par la géopolitique,sont parfois bien réjouissants. A la seule réserve près que cette bande de salopards nocifs qu’ils dénoncent avec une véhémence que je partage volontiers, ne se contentent pas de limiter les possibilités d’investissement mais ils entraînent les pauvres soldats de la Grande arme dans la débâcle. Je vous fait partager quelquefois les dernières analyses souvent apocalyptiques de ces économistes indignés mais notez bien que c’est en général pour me proposer une « valeur refuge » qui échapperait aux mauvais coups de Trump et autres grands de ce monde qui sont leurs têtes de turc… je résume le propos: la guerre économique de Trump et celles de Macron, c’est la Bérezina…(note de Danielle Bleitrach)
La Chine et les Etats-Unis ont signé une trêve dans la guerre commerciale mercredi dernier. Presque. En quelque sorte.
CNBC :
« Certes, l’accord ne supprime pas les taxes douanières US existantes sur les importations chinoises, et laisse en suspens des questions sur la manière dont les termes de l’accord seront appliqués. L’accord est également considéré comme ‘fragile’ par certains analystes, selon qui des taxes supplémentaires pourraient encore être mises en place.«
Mais « presque » et « en quelque sorte » – plus 142 Mds$ supplémentaires de la part de la Réserve fédérale lundi et mardi derniers – c’est tout ce dont les investisseurs avaient besoin pour faire grimper le Dow Jones au-delà des 29 000 points.
Comme prévu, Le Donald n’est pas allé jusqu’à la guerre commerciale totale… il y avait trop en jeu – et notamment le plus important de tout : une élection.
Et comme attendu, après le bruit et la fureur, pas grand’chose ne change vraiment – sinon que l‘économie s’affaiblit et que le marigot (maintenant que les autorités gèrent le commerce en plus de tout le reste) se fait plus profond.
Retournement de situation
Selon les estimations de Moody’s Analytics en septembre 2019, le total des pertes d’emplois US dues à la guerre douanière se monte à 300 000. Et selon les conclusions d’un rapport de la Fed, la guerre commerciale s’est retournée contre ses instigateurs :
« Une caractéristique-clé de notre analyse est de comptabiliser les multiples façons dont les taxes douanières peuvent affecter le secteur manufacturier, notamment la protection des secteurs nationaux, l’augmentation des coûts pour les produits importés et les dommages à la compétitivité sur les marchés étrangers suite à des représailles douanières.
Il apparaît que les secteurs manufacturiers US plus exposés à une augmentation des taxes douanières subissent des réductions de l’emploi […]. Les hausses des taxes douanières sont également associées à des augmentations des prix à la production par le biais de la hausse des coûts d’intrants.«
Mais il faut le reconnaître : peu importe combien une idée est crétine, M. Trump s’y accroche comme un chien à un os….
La fin d’un empire
Un article du Wall Street Journal la semaine dernière indiquait que Trump envisageait encore des taxes douanières de 100% sur les vins et les produits de luxe français, en représailles contre le gouvernement Macron, qui menace de taxer de 3% les grandes sociétés d’e-commerce travaillant en France. (Ces menaces sont suspendues depuis hier, après une discussion entre Donald Trump et Emmanuel Macron.)
Un autre article encore nous dit que l’équipe Trump a menacé d’imposer une taxe douanière de 25% sur les automobiles européennes, histoire de punir l’Union européenne parce qu’elle fait commerce avec l’Iran.
En d’autres termes, les guerriers commerciaux US n’ont pas seulement pour objectif d’empêcher les Américains de faire affaire comme ils le souhaitent – mais aussi les Allemands et les Italiens.
Dans le même temps, Peter Navarro, l’économiste fêlé du président, affirme – là encore dans le Wall Street Journal – que les taxes douanières sont un excellent ajout à l’arsenal de petite brute assemblé par les Etats-Unis… et qu’elles ont besoin d’être « équitablement mises à l’épreuve » :
« L’économie reste solide, les salaires continuent de grimper et l’inflation reste modérée. Pourquoi les prévisionnistes pessimistes se sont-ils autant trompés ?«
Les Français ont dû poser la même question en 1812, lorsque les troupes de Napoléon sont arrivées à Moscou. Bonaparte tentait de gagner une guerre commerciale en forçant la Russie à cesser de faire affaire avec l’Angleterre. Et tout semblait aller si bien !
Nous ne prenons pas cela personnellement, ceci dit. Mais les problèmes ne débarquent pas exactement de l’avion de 16h15 en provenance de Montréal, cherchant quelqu’un qui tient à la main une pancarte « pessimiste ». Ils se glissent plutôt discrètement aux frontières.
Et les pessimistes ont toujours tort… jusqu’à ce qu’ils aient soudain raison.
La Grande armée a traversé le Niémen et envahi la Russie. Ses 400 000 soldats astiqués de frais ont défilé en bon ordre – jusqu’à Moscou.
Mais lorsque les survivants ont enfin traversé la Bérézina lors de leur retraite vers la France, ils n’étaient plus que 27 000 – frissonnants, affamés et mourant rapidement. L’empire napoléonien est mort avec eux.
Mais revenons-en à notre propre situation…
Prochain arrêt : Moscou
Hier, nous avons exploré les raisons pour lesquelles l’inflation est inévitable. Nous avons terminé en reprenant les économistes grand public et autres idiots qui pensent que la Fed a fait le bon choix le 17 septembre 2019.
A cette date, la Fed a traversé son propre Niémen, mettant fin à son programme de « normalisation » modérée, timide et hésitante… et envahissant les marchés avec près d’un demi-million de nouveaux dollars fraîchement équipés.
L’argent est allé sur le marché des repos, pour y financer les excès de dépenses du gouvernement fédéral américain.
Nous avons également constaté que les autorités vont devoir refinancer – « rouler » – 6 000 Mds$ de financement de court terme sur les six prochains mois.
Maintenant que les étrangers ne sont plus vraiment partants pour acheter des obligations d’Etat US, il n’y aucun moyen de financer honnêtement une telle somme. La Fed va devoir « imprimer » plus d’argent. Pour marquer le rythme, lundi et mardi dernier, elle a rajouté les 142 Mds$ mentionnés précédemment à la masse monétaire américaine.
Comme l’a expliqué Luke Gromen – cité dans la Chronique d’hier –, il n’y a pas d’autre choix acceptable. Si la Fed n’était pas montée au créneau quand elle l’a fait… la ligne de défense, clairsemée et affaiblie, aurait cédé.
Les actions se seraient alors effondrées. Le marché obligataire et l’économie mondiale se seraient désintégrés. Le secteur immobilier aurait été laminé. Cela aurait été comme en 2008, en d’autres termes – en bien pire.
Les investisseurs boursiers américains, par exemple, ont gagné quelque 20 000 Mds$ sur les 10 dernières années. Supprimez le soutien de la Fed, et la majeure partie de cet argent disparaîtrait en quelques minutes.
Une fois encore, les pessimistes prédisent un désastre… et votre correspondant en fait partie.
Ce témoignage d’un médecin qui est littéralement saisissant peut se résumer en cette phrase: « j’ai vu un homme qui n’était pas en état de participer à sa propre défense ». Non seulement cet homme n’est pas un criminel, mais un homme qui a voulu vous prévenir des crimes commis en notre nom, mais ses bourreaux, en notre nom, veulent le vider de sa substance (note de Danielle Bleitrach).
Rapport médical Prisonnier politique Julian Paul Assange
Par Barbara LAVALLEE, médecin WJJA
Je m’appelle Barbara LAVALLEE. Je suis citoyen français et médecin (initialement médecin urgentiste et exerçant désormais en médecine préventive), enregistré sous le N ° 56-3700 au Conseil national de l’Ordre des médecins (Conseil National de l’Ordre des Médecins).
J’ai assisté, en tant que membre du public et pour la première fois le 19 décembre 2019, à l’audience sur la gestion des affaires au Westminster Magistrate Court de Londres concernant la demande d’extradition des États-Unis de M. Julian Paul ASSANGE.
Je suis arrivé très tôt le matin en m’attendant à ce que la règle « Premier entré, premier servi » soit respectée. C’est grâce au respect de cette règle par le personnel judiciaire que j’ai pu témoigner aujourd’hui. Je regrette que mes collègues medicla présents ce jour-là aient été induits en erreur par leur inscription sur une liste, qui n’a aucune valeur juridique, et les ont ainsi empêchés d’entrer dans la salle d’audience.
Je témoigne en tant que citoyen et membre de l’association française des droits de l’homme WikiJustice Julian Assange.
Mes capacités et mon expérience en tant que médecin soutiennent mes observations.
M. ASSANGE n’est pas mon patient.
M. ASSANGE a envoyé un SOS à l’un des membres de l’association WikiJustice Julian Assange, au recto d’une de ses lettres.
Ce SOS, publié par WikiJustice Julian Assange le 16 septembre 2019 sur les réseaux sociaux, m’impose, comme à tous ceux qui en sont conscients, le devoir d’intervenir et de tout faire en mon pouvoir pour l’aider.
Le SOS était écrit en code Morse, au verso de la lettre, au-dessus du numéro du prisonnier (… — … qui signifie SOS).
Je suis arrivée à l’audience avec deux questions:
La santé de M. ASSANGE, ou du moins ce que je peux comprendre d’après sa présence à l’audience, lui permet-elle de se défendre, comme tout accusé devrait pouvoir le faire?
M. ASSANGE est-il victime de torture (telle que définie par l’ONU)?
Ma réponse à ces questions est la suivante:
1- Est-ce que l’état de santé de M. ASSANGE, du moins que je puisse comprendre en assistant à l’audience, lui permet de se défendre, comme tout prévenu devrait pouvoir le faire?
La santé de M. ASSANGE, ou plutôt la détérioration de sa santé, est depuis de nombreuses années une préoccupation majeure pour tous ceux qui s’intéressent à sa situation.
Il met en évidence une détérioration continue et inquiétante de la santé de M. ASSANGE depuis 2015, conduisant à une grave inquiétude de tous les médecins signataires.
Cette préoccupation est partagée par M. Nils MELZER, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il a déclaré le 1er novembre 2019: » À moins que le Royaume-Uni ne change de cap de toute urgence et améliore sa situation inhumaine, l’exposition continue de M. ASSANGE à l’arbitraire et aux abus pourrait bientôt lui coûter la vie « .
Des militants de la Julian Assange WikiJustice Association ont également fait part de leurs préoccupations après chaque audience à laquelle ils ont assisté.
Voici quelques extraits chronologiques:
« 21 octobre 2019: Julian ASSANGE comparaît en personne à Westminster Court. Il peut encore s’exprimer.
18 novembre 2019: Julian ASSANGE apparaît sur l’écran vidéo, il prononce son nom, avec difficulté.
13 décembre 2019: Julian ASSANGE apparaît sur l’écran vidéo, il n’est pas en mesure de dire son nom et sa date de naissance. Il finit par confirmer laborieusement son nom, que le juge a dû répéter.
19 décembre 2019: Julian ASSANGE apparaît sur l’écran vidéo. Il a du mal à se concentrer. »
En raison des communications répétées et alarmantes concernant l’état de santé de M. Julian ASSANGE, je suis venu à l’audience afin de mieux comprendre son état de santé.
Je me suis concentré, pendant la durée de la procédure, sur l’écran vidéo montrant M. ASSANGE. D’autres personnes présentes ont retranscrit le déroulement de l’audience.
Voici une transcription de mes notes de l’audience du 19 décembre 2019.
« Il est 10h00: l’audience commence.
L’écran du côté droit du court s’allume. Il y a 3 sièges et sur le mur le panneau « Salle d’audience 1 » et en dessous, HMP BELMARSH. La pièce est sombre mais les sièges sont éclairés. La lumière vient non seulement du dessus mais aussi de l’avant. Je me demande si Julian ASSANGE sera ébloui par la lumière. Apparemment non. Il y a cette petite fenêtre oblongue sur le mur gauche, qui semble être fumée, derrière laquelle on peut voir une silhouette.
« Officier » « Oui » « Monsieur ASSANGE SVP ». Le temps passe. Rien ne se passe.
On peut voir une silhouette passer derrière la vitre, une marche légèrement rebondissante, l’allure de Julian ASSANGE, je le reconnais (j’ai regardé de nombreuses vidéos et j’ai suivi avec beaucoup d’intérêt le travail et la carrière de Mr ASSANGE depuis de nombreuses années). Cette démarche est plus lourde et moins fluide que celle que je connais.
Il s’assoit sur la première chaise et n’est donc pas entièrement visible. La juge Vanessa BARAISTER lui demande de s’installer sur une autre chaise. Ses mouvements sont lents et délibérés. Je le vois enfin.
Il se positionne très prudemment sur sa chaise, se forgeant le dos contre le dossier. Son visage est marqué et il a l’air de 15 à 20 ans de plus que son âge réel. Ses cheveux sont clairement en recul. Son front est tapissé. Il porte un pantalon en flanelle grise, une chemise légère et un pull bleu ciel trop gros. Ses épaules tombent et il a l’air épuisé. Il porte ses lunettes et regarde par-dessus les jantes. Il semble assez bien présenté et son air et sa barbe sont courts.
La juge Vannessa BARAISTER lui demande s’il peut entendre; Il répond «Je pense que oui» puis «Correct» lorsque son nom et sa date de naissance sont indiqués. Il pose ses mains jointes sur ses genoux. Ses gestes et ses mots sont lents et difficiles.
Il regarde l’écran devant lui, je me demande s’il ne voit rien du tout. Il fait un effort, poussant discrètement la tête en avant comme s’il essayait de se concentrer. Il se rassoit sur sa chaise et croise sa jambe gauche sur sa droite.
Il semble de taille moyenne, mais avec la brièveté du loght, il est difficile de dire s’il a perdu du poids. Ses joues ne sont pas creuses et il n’a pas de cernes autour des yeux, mais il est impossible de distinguer les yeux eux-mêmes.
La juge Vanessa BARAISTER prononce les prochaines dates. Julian ASSANGE agite ses doigts, les mains serrées. Il bouge inconfortablement sur sa chaise, enlève ses lunettes et les replace sur le dessus de sa tête. Ses gestes sont maladroits, difficiles et imprécis.
M. FITZERALD parle de « la procédure en espagnol » puis des « gros problèmes pour voir M. Assange ».
Il est 10h10: Julian ASSANGE se penche en avant, son visage plus près de l’écran et pendant une ou deux minutes repose ses coudes sur ses cuisses et prend une posture plus concentrée. Puis Mme DOBBIN parle et il se rassoit dans son fauteuil, son attention une fois de plus absente. Je le vois respirer profondément et ses épaules s’affaissent un peu plus. Son visage est inexpressif, ses yeux sont morts, son énergie diminue clairement avec le temps. Il se tord les mains. Parfois, il ferme les yeux et sa tête tombe en avant avant de se redresser, comme s’il avait du mal à rester éveillé, à surmonter son épuisement, le besoin de sommeil écrasant.
L’audience se poursuit sans Julian ASSANGE. Le sien est loin. Ne pas suivre du tout la procédure. Il touche ses cheveux puis va remettre ses lunettes mais le mouvement est mal coordonné et abandonné. Son bras droit tombe sur sa cuisse droite.
10: 21: Une silhouette passe derrière le verre fumé.
10: 22: Julian ASSANGE se mord la joue.
10: 23: Mord encore ses joues et serre les poings pendant que les dates des futures audiences en janvier sont en discussion.
10: 25: Fermez les yeux.
10: 26: Se redresse, s’appuie sur l’accoudoir gauche, lui tord les mains et caresse ses lunettes.
10: 27: S’appuie sur l’accoudoir droit. M. FITZERALD parle. Quelque chose à propos de « grandes difficultés à voir M. Assange » puis « s’il vous plaît, ajoutez votre voix à notre préoccupation » se référant apparemment au juge BARAISTER.
10 h 30: lutte pour rester éveillé, pour garder les yeux ouverts et garder la tête droite. Aucune expression visible sur son visage.
Vient ensuite la pause.
Je regarde Julian ASSANGE. Il fait tout ce qui est en son pouvoir pour interrompre la procédure. Saisit quatre feuilles de papier, remet ses lunettes. Il tient le papier par le coin inférieur gauche avec sa main gauche et les laisse avec sa droite. Peut-être qu’il cherche quelque chose? En tout cas, il ne lit pas. Il les pose et se pousse vers l’arrière de son fauteuil, comme épuisé.
Il y a un carré dans le coin inférieur droit de l’écran vidéo qui, je pense, est ce que Julian ASSANGE voit de son point de vue dans la cabine. Seules la première rangée de la salle d’audience, le juge à son banc et le greffier du tribunal sont visibles. Est-ce contraire au protocole de rester là? Il serait possible de saluer Julian ASSANGE de là, même sans le son, de le prendre en considération, de lui apporter un contact humain. Mais personne ne tente ou peut-être même considère cela
10 h 40: la session reprend et l’écran vidéo de gauche est également allumé. Julian ASSANGE reste absent, assis là, immobile, apathique. Son seul geste est de remettre ses lunettes sur sa tête.
La négociation des dates reprend. Deux fois Julian ASSANGE grimace. Des grimaces pleines de douleur. Bien qu’ils soient éphémères, je parviens quand même à bien le regarder mais sans pouvoir identifier leur origine physique ou psychologique. Cela me rappelle les images vidéo de lui devant les tribunaux lorsqu’il a été momentanément aveuglé par le flash de la caméra du photograpger contre la fenêtre de la camionnette lors de sa comparution personnelle le 21 octobre 2019.
10 h 45: La juge Vanessa BARAISTER s’adresse à Julian ASSANGE. Il s’exprime difficilement, peine à articuler, trébuche sur ses mots. Je suis obligé de détourner le regard, gêné par sa détresse évidente.
Immédiatement après, un militant crie quelque chose au sujet d’une « pantomime » et l’audience qui allait se terminer de toute façon se termine dans une certaine confusion alors que la juge Vanessa BARAISTER sort et que la salle est évacuée.
J’ai fait de mon mieux pour décrire l’attitude de Julian ASSANGE lors de l’audience. Quelle analyse puis-je proposer?
J’ai vu un homme épuisé, incapable de se concentrer plus de quelques minutes.
Sa posture était statique, ses épaules tombantes, ses traits marqués. Le sien ressemblait à un homme aux cheveux fins.
Ses gestes sont peu nombreux, lents, peu sûrs, imprécis, parfois infructueux.
La plupart étaient des gestes automatiques, distraits et égocentriques (se gratter, toucher les cheveux, toucher un objet, les mains, les lunettes) qui peuvent avoir plusieurs significations:
Ils peuvent aider à rassurer, à donner un sentiment de confiance en soi.
Ils peuvent servir de stimulation pour aider à combattre l’épuisement ou la somnolence.
Ils peuvent également aider à lutter contre la fragmentation psychologique ou l’effondrement, ce qui entraînerait un effondrement physique conduisant finalement à la mort. Ressentir ses propres limites physiques afin de maintenir son sentiment d’identité.
J’ai vu un homme dont le visage était pour la plupart impassible, avec quelques grimaces fugaces évoquant la douleur ou la souffrance.
J’ai vu un homme dont le discours était laborieux, qui a marmonné sa seule vraie phrase, prononcé à la fin de l’audience.
J’ai vu un homme avec un retard idéomoteur, qui était apathique, faisant preuve de détachement non pas à cause de son apathie mais à cause du fait qu’il n’était pas en mesure de suivre la procédure.
J’ai vu un homme qui ne pouvait pas suivre ce qui se passait dans sa propre audition. Son problème de concentration signifiait qu’il ne pouvait pas maintenir son attention.
J’ai vu un homme qui n’était pas en mesure de participer à sa propre défense .
Il n’a pas pris de notes, n’est pas intervenu, n’a pris la parole que pour confirmer son identité et clore l’audience de ses propres mots, disant, d’après ce que j’ai pu décrypter, qu’il « a compris le programme ».
Certes, il a manipulé quelques feuilles de papier, surtout pendant la pause, mais dans quel but? Les at-il amenés lui-même? Étaient-ils là avant son arrivée? Étaient-ils liés à l’audience?
Il m’est impossible, en tant que spectateur, de répondre à cela.
Des militants ont déjà assisté à d’autres audiences d’extradition impliquant d’autres hommes et femmes. Plusieurs affaires sont entendues ces jours-là.
Certains accusés apparaissent libres, avec ou sans avocat. Certains d’entre eux apparaissent dans un lien vidéo.
Chacun s’exprime, participe, donne son avis. Se défend. Se bat pour son avenir.
Rien de ce genre n’a été observé dans le cas de M. ASSANGE.
Les proches de Julian ASSANGE le décrivent comme un homme à l’esprit vif et décisif. Un homme exigeant, engagé, déterminé, simple, aimant et plein d’esprit. Il suffit de regarder des vidéos de ses nombreuses conférences, son discours de Noël 2012 sur le balcon de l’ambassade équatorienne par exemple, pour le confirmer.
Ce n’était pas le même homme! J’ai vu un homme à peine l’ombre de son ancien moi.
Cependant, l’homme que j’ai vu semblait faire de son mieux pour rester présent.
Maintenir son identité, son humanité et sa dignité à tout moment .
Certains militants ont exprimé leur soulagement à la fin de l’audience: « Il avait l’air mieux que la semaine dernière. Il n’était pas aussi cassé que la dernière fois. Ses yeux étaient moins creux et il ne semblait pas avoir si froid ».
Mme Naomi COLVIN, qui a assisté à l’audience, a tweeté: « Voici mes notes. Julian #Assange a été attentif à cette audition, en suivant de près les choses. Il avait des papiers à la main et les feuilletait de temps en temps. Il portait des lunettes , une chemise et un pull violet. «
Ces éléments pourraient être compris dans un autre contexte, comme dans le cas d’une personne en fin de vie, où, à chaque visite, on cherche de petits signes de réconfort que les choses vont mieux. Qu’il y a eu une certaine amélioration, qu’il y a de l’espoir.
Mais la situation de M. Julian ASSANGE est très différente: M. ASSANGE est un prisonnier malgré sa peine, et qui, selon la loi britannique, aurait dû être libéré le 23 septembre 2019. Un homme qui reste emprisonné à l’isolement 22 ou 23 heures a jour, dans une prison de haute sécurité en attente d’une décision de justice sur une demande d’extradition émise par les USA, à la suite de quoi il risque jusqu’à 175 ans de prison voire la peine de mort.
Un homme que même ses avocats ont du mal à visiter.
Le système judiciaire et le système pénitentiaire sont donc responsables et responsables de sa santé.
Mon appréciation de la situation m’amène à conclure que M. Julian ASSANGE est dans une grande détresse. Sa santé est altérée. Sa vie est en danger.
Les conséquences médicales de l’isolement et du stress prolongé (au sens médical) sont bien connues:
D’un point de vue psychologique, on retrouve entre autres:
Troubles de l’humeur,
Apathie,
Retard psychomoteur,
Anxiété,
La dépression,
Confusion
Dépersonnalisation,
Problèmes d’identité,
Troubles psychotiques,
Trouble de stress post-traumatique,
Impossibilité de créer un système de pensée logique et cohérent …
À mon avis, en tant que témoin et professionnel de la santé, certains des éléments ci-dessus s’appliquent clairement à M. ASSANGE.
Des études récentes ont montré l’apparition de lésions cérébrales après 7 jours d’isolement, avec des effets à long terme pouvant durer plus de 10 ans ( 90 Ind. LJ 741 (2015)
E. BENNION: Banning the Bing: Why Extreme Solitary Confinement Is Cruel and Châtiment trop habituel).
D’un point de vue physiologique, en raison de l’augmentation chronique des hormones de réponse au stress, nous pouvons noter entre autres:
Effondrement du système immunitaire augmentant le risque d’infections graves,
Risque cardiovasculaire accru pouvant entraîner des troubles du rythme cardiaque, une pression artérielle élevée, un infarctus du myocarde.
Risque accru de cancer
Mort subite.
Seule une consultation médicale, menée conjointement par des médecins indépendants spécialisés en santé physique et mentale, permettrait d’établir un diagnostic, un pronostic, et de savoir si un traitement est administré à M. ASSANGE, modifiant ses facultés.
Donc à la première question: la santé de M. ASSANGE, ou du moins ce que je peux comprendre en assistant à l’audience, lui permet-elle de se défendre, comme tout accusé devrait pouvoir le faire?
La réponse est un NON très clair et catégorique.
Son affaiblissement de la concentration, son épuisement et son incapacité à suivre la procédure, et encore moins à y participer, devraient l’empêcher de poursuivre les audiences et la procédure d’extradition en raison de sa mauvaise santé, ce qui ne lui permettrait pas de se défendre.
Cette détérioration de l’état de santé invalide également son témoignage du 20 décembre 2019 dans l’enquête sur l’affaire d’espionnage de l’ambassade. Ce témoignage devra être réévalué ultérieurement, une fois sa santé rétablie.
M. Julian ASSANGE doit pouvoir bénéficier de soins appropriés, dans un environnement approprié (qui ne peut pas être une prison) et dans un pays non impliqué dans les procédures judiciaires complexes en cours, afin d’éviter tout risque de pression directe ou indirecte sur la soignants, une pression mentionnée dans la lettre de médecins4Assange déjà citée ci-dessus.
Le Royaume-Uni, les États-Unis d’Amérique, l’Équateur, l’Australie, la Suède et l’Espagne devraient être exclus des pays autorisés à recevoir et à prendre soin de M. ASSANGE.
2-Deuxième question: M. ASSANGE est-il victime de torture?
Quelles définitions faut-il donner au terme torture?
Au niveau universel:
La torture a été définie par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 et la Convention internationale des Nations Unies contre la torture du 10 décembre 1984 et est entrée en vigueur en 1987. Cette convention compte 169 États parties et 83 États signataires au 29 décembre 2019. Ils peuvent être consultés via le lien suivant:
Cette convention a également créé le Comité contre la torture, qui examine le respect par les États de la convention. Il peut également recevoir et examiner sous certaines conditions les communications individuelles ou étatiques concernant le non-respect de la Convention par un État membre.
La Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Adopté le 26 novembre 1987 par le Conseil de l’Europe et entré en vigueur en 1989. Il a été ratifié par les 47 Etats.
La Convention interaméricaine pour prévenir et punir la torture, adoptée le 9 décembre 1985 sous l’égide de l’OEA et entrée en vigueur le 28 février 1987. https://journals.openedition.org/revdh/962?lang=en
La torture est une violation majeure de la dignité humaine. Elle ne se réduit pas à la seule agression physique, elle est aussi et surtout un processus systématique de destruction de l’intégrité psychique, sociale et relationnelle d’un individu.
Article 1, paragraphe 1 de la Convention internationale des Nations Unies sur la torture:
« Aux fins de la présente Convention, le terme » torture « désigne
Tout acte par lequel une douleur ou une souffrance intense, physique ou mentale, est intentionnellement infligée à une personne
Aux fins, entre autres, d’obtenir des informations ou des aveux de sa part ou d’un tiers, de le punir pour un acte qu’il ou un tiers a commis ou est soupçonné de l’avoir commis, de l’intimider ou de le contraindre ou de contraindre un tiers, ou pour toute raison fondée sur une discrimination de toute nature,
Lorsqu’une telle douleur ou souffrance est infligée par ou à l’instigation ou avec le consentement ou l’acquiescement d’un agent public ou d’une autre personne agissant à titre officiel.
Ce terme ne s’étend pas à la douleur ou à la souffrance résultant uniquement, inhérentes ou accessoires aux sanctions légales. «
Cette définition impose l’existence de plusieurs conditions cumulatives. Elle est complétée par l’interdiction supplémentaire des traitements cruels, inhumains ou dégradants qui n’atteignent pas le seuil des souffrances aiguës nécessaires pour constituer une torture mais qui sont néanmoins commis par un agent public ou une autre personne agissant à titre officiel, à sa charge. instigation ou avec son consentement ou son acquiescement (art. 16).
La définition donne une interprétation large du statut du tortionnaire en tant qu’agent de l’État. En effet, les actes de torture restent couverts par la définition et imputables à l’État ou à son agent même s’ils ne sont pas directement commis par l’État mais se produisent « à son instigation ou avec son consentement ou son acquiescement ».
Un tel consentement tacite peut être présumé dans les cas où l’État ne respecte pas les autres obligations fondamentales de la Convention: enquêter sur ces actes, punir les auteurs et fournir des recours efficaces aux victimes.
En effet, en vertu de la Convention internationale contre la torture, les États s’engagent à former et à superviser leurs propres fonctionnaires impliqués dans les tâches de détention et d’interrogatoire, y compris les personnels civils, militaires et chargés de l’application des lois, le personnel médical, les agents publics et les autres personnes susceptibles d’être impliquées dans la détention, interrogatoire ou traitement de toute personne arrêtée, détenue ou emprisonnée de quelque manière que ce soit (art. 10).
Ils s’engagent à exercer un contrôle systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d’interrogatoire, ainsi que sur la garde des personnes privées de liberté sur leur territoire (art. 11). Ils s’engagent à mener des enquêtes rapides et impartiales chaque fois qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un acte de torture peut avoir été commis sur leur territoire (art. 12).
Les États s’engagent également à offrir des recours judiciaires efficaces aux personnes qui prétendent avoir été victimes de torture, ainsi qu’un droit à réparation pour ces personnes (art. 13 à 14). Enfin, ils s’engagent à ne pas utiliser comme preuves les déclarations obtenues sous la torture (art. 15).
La Convention contre la torture ne prévoit aucune dérogation à l’interdiction de la torture, même dans des circonstances exceptionnelles ou en cas de guerre (art. 2.2). Il interdit aux États de renvoyer, d’expulser ou d’extrader une personne vers un autre État où il existe des motifs sérieux de croire qu’elle risquerait d’être soumise à la torture (art. 3).
L’obéissance aux ordres d’un officier supérieur ou d’une autorité publique ne peut être invoquée pour justifier la participation à des actes de torture (art. 2.3).
Les États ont l’obligation de juger leurs propres agents impliqués dans de telles pratiques (art. 4). Ils s’engagent également à adopter des règles de droit national leur permettant de juger les auteurs étrangers de tels actes s’ils se trouvent sur leur territoire, quels que soient leur nationalité et le pays dans lequel la torture a été commise, mais également si la torture a été commise sur le territoire national , si la victime ou l’accusé est un ressortissant (art. 5). Il s’agit d’une application du principe de compétence ou compétence universelle, exceptionnellement utilisé au niveau international pour les délits les plus graves.
La limitation de la définition de la torture aux actes commis par des agents publics s’explique par la volonté de concentrer la répression internationale sur les actes pour lesquels la volonté nationale et la capacité de répression peuvent faire défaut. Les traitements cruels commis par des individus ou des groupes qui ne sont pas des agents de l’État ne sont pas couverts par la Convention internationale mais restent interdits et punis par le droit pénal national de chaque pays. En effet, il n’y a aucune raison de craindre que les autorités nationales tolèrent les actes commis par des acteurs privés étrangers à l’État.
La définition de la torture contenue dans la Convention interaméricaine ajoute une référence explicite à la torture mentale à la définition internationale.
Il définit cette dernière comme « l’application à toute personne de méthodes destinées à annuler la personnalité de la victime ou à diminuer sa capacité physique ou mentale, même si ces méthodes et procédures ne provoquent pas de douleur physique ni d’angoisse mentale ». Cette convention reprend les principales dispositions de la Convention internationale contre la torture. Il précise et adapte dans le cadre régional les obligations liées à l’extradition et le principe de compétence universelle, ainsi que celles garantissant une indemnisation adéquate des victimes (art. 9). Il ne crée pas de comité spécifique car la Cour interaméricaine et la Commission des droits de l’homme sont compétentes pour juger ces crimes de torture.
La Convention européenne pour la prévention de la torture complète l’interdiction de la torture contenue à l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
Ces deux textes ne donnent pas de définition de la torture. Ils prévoient cependant d’importants mécanismes de prévention et d’application. La Convention pour la prévention de la torture institue un Comité européen pour la prévention de la torture. Il dispose de pouvoirs étendus pour visiter et enquêter sur tous les lieux de détention des États membres. La Cour européenne des droits de l’homme est compétente pour recevoir et juger les plaintes concernant des actes de torture qui constituent des violations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
La torture est également interdite dans le cadre plus large des conventions internationales ou régionales des droits de l’homme et du droit humanitaire applicables dans les conflits armés:
Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (art. 5);
Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 (art. 7);
Convention européenne des droits de l’homme de 1950 (art. 3);
Convention interaméricaine des droits de l’homme de 1978 (art. 5);
Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 1981 (art. 5);
Conventions de Genève de 1949 (article commun 3);
Protocole additionnel I de 1977 aux Conventions de Genève (art. 75.2);
Protocole additionnel II de 1977 aux Conventions de Genève (art. 4.2);
Statut de la Cour pénale internationale (art. 7 et 8
Quel est le statut de M. Julian ASSANGE?
Il est essentiel à ce stade de rappeler que M. Julian ASSANGE est privé de liberté depuis le 7 décembre 2010, date de son incarcération à la prison de Londres Wandsworth suite à la délivrance par la Suède d’un mandat d’arrêt international pour enquête préliminaire dans une affaire de présumé viol (la Suède a définitivement abandonné les charges dans cette affaire le 19 novembre 2019).
Il a été libéré sous caution le 16 décembre 2010.
Il est privé de liberté depuis juin 2012; d’abord à l’ambassade de l’Équateur à Londres et depuis avril 2019 en prison, à l’isolement.
Il est donc isolé depuis de nombreuses années, dans un environnement clos, coupé, à toutes fins utiles, du monde extérieur.
M. Nils MELZER, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a déclaré le 31 mai 2019 après avoir rendu visite à M. Julian ASSANGE en prison qu’il « présente tous les symptômes de torture (…) auxquels il est exposée depuis plusieurs années « .
Le témoignage le plus récent est celui de M. Vaughan SMITH, via Twitter le 27 décembre 2019, qui a eu une conversation téléphonique avec M. ASSANGE le soir de Noël a écrit: « Julian Assange a appelé ma famille de prison le soir de Noël pendant que nous préparions le dîner S’il vous plaît, pensez à lui. Il a parlé à ma femme, Pranvera, et à nos filles – qui se sont souvenues de Noël avec lui en 2010, alors qu’il était notre invité sous caution. # Prisonniers politiques #
C’était la dernière fois que Julian avait un Noël en famille. Il a dit à ma femme et à moi qu’il mourait lentement à Belmarsh où, bien qu’en détention provisoire, il est placé en isolement pendant 23 heures par jour et souvent sous sédation. Son extradition vers les États-Unis commence en février … »
(1) Les restrictions ou sanctions disciplinaires ne peuvent en aucun cas être assimilées à des actes de torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En particulier, les pratiques suivantes sont interdites: a) l’isolement cellulaire pour une durée indéterminée; b) l’isolement cellulaire prolongé; c) placer un prisonnier dans une cellule sombre ou constamment éclairée; d) châtiments corporels ou réduction de l’alimentation ou de l’eau potable d’un détenu; e) punition collective.
2. Les instruments de contrainte ne doivent jamais être utilisés pour sanctionner des infractions disciplinaires.
3. Les sanctions disciplinaires ou les mesures restrictives ne devraient pas inclure l’interdiction des contacts avec la famille. Les moyens de contact avec la famille ne peuvent être limités que pour une période limitée et uniquement dans la mesure où ils sont strictement nécessaires au maintien de la sécurité et de l’ordre.
Règle 44
Aux fins du présent règlement, l’isolement cellulaire signifie la détention de prisonniers pendant 22 heures ou plus par jour sans contact humain significatif. L’isolement cellulaire prolongé signifie l’isolement cellulaire pour une période de plus de 15 jours consécutifs. »
1 L’isolement cellulaire ne doit être utilisé que dans des cas exceptionnels, en dernier recours, pour la durée la plus courte possible et sous réserve d’un contrôle indépendant, et uniquement avec l’autorisation d’une autorité compétente. Il ne devrait pas être imposé sous peine de prison.
2 L’imposition de l’isolement cellulaire devrait être interdite dans le cas des détenus handicapés mentaux ou physiques lorsque leur situation serait aggravée par de telles mesures. L’interdiction de l’isolement cellulaire et des mesures similaires dans les affaires impliquant des femmes et des enfants, comme le prévoient d’autres règles et normes des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale, continue de s’appliquer. «
Dans le cas de M. ASSANGE, les déclarations de ses proches et de M. Nils MELZER suggèrent que les « Règles Nelson Mandela » ne sont pas respectées .
Le « Protocole d’Istanbul » est un manuel d’ enquête efficace sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il contient des normes générales pour la recherche et la documentation des situations de torture ou d’autres violations des droits de l’homme.
Le « Protocole d’Istanbul » a été publié en 1999 à l’initiative de l’Union médicale de Turquie, de la Fondation des droits de l’homme de Turquie et de Médecins pour les droits de l’homme. Le texte a été élaboré sur trois ans par des médecins, des médecins légistes, des psychologues, des observateurs des droits de l’homme et des avocats. Au final, pas moins de 75 experts ont été impliqués, représentant plus de 40 organisations de 15 pays différents.
Ce protocole soumis par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a été adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies en août 1999 et le 4 décembre 2000 par la Commission des droits de l’homme (aujourd’hui: Conseil des droits de l’homme). Le protocole a également été reconnu « comme un moyen efficace et approprié de fournir des informations et de la documentation sur les allégations de torture » par l’Union européenne et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.
Voici des extraits du « Guide pratique du Protocole d’Istanbul pour les psychologues – Évaluation psychologique des allégations de torture »:
« Tous les types de torture incluent inévitablement des processus psychologiques (Kordon et al., 1988). La torture provoque souvent différents niveaux de symptômes psychologiques / psychiatriques.
Les méthodes de torture sont souvent conçues pour ne laisser aucun préjudice physique, et les méthodes physiques peuvent produire des symptômes physiques non durables ou inhabituels.
Des méthodes améliorées pour détecter et prouver la torture physique ont paradoxalement conduit à des méthodes de torture plus sophistiquées qui ne laissent aucune trace visible sur le corps de la victime (Jacobs, 2000). La plupart des symptômes et des signes physiques de torture qui peuvent être laissés pour compte disparaissent rapidement (Finn Somnier et al., 1992).
Les symptômes psychologiques sont généralement plus fréquents et plus durables que les symptômes physiques.
Contrairement à l’impact physique de la torture, les conséquences psychologiques prennent souvent plus de temps à guérir et sont plus problématiques que les handicaps physiques. Plusieurs aspects de l’état psychologique peuvent être affectés à long terme; si elles ne sont pas traitées, les victimes peuvent continuer à subir les conséquences psychologiques – plus ou moins graves – de la torture plusieurs mois ou années après l’événement, et parfois même à vie. (Voir § 159, § 161, §§ 260-261 du Protocole d’Istanbul).
La torture est un processus dynamique qui commence pendant la privation de liberté, implique une succession d’événements traumatisants qui peuvent se produire à différents moments et à différents endroits et se terminent par la libération ou la disparition de la victime (Somnier et al, 1992). Il peut parfois continuer ou se répéter. Cette cascade d’événements peut recommencer après un court intervalle, sans donner à la victime le temps de se remettre. La personne subit une perte totale de contrôle, un sentiment d’inévitabilité et est déconcertée par l’imprévisibilité du tortionnaire (Kira, 2002).
Ces sentiments peuvent s’accompagner d’un sentiment de confusion totale, d’impuissance et de perte de contrôle qui peut détruire la compréhension de soi, de tout système existentiel significatif et de la prévisibilité du monde (Fischer et Gurris, 1996; McFarlane, 1995).
La torture peut traumatiser la victime à différents niveaux (Fischer & Gurris, 1996; Gurr & Quiroga, 2001; Jacobs, 2000; Kira, 2002; Lira Kornfeld, 1995; Shapiro, 2003; Lira, 1995; Jacobs, 2000; Gurr & Quiroga, 2001; Summerfield, 1995):
Intégrité et entité physiques et psychologiques
Bien-être cognitif, émotionnel, comportemental et social
Personnalité
Identité
Autonomie
Réalisation de soi
Amour propre
Sentiment de sécurité et de survie
Rêves, espoirs et aspirations pour l’avenir
Système de croyance
Système de signification de soi et du monde
Attachement
Confiance
La torture détruit également le sentiment d’appartenance de la victime à une famille et à la société « .
Au vu des éléments ci-dessus, M. Julian ASSANGE est donc soumis à la torture comme l’a déclaré à plusieurs reprises M. Nils MELZER (31 mai et 1er-14 et 27 novembre 2019).
Les rapports d’experts et les diverses observations rapportées mettent en évidence son état de santé dégradé, nécessitant des soins immédiats, sûrs et appropriés.
Les experts médicaux doivent pouvoir le rencontrer pour évaluer sa santé et selon l’évaluation médicale, il doit recevoir des soins appropriés, si nécessaire hospitalisé ou libéré.
Dans l’intervalle, les procédures judiciaires en cours doivent être suspendues.
Lorsque nous nous habituons à l’intolérable, lorsque nous acceptons l’inacceptable, nous nous préparons à ce que nous croyons inévitable et nous pouvons perdre notre sens critique.
M. Julian ASSANGE a envoyé un SOS à l’un de ses partisans.
Ce SOS est publié et diffusé depuis septembre 2019.
Tous ceux qui restent inactifs sont pour le moins coupables de ne pas avoir aidé une personne en danger.
Tous ceux qui ont le pouvoir d’empêcher l’aggravation de son état, qui pourrait être fatal, (administration pénitentiaire, services de justice, États, avocats, experts, médecins, citoyens) seraient coupables d’homicide ou de complicité d’homicide s’ils n’agissaient pas immédiatement d’assurer sa sécurité et des soins médicaux adéquats.
Dr Barbara LAVALLEE
« Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente et des droits égaux et inaliénables de tous les membres de la famille humaine est le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Déclaration universelle des droits de l’homme, § 1 du préambule
« Considérant que le mépris et le mépris des droits de l’homme ont conduit à des actes barbares qui scandalisent la conscience de l’humanité et que l’avènement d’un monde dans lequel les êtres humains jouiront de la liberté d’expression et de croyance et de la peur et du besoin a été proclamé le plus haut aspiration de l’humanité « .
Déclaration universelle des droits de l’homme, § 2 du préambule
« Nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». Déclaration universelle des droits de l’homme, article 5.
La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée.