ces gens d’une société d’investissement qui s’obstinent à m’envoyer leurs conseils de placement de capitaux que je n’ai pas, conseils inspirés par la géopolitique,sont parfois bien réjouissants. A la seule réserve près que cette bande de salopards nocifs qu’ils dénoncent avec une véhémence que je partage volontiers, ne se contentent pas de limiter les possibilités d’investissement mais ils entraînent les pauvres soldats de la Grande arme dans la débâcle. Je vous fait partager quelquefois les dernières analyses souvent apocalyptiques de ces économistes indignés mais notez bien que c’est en général pour me proposer une « valeur refuge » qui échapperait aux mauvais coups de Trump et autres grands de ce monde qui sont leurs têtes de turc… je résume le propos: la guerre économique de Trump et celles de Macron, c’est la Bérezina…(note de Danielle Bleitrach)
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La Chine et les Etats-Unis ont signé une trêve dans la guerre commerciale mercredi dernier. Presque. En quelque sorte.
CNBC :
Mais « presque » et « en quelque sorte » – plus 142 Mds$ supplémentaires de la part de la Réserve fédérale lundi et mardi derniers – c’est tout ce dont les investisseurs avaient besoin pour faire grimper le Dow Jones au-delà des 29 000 points. Comme prévu, Le Donald n’est pas allé jusqu’à la guerre commerciale totale… il y avait trop en jeu – et notamment le plus important de tout : une élection. Et comme attendu, après le bruit et la fureur, pas grand’chose ne change vraiment – sinon que l‘économie s’affaiblit et que le marigot (maintenant que les autorités gèrent le commerce en plus de tout le reste) se fait plus profond. Retournement de situation Selon les estimations de Moody’s Analytics en septembre 2019, le total des pertes d’emplois US dues à la guerre douanière se monte à 300 000. Et selon les conclusions d’un rapport de la Fed, la guerre commerciale s’est retournée contre ses instigateurs :
Mais il faut le reconnaître : peu importe combien une idée est crétine, M. Trump s’y accroche comme un chien à un os…. La fin d’un empire Un article du Wall Street Journal la semaine dernière indiquait que Trump envisageait encore des taxes douanières de 100% sur les vins et les produits de luxe français, en représailles contre le gouvernement Macron, qui menace de taxer de 3% les grandes sociétés d’e-commerce travaillant en France. (Ces menaces sont suspendues depuis hier, après une discussion entre Donald Trump et Emmanuel Macron.) Un autre article encore nous dit que l’équipe Trump a menacé d’imposer une taxe douanière de 25% sur les automobiles européennes, histoire de punir l’Union européenne parce qu’elle fait commerce avec l’Iran. En d’autres termes, les guerriers commerciaux US n’ont pas seulement pour objectif d’empêcher les Américains de faire affaire comme ils le souhaitent – mais aussi les Allemands et les Italiens. Dans le même temps, Peter Navarro, l’économiste fêlé du président, affirme – là encore dans le Wall Street Journal – que les taxes douanières sont un excellent ajout à l’arsenal de petite brute assemblé par les Etats-Unis… et qu’elles ont besoin d’être « équitablement mises à l’épreuve » :
Les Français ont dû poser la même question en 1812, lorsque les troupes de Napoléon sont arrivées à Moscou. Bonaparte tentait de gagner une guerre commerciale en forçant la Russie à cesser de faire affaire avec l’Angleterre. Et tout semblait aller si bien ! Nous ne prenons pas cela personnellement, ceci dit. Mais les problèmes ne débarquent pas exactement de l’avion de 16h15 en provenance de Montréal, cherchant quelqu’un qui tient à la main une pancarte « pessimiste ». Ils se glissent plutôt discrètement aux frontières. Et les pessimistes ont toujours tort… jusqu’à ce qu’ils aient soudain raison. La Grande armée a traversé le Niémen et envahi la Russie. Ses 400 000 soldats astiqués de frais ont défilé en bon ordre – jusqu’à Moscou. Mais lorsque les survivants ont enfin traversé la Bérézina lors de leur retraite vers la France, ils n’étaient plus que 27 000 – frissonnants, affamés et mourant rapidement. L’empire napoléonien est mort avec eux. Mais revenons-en à notre propre situation… Prochain arrêt : Moscou Hier, nous avons exploré les raisons pour lesquelles l’inflation est inévitable. Nous avons terminé en reprenant les économistes grand public et autres idiots qui pensent que la Fed a fait le bon choix le 17 septembre 2019. A cette date, la Fed a traversé son propre Niémen, mettant fin à son programme de « normalisation » modérée, timide et hésitante… et envahissant les marchés avec près d’un demi-million de nouveaux dollars fraîchement équipés. L’argent est allé sur le marché des repos, pour y financer les excès de dépenses du gouvernement fédéral américain. Nous avons également constaté que les autorités vont devoir refinancer – « rouler » – 6 000 Mds$ de financement de court terme sur les six prochains mois. Maintenant que les étrangers ne sont plus vraiment partants pour acheter des obligations d’Etat US, il n’y aucun moyen de financer honnêtement une telle somme. La Fed va devoir « imprimer » plus d’argent. Pour marquer le rythme, lundi et mardi dernier, elle a rajouté les 142 Mds$ mentionnés précédemment à la masse monétaire américaine. Comme l’a expliqué Luke Gromen – cité dans la Chronique d’hier –, il n’y a pas d’autre choix acceptable. Si la Fed n’était pas montée au créneau quand elle l’a fait… la ligne de défense, clairsemée et affaiblie, aurait cédé. Les actions se seraient alors effondrées. Le marché obligataire et l’économie mondiale se seraient désintégrés. Le secteur immobilier aurait été laminé. Cela aurait été comme en 2008, en d’autres termes – en bien pire. Les investisseurs boursiers américains, par exemple, ont gagné quelque 20 000 Mds$ sur les 10 dernières années. Supprimez le soutien de la Fed, et la majeure partie de cet argent disparaîtrait en quelques minutes. Une fois encore, les pessimistes prédisent un désastre… et votre correspondant en fait partie. A Moscou ! |
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Guerre commerciale et représailles vu par un ultralibéral : c’est la Bérézina…
Dossier complet : Scandale BlackRock : lorsque la BCE fait appel à des gangsters
L’euro se prétend une monnaie sérieuse. En zone euro, la Banque Centrale Européenne (BCE) veille à sa crédibilité, à la stabilité des prix et à la solidité des institutions de crédit.
Début novembre 2018, au service de la BCE, l’Autorité Bancaire Européenne (ABE), une « autorité indépendante » qui surveille l’ensemble des banques européennes et qui rend des comptes au Parlement européen, a publié les résultats des test de résistance bancaire (« stress-test ») auxquels elle a soumis 48 banques de l’UE, ce qui représente 70 % des actifs bancaires de la zone euro.
Il s’agit de vérifier, à titre préventif, si une banque respecte le ratio de solvabilité qui lui est propre. Ce ratio mesure si les réserves de la banque (appelées fonds propres) sont suffisantes pour faire face aux chocs et aux imprévus (comme des clients qui ne remboursent pas leurs emprunts, ou encore des litiges perdus).
Comme la presse l’a claironné, à en croire les résultats pour 2018, malgré des disparités, toutes les banques ont en général consolidé leur robustesse. Ouf, on est sauvé ! Deutsche Bank, dont le passif dépasse la capitalisation boursière (l’actif), ne doit plus nous inquiéter ! Tout va très bien Mme la Marquise !
Et pourtant… Certaines banques, après avoir passé haut la main les stress tests, ont fini par sombrer, telles que les banques new-yorkaises Bear Stearns (2008) et Lehman Brothers (2008), la banque belgo-française Dexia (2014), ou Banco Popular (2016) en Espagne…
Au-delà d’une pratique de « bidouillage » tout court des résultats grâce au bidouillage des paramètres, se pose un problème beaucoup plus grave, celui des conflits d’intérêts manifestes entre les régulateurs régionaux et nationaux (Fed, BCE, banque centrale d’un pays donné) et des « sociétés de conseil » et de « stratégie », c’est-à-dire des entreprises privées à but lucratif et très souvent des émanations du monde financier.
Or, comme nous allons le documenter ici, depuis 2008, pour examiner la solidité des banques américaines et européennes, ainsi que pour évaluer leur solidité, les banques centrales font de plus en plus appel, non pas à des experts comptables de leurs propres services, mais à des « sociétés de conseil en investissement » (Alvarez et Marsal), à des « consultants en stratégie » (Oliver Wyman), ou pire encore, à des fonds de pension (PIMCO) ou des « gestionnaires d’actifs financiers » (BlackRock).
Il faut savoir que le fonds de pension californien PIMCO, racheté en 2000 par Allianz, est le plus grand investisseur sur le marché des obligations et gère quelque 2000 milliards de dollars d’actifs. Pour sa part, la société new-yorkaise BlackRock, est le premier gestionnaire d’actifs du monde, gérant environ 6300 milliards de dollars, presque le triple du PIB français !
Avec Vanguard et State Street, BlackRock fait partie des « Big Three ». Ensemble, ils sont le principal actionnaire de 90 % des entreprises du S&P 500, le principal indice boursier américain et, à eux trois, ils gèrent 14 000 milliards de dollars, soit plus que le PIB de la Chine !
BlackRock mène aussi le bal des Fonds indiciels cotés (Exchange Traded Funds, ETF), c’est-à-dire des paris financiers sur des indices boursiers. A travers sa société iShares, BlackRock « pèse » 803 milliards de dollars sur ce marché (39 %).
Ainsi, comme l’écrivait le 13 septembre 2018 Eric Albert dans Le Monde dans un article intitulé Dix ans après Lehmann Brothers, les nouveaux maîtres de Wall Street :
Le 15 septembre 2008, avec la faillite de Lehman Brothers, l’ère des grandes banques dominantes s’est terminée. Elle a été suivie par celle des gérants d’actifs.
Pour Daniela Gabor, une chercheuse à l’Université de l’Ouest de l’Angleterre citée par le journal :
Les banques restent importantes, bien sûr, mais la finance est de plus en plus organisée autour des gérants d’actifs. Autrefois, on comparait Goldman Sachs à une pieuvre vampire. Aujourd’hui, ce sont eux, les pieuvres vampires.
BlackRock, qui a détrôné Goldman Sachs comme N°1 de Wall Street, est sans doute l’institution financière la plus puissante au monde et celle qui est sortie gagnante des années de crise financière.
En vous servant, ils se servent
Il est donc parfaitement scandaleux, caricatural et inadmissible qu’en 2018, BlackRock est appelée à l’aide par la BCE pour vérifier la santé des banques européennes. Ces dernières sont sommées de livrer tous les secrets de leurs bilans, de leurs comptes et de leurs opérations à ce qu’il faut bien appeler la filiale d’un concurrent plus que potentiel.
Pour sa défense, l’Autorité bancaire européenne (ABE) affirme qu’elle se concentre sur les banques systémiques, et que la BCE (et donc BlackRock) s’occupe, elle, d’entités moins importantes… telles que les banques italiennes.
Ce n’est pas la première fois que la BCE demande conseil à BlackRock. En 2014, avant de renflouer à tout va les banques avec du crédit bon marché (le fameux « assouplissement quantitatif » ou « Quantitative Easing »), la BCE a demandé conseil aux « experts » de BlackRock. En d’autres termes, à la firme la plus intéressée par les actifs qu’elle avait l’intention d’acheter…
D’après le Financial Times, en 2014, Benoît Cœuré, membre du comité exécutif de la BCE, a rencontré les dirigeants de BlackRock quelques heures avant l’annonce de sa nouvelle politique monétaire. C’était un peu trop voyant. Pour éteindre toute polémique, la BCE s’est engagée à ériger de nouveaux principes afin de mieux encadrer les relations entre la banque centrale et le monde financier et éviter tout soupçon.
Le 3 novembre 2015, Mediapart écrivait :
Ce qui à l’époque ne paraissait être qu’un accident, se révèle à la lecture de l’enquête du Financial Times une pratique institutionnalisée : les responsables de la BCE ont rencontré des banquiers et des responsables de fonds avant toutes les décisions importantes, selon les journaux internes de la banque centrale auxquels le quotidien a eu accès.
Tout cela sans que cela semble soulever le moindre problème, la moindre question, tant la volonté de se conformer aux désirs du monde bancaire, de ne prendre personne par surprise l’emporte sur toute autre considération, tant la captation des institutions monétaires par le monde financier paraît chose admise.
Ainsi, deux membres de comité exécutif, Benoît Cœuré et Yves Mersch, ont rencontré des responsables d’UBS la veille de la réunion de la banque centrale où celle-ci décida de diminuer ses taux en septembre 2014. Benoît Cœuré rencontra des personnes de BNP Paribas le matin même.
De même, le vice-président de la BCE, Vitor Constacio, et le chef économiste, Peter Praet, eurent une rencontre avec le hedge fund Algebris le 23 juin, au moment où la crise grecque était à des sommets, où la banque centrale tenait des réunions quotidiennes pour décider si elle maintenait ou non ses financements d’urgence aux banques grecques.
Le lendemain, le chef économiste rencontrait à nouveau des responsables de BNP Paribas et du fonds PIMCO, un des plus importants fonds obligataires au monde, qui investit massivement dans les dettes souveraines. Dans un autre monde, ces pratiques s’appellent délits d’initiés, trafic d’influence voire soupçon de manipulations de cours.
Sauveur de la Fed et de Wall Street
La BCE n’a fait que sombrer dans l’inceste financier et l’impunité qui est devenu la règle dans le monde financier anglo-américain depuis l’abrogation du Glass-Steagall Act séparant de façon rigoureuse les banques de crédit des banques de marchés. Aux Etats-Unis, si banques et gouvernements s’accrochent depuis longtemps à BlackRock comme au Bon Dieu, c’est qu’il reste peu d’institutions financières solides.
En mars 2008, lorsque la banque Bear Stearns s’effondre, le patron de JP Morgan Chase, qui veut la racheter, appelle Larry Fink, le grand patron de BlackRock et lui demande un audit de la firme. Tout le week-end, cinquante analystes de BlackRock dissèquent alors le portefeuille de la banque. Le dimanche soir, c’est au tour de Timothy Geithner, alors patron de la Fed de New York, de l’appeler. Il lui demande de prendre en charge les 30 milliards de dollars de créances pourries dont JP Morgan ne veut pas. Fink refuse. Et lorsque Lehman Brothers plonge à son tour en septembre 2008, Fink, en voyage à Singapour, fait aussitôt demi-tour.
En décembre 2008, la Fed veut stabiliser la crise en émettant des titres adossés aux hypothèques immobilières (Mortgage Backed Securities – MBS). Dans l’urgence, elle fait appel aux spécialistes du marché : PIMCO, Goldman Sachs, Wellington et BlackRock. Cette dernière va également accompagner la Fed (qui par son statut n’est pas une banque nationale mais un syndic de banques privées) dans sa politique de renflouement tout azimut et sans condition des banques spéculatives en faillite mais trop grandes et trop connectées pour faire faillite.
C’est également à BlackRock que le gouvernement américain va confier la tâche épineuse d’évaluer les actifs « difficiles à estimer », en clair les actifs pourris, provenant du Trésor et de la Fed. Ou encore le contrôle du bilan des agences hypothécaires parapubliques, Fannie Mae et Freddie Mac.
Forte de cette expérience, BlackRock devient du jour au lendemain le partenaire stratégique incontournable de toute banque centrale s’engageant dans l’émission et l’achat de titres complexes et de mécanismes de sauvetage bancaire.
Reconnaissons que BlackRock Solutions possède une expertise inégalée dans le domaine de l’audit. Son arme secrète ? Un outil d’évaluation du risque baptisé poétiquement Aladdin, un cluster de 6000 serveurs de calcul haute performance surveillant en permanence près de 18 000 milliards de dollars, soit 8 % des actifs financiers mondiaux. Comme aucune autre, l’entreprise dispose d’outils ultraperformants permettant d’établir une cartographie fine de la vaste étendue des marchés financiers.
D’ailleurs, grâce à un système informatique ultrasophistiqué géré par une armée de mathématiciens, BlackRock, dans une co-entreprise avec Google, compte basculer une partie de ses investissements, jusque-là gérés par des analystes humains, vers une gestion exclusivement opérée par les algorithmes de sa plate-forme d’intelligence artificielle.
Embauchée par la BCE
En Europe, c’est en 2016, à l’instar de la Fed, que la BCE fait appel à BlackRock Solutions pour mener les stress tests des banques européennes. Début 2018, ce contrat a été prolongé. Bien qu’on ne sache pas combien la société va facturer pour 2018, Danièle Nouy, la Directrice du Conseil de surveillance de la BCE, a précisé que la fois précédente, c’est-à-dire en 2016, l’institution de Francfort avait déboursé 8,2 millions d’euros pour la prestation. Sur le plan financier, pour un géant comme BlackRock, c’est bien peu. « Travailler pour les banques centrales des Pays-Bas, de l’Espagne, de l’Irlande, de Chypre ou la Grèce apporte quelque chose de bien plus excitant que de l’argent : de l’information », précise Wolf Street, le site bien renseigné dirigé par l’ancien trader Wolf Richter.
En Europe, pour se prévaloir contre toute forme de « conflit d’intérêt » dans ses relations avec la BCE, le contrat signé avec BlackRock stipule qu’il doit exister une séparation réelle entre l’équipe travaillant pour la BCE et celle impliquée dans les opérations des titres ABS sur les marchés. En cas où cela ne suffit pas pour rassurer les inquiets, le contrat rajoute que « tous les audits extérieurs en lien avec la gestion de conflits d’intérêts seront transmis à la BCE », une institution très attachée à son « indépendance » et jusqu’ici pas vraiment exemplaire en termes de transparence ou de volonté de rendre des comptes, comme le dénoncent régulièrement les ONG.
Il est certain que grâce aux contrats obtenus par BlackRock Solutions, sa maison mère BlackRock accède inévitablement à de l’information sensible lui permettant de faire des décisions stratégiques très profitables. Au nom de ses clients, BlackRock détient des paquets d’actions dans de très nombreuses, sinon dans l’ensemble, des banques que sa « branche conseil » aide à auditionner…
En vérité, peu d’acteurs du marché disposent d’une connaissance aussi précise de l’état réel des bilans des banques européennes. Ce conflit d’intérêt a été mis à jour pour la première fois par le sénateur américain Charles E. Grassley en 2009 lorsque BlackRock donnait un coup de main à la Fed pour lancer son programme d’assouplissement quantitatif et les sauvetages de Bear Stearns, AIG et Citigroup.
« Ils ont accès à de l’information lorsque la Fed va tenter de vendre des titres et à quel prix. Et ils cultivent des relations financières très développées avec des gens partout dans le monde », disait Grassley. « Le potentiel d’un conflit d’intérêt est grand et c’est compliqué à réguler ».
BlackRock a toujours dit qu’elle gère avec grand soin les conflits d’intérêt potentiels grâce à une « Muraille de Chine » qui sépare son activité de conseil de l’activité de gestion d’actifs. Une promesse qui, évidemment, n’engage que ceux qui veulent bien y croire.
En réalité, la BCE n’a aucun pouvoir sur cette société. L’argument de BlackRock est simple : nous n’opérons pas par effet de levier ; nous n’agissons pas comme les banques, donc nous n’avons pas besoin d’être régulés comme une institution systémique. Alors qu’il s’agit du plus grand gestionnaire d’actifs du monde, « de fait, BlackRock passe sous tous les radars. Ils peuvent être régulés pour des raisons dites microprudentielles, pour protéger leurs clients, mais pas en tant qu’institution financière en vue de garantir une stabilité financière globale, », souligne la professeure de macroéconomie à l’Université de l’ouest de l’Angleterre (UWE) à Bristol, Daniela Gabor.
BlackRock Solutions, dans son rapport annuel de 2006 se félicitait déjà de ses « liens intimes entre activités d’investissement et non-investissement », comme « un moteur important de notre succès à long terme ». Sa communication commerciale souligne que l’entreprise possède « une culture BlackRock unifiée valorisant, au-delà des fonctions, les partenariats, les communications, la transparence, des standards cohérents et le travail d’équipe ».
Entrer en politique
Tout comme la banque d’affaires new-yorkaise Goldman Sachs qui s’est offert les services de l’Irlandais Peter Sutherland, du Belge Karel Van Miert, du Portugais Manuel Barroso, des Italiens Mario Monti et Mario Draghi et des Grecs Lucas Papademos et Petros Christodoufou, BlackRock a jeté son dévolu sur l’Europe et dépense sans compter pour recruter des figures politiques de haut niveau, disposants de carnets d’adresses bien fournis :
- En Allemagne, c’est Friedrich Merz, l’ancien chef du CDU au Parlement, le parti d’Angela Merkel et un des candidats à sa succession, qui gère actuellement la filiale allemande.
- En Suisse, c’est Philippe Hildebrand, l’ancien patron de la Banque Nationale Suisse, qui a été recruté.
- Au Royaume-Uni, l’ancien patron du Trésor britannique George Osborne a rejoint la firme, tout comme Rupert Harrison, le chef de cabinet du ministre anglais en charge des retraites. « Compte tenu de son expérience dans la mise en place de la récente réforme des retraites au Royaume-Uni, il jouit d’une position unique pour nous aider à développer notre offre aux retraités », a déclaré sans ambages la firme dans un communiqué.
- En Italie, Larry Fink s’est entretenu avec Mattéo Renzi en 2014.
- Aux Pays-Bas, Fink fréquente le Premier ministre Mark Rutte.
- En Grèce, BlackRock a opté pour Paschalis Bouchoris, l’ex-responsable d’un programme gouvernemental de privatisation.
- En France, son président s’appelle Jean-François Cirelli, ancien conseiller économique de Jacques Chirac, puis directeur de cabinet adjoint de Jean-Pierre Raffarin. Cet énarque a dirigé GDF à partir de 2004 en menant le groupe vers la privatisation. Puis, lors des dernières élections présidentielles, il a rejoint le comité de campagne d’Alain Juppé, tout comme l’actuel Premier ministre Edouard Philippe. Après l’annonce de BlackRock de vouloir transférer son siège européen de Londres vers Paris pour cause de Brexit, notre Premier ministre se félicitait vivement du fait que « la France attire. Les investisseurs reviennent. Paris est devenue, pour la première fois depuis très longtemps, la ville européenne la plus attractive ».
Jean-François Cirelli est également membre du « comité Action publique 2022 », créé par Edouard Philippe pour réfléchir aux services publics de demain. Quand on lui demande la nature de sa contribution, il répond : « Je réfléchis sur deux points. 1) Que faut-il faire pour que Pôle emploi réponde encore mieux aux évolutions de l’emploi et permette de mieux orienter les chômeurs. 2) Est-ce que les cotisations Agirc Arrco [retraites complémentaires des salariés] devraient être prélevées par l’Urssaf qui en collecte déjà plus de 400 milliards plutôt que de laisser l’Agirc Arrco les collecter eux-mêmes. » Puis, il ajoute : « Et je vous le confirme, il n’y a rien de BlackRock là-dedans. D’ailleurs, j’ai fait exprès de prendre des sujets sans conflits d’intérêts… » Chapeau l’artiste !
Ajoutons à cela que lorsque Bernard Monot, à l’époque conseiller de la candidate présidentielle Marine Le Pen, annonçait qu’il avait entamé des discussions avec les marchés pour les convaincre que MLP comptait payer jusqu’au dernier centime de la dette française, il s’agissait, comme Bernard Monot (depuis lors passé chez NDA) le confirme sur son propre site, de représentants de trois firmes : BlackRock, Barclays et UBS…
Macron, candidat de BlackRock ?
Dans cet entretien d’avril 2017 à la télévision suisse, on peut voir l’ancien président de la banque nationale suisse, Philippe Hildebrand, aujourd’hui vice-président de BlackRock, une entreprise privé qui en principe ne se mêle jamais de politique, afficher sa préférence pour le candidat Emmanuel Macron.
A peine quatre mois plus tard, le 30 octobre 2017, Le Monde rapportait une réception organisée à l’Elysée pour les grands investisseurs de la planète, dont, évidemment, Larry Fink de BlackRock :
Les agapes avaient été inscrites à l’agenda du président de la République à la date du mercredi 25 octobre : ’20 h 30, dîner avec des investisseurs internationaux.’ Ce soir-là, Emmanuel Macron a reçu en son palais vingt et un dirigeants des plus grands fonds d’Europe, des Etats-Unis, du Moyen-Orient et d’Asie, déroulant un tapis rouge sous leurs pieds et, sous leurs yeux, les réalisations de ses cinq premiers mois à l’Elysée. Ces financiers aux poches profondes ont retrouvé leur amphitryon dans le jardin d’hiver, ravis de rencontrer un jeune président ’so business friendly !’.
Le ’château’ n’a pas dévoilé leurs noms, comme si Macron voulait éviter d’accréditer un peu plus l’image de ’président des riches’ qui lui colle désormais à la peau. Tout juste a-t-on appris cette information exprimée dans un sabir de la plus belle eau technocratique : ’Ces investisseurs jugent que la France est plutôt sous-pondérée dans leurs portefeuilles d’actifs ; ils veulent surpondérer.’ En bon français, y investir davantage. Le lendemain, une porte-parole de BlackRock, le premier gestionnaire d’actifs au monde avec 5 000 milliards de dollars (4 306 milliards d’euros), a dit une chose qui a dû aller droit au cœur du chef de l’Etat : ’Les opportunités en France n’ont jamais été aussi fortes depuis vingt ans.’
Les festivités avaient démarré bien avant comme le relate Odile Benyahia-Kouider pour le Canard Enchaîné :
Arrivée à 12h30, la délégation conduite par Larry Fink, a été gratifiée d’un ’déjeuner introductif’ avec Edouard Philippe à l’Hôtel Matignon, suivi en dessert, d’un topo de Muriel Pénicaud sur ’l’évolution du marché du travail’.
A 14h45, tout ce petit monde a été transféré, sous ’escorte officielle’ au palais de l’Elysée. Recruté par BlackRock, l’ex-ministre britannique George Osborne a régalé l’assistance de ses ’réflexions géopolitiques’ et ’perspectives de marché’, avant que les officiels français se pressent dans le salon Murat pour des exposés de 45 minutes.
La procession a débuté avec le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, qui a livré ’sa vision’ de l’économie française et l’agenda des réformes. La ministre des transports, Elisabeth Borne, s’est ensuite exprimée sur ’l’investissement dans les transports et les infrastructures’. Après quoi Benjamin Griveaux, a exposé les ’opportunités en France pour les investisseurs globaux’. Le tout s’est achevé par la fameuse réception officielle, en présence d’Emmanuel Macron, flanqué de Bruno Le Maire et de Benjamin Griveaux. Quelle bringue ce fut…
Le plus amusant, c’est que lesdits ministres, se sont bien gardés d’inscrire ces rendez-vous à leurs agendas officiels respectifs. Sans doute étaient-ils un peu gênés aux entournures. Pourtant un concours de révérences au Château, quoi de plus naturel ?
Et à Marianne d’ajouter :
A l’heure où l’Etat s’apprête à privatiser quelques fleurons, l’enjeu était à l’évidence d’obtenir quelques milliards d’investissement de la part de BlackRock et ses confrères. Espérons que les révérences en ont valu la chandelle.
A Bruxelles
Entre novembre 2014 et mars 2018, BlackRock a sollicité à 33 reprises – et obtenu – une rencontre avec des membres de la Commission européenne de Bruxelles. D’après une source au Parlement européen, cité par Mediapart, BlackRock organise également des « journées d’information » à destination des assistants parlementaires, « pour leur expliquer le fonctionnement d’un produit (…) Au bout du compte, ces assistants parlementaires sauront conseiller les députés au mieux… », précise la source.
Par exemple, attentif à une réforme française de l’épargne-retraite en sa faveur, dont les contours ont été distillés par le ministre Bruno Le Maire, BlackRock peut déjà compter sur le zèle du commissaire européen à la stabilité financière Valdis Dombrovskis. Ce Letton est à l’origine du produit paneuropéen d’épargne-retraite individuelle (PEPP), une nouvelle catégorie de produits d’épargne-retraite privé annoncée pour cette année au sein de l’UE et actuellement en phase d’expérimentation auprès des salariés chercheurs, du privé comme du public. Fondé sur le volontariat, le programme s’appelle RESAVER… et c’est à BlackRock que Valdis Dombrovskis a confié la tâche de gérer le test.
Séparer les banques, non merci !
La professeure Daniela Gabor a suivi les débats bruxellois sur la régulation de la finance dès 2013, quand le commissaire européen au marché intérieur Michel Barnier promettait de renforcer les règles du système financier, y compris avec une séparation entre banques de dépôts et banques d’affaires comme le recommandait le Rapport Likaanen.
Or, à l’époque, « le commissaire britannique voulait que la commission travaille main dans la main avec les financiers et à chaque fois qu’un débat, qu’une audition était organisée, les gens de BlackRock étaient là », se souvient l’universitaire qui conclut :
J’ai alors compris que ce n’étaient plus les banques qui avaient le pouvoir mais les gestionnaires d’actifs. On nous répète souvent qu’un gestionnaire est là pour placer notre argent, pour nos vieux jours… mais c’est bien plus que ça, poursuit-elle. Selon moi, BlackRock reflète le renoncement de l’Etat-providence. Sa montée en puissance va de pair avec des changements structurels en cours : des changements dans la finance mais aussi dans la nature du contrat social qui unit le citoyen et l’Etat.
Le lobbying agressif de l’entreprise a fait naître la crainte chez certains que les experts de la maison s’accaparent des politiques publiques. Y compris certains investisseurs de BlackRock qui se sont montrés réservés et l’année dernière, c’est presqu’un cinquième des actionnaires qui a soutenu une proposition demandant un accès au décompte exact des dépenses en lobbying.
Mais le mal est fait. « Rien que la taille de BlackRock lui donne une puissance de marché qu’aucun Etat ne peut contrôler », affirme le député libéral allemand Michael Theurer. Il est bien placé pour le constater car, en tant qu’eurodéputé, il a été en charge de dossiers impliquant la firme.
« Tant que BlackRock continue à payer d’énormes dividendes à ses actionnaires, y compris de nombreux gouvernements, des fonds souverains et des banques centrales, sa mainmise sur les marchés n’aura pas tendance à diminuer », constate Wolf Street.
Faire du cash jusqu’au crash ?
Rappelons qu’entre 2000 et 2010, les groupes du CAC 40 distribuaient en moyenne de 30 % à 40 % de leurs profits annuels sous formes de dividendes. Depuis, ce taux fluctue plutôt entre 45 % et 60 %.
Et depuis 2009, les salaires des PDG du CAC 40 ont augmenté environ deux fois plus vite que la moyenne de ceux travaillant pour l’entreprise. Ils gagnent à présent 119 fois plus que la moyenne de leurs salariés. La part de leur rémunération directement liée au cours de la Bourse atteint désormais 54,5 %, ce qui les encourage à aligner leurs intérêts sur ceux des actionnaires et à privilégier les choix de court terme visant à maximiser leur rémunération. Tout se passe comme si les actionnaires avaient pris le pouvoir au détriment des autres acteurs de l’entreprise, en s’appuyant sur des dirigeants chargés de « créer de la valeur » avant tout pour les propriétaires du capital, et payés en conséquence.
Comme le dit Patrick Artus :
Dès lors que ces actionnaires trouvent légitime d’encaisser un rendement de 13 % ou 15 % quand le coût de l’argent est à 2 %, il n’est guère d’autre solution pour un dirigeant que de faire feu de tout bois, de s’endetter sans mesure, d’étrangler les salariés, les fournisseurs, les partenaires de toutes sortes, d’émettre du CO2 sans payer, de brûler les ressources naturelles sans considération pour les dégâts occasionnés, et aussi d’organiser régulièrement de lucratives opérations de rachat d’actions.
La mauvaise conscience de Larry Fink
Cet article ne serait pas complet sans mentionner la fameuse lettre annuelle de Larry Fink, le grand patron de BlackRock, adressée en 2017 aux patrons du monde. L’homme y fait preuve d’une mauvaise conscience visionnaire et d’une compréhension rudimentaire des limites du système prédateur qu’il a accouché. C’est en particulier le dernier paragraphe que nous présentons ci-dessous qui fait forcément penser à la grogne sociale que connaît la France.
Extraits :
Les Etats n’ont plus la capacité, la vision et les moyens de changer le monde, ni même de vraiment assurer le long terme et l’intérêt général. C’est donc aux entreprises de le faire ou d’y contribuer plus efficacement. Éventuellement à leur côté.
Les entreprises sont soumises au diktat du profit trimestriel. C’est une folie qui doit cesser, car elle ne fait que des victimes sur le long terme. Une entreprise doit faire du profit en étant meilleure et non en tuant son propre avenir. Ses salariés. La planète.
L’écart de richesse que le système aboutit à créer est la meilleure recette pour une explosion sociale à terme et l’appauvrissement des peuples, qui se transforment en une anxiété majeure face à l’avenir et donc trouvera une traduction politique dans le type de leader qu’ils mettront au pouvoir.
Il faut déterminer ou revoir les indicateurs qui font la valeur d’une entreprise, en intégrant sa contribution à faire une société plus juste, servir un objectif plus large que la simple création et augmentation du profit. Lui donner un sens.
Investir dans des boards [conseils d’administrations] faisant plus de place à la diversité [femmes, gens de couleur, LGBT, etc.], afin d’accroître la vision, le champ, la perspective des entreprises.
Interrogée le 12 décembre dans l’Opinion sur l’impact du phénomène des Gilets jaunes sur l’attractivité de la France et les réponses de Macron, Isabelle Mateos y Lago, la directrice générale du BlackRock Investment Institute, le centre d’analyses de BlackRock, a déclaré :
Paris avait mené un travail extraordinaire de rétablissement de son attractivité. L’opinion des investisseurs internationaux ne s’est pas retournée, mais il y a eu quelques froncements de sourcils, des interrogations pour savoir si les réformes mises en place allaient être détricotées. Si le conflit cesse, l’image de la France sera préservée. S’il perdure, ce n’est pas certain. La bonne nouvelle, c’est que rien dans les annonces d’Emmanuel Macron ne nuit à la compétitivité des entreprises. A court terme, on peut même anticiper un impact positif sur la consommation.
Vite, le retour de l’Etat
Comme nous avons tenté de le démontrer ici, le cas de BlackRock révèle de façon caricaturale la culture d’impunité et de « conflit d’intérêt » permanent qui a fini par saper et en dernière analyse détruire tout ce qui nous a permis en France, grâce à la mise en œuvre, dans l’après-guerre, du programme élaboré par le Conseil national de la Résistance (CNR), de réduire les injustices et d’avoir des infrastructures physiques (énergie, eau, transport, etc.) et humaines (santé, éducation, recherche, etc.) de grande qualité.
Pour mettre un terme à cette dérive tragique, imposer des séparations strictes et patrimoniales entre banques de dépôts, assurances, sociétés d’audit, agences de notation et banques d’affaires, n’est qu’un début.
En vérité, le moment est venu pour les Etats-nations de remonter sur la scène de l’histoire pour redevenir un contre-pouvoir au service de l’intérêt général face à des dinosaures féodaux de la finance.
Pour cela, plus que jamais, l’Etat doit reprendre le contrôle du crédit et de la monnaie. Le statut actuel de la Caisse des Dépôts et des Consignations (CDC), menacé par la loi PACTE que le Sénat doit valider à la fin du mois de janvier, doit être sanctuarisé et défendu.
Et pour rétablir notre souveraineté monétaire, c’est d’une Banque de France renationalisée et mise sous contrôle citoyen que nous avons besoin !
BlackRock, le fonds de pension américain patron du Cac 40
Voilà le titre d’un article de Ouest-France du 22 septembre 2016 :
Qui est le premier actionnaire de Total, d’Air Liquide, Valeo, Vinci, Unibail ? BlackRock. Il ne s’agit pas d’un groupe de death metal mais du plus gros gestionnaire d’actifs mondial, une firme new-yorkaise qui investit à tout va et à long terme pour pouvoir faire fructifier au mieux l’épargne des retraités américains.
BlackRock possède aujourd’hui des participations significatives dans 18 des 40 sociétés du CAC40, l’indice des valeurs phares de la Bourse de Paris comme AXA, Sanofi, Safran, la Société Générale, BNP Paribas, Schneider Electric, Michelin, Vivendi, Accor Hotels ou Lafarge Holcim.
Sa pratique déroute un peu les dirigeants français habitués à régler les affaires en tête à tête : chez BlackStone, ce n’est pas le patron, Larry Fink, qui prend les décisions d’investissement, mais les multiples gérants des services inférieurs qui veillent surtout à la rentabilité de leurs prises de risque et à suivre les règles maison : participation à toutes les assemblées générales et une certaine sévérité envers les arrangements entre administrateurs.
Larry Fink était à l’origine un financier de haut vol de la banque First Boston et l’un des initiateurs du marché de la titrisation (le fait d’échanger des titres basés sur des créances hypothécaires) à la fin des années 1970. Après avoir fait gagner un milliard de dollars à First Boston, il en avait perdu 100 millions en 1986 à cause d’une mauvaise prévision sur les taux d’intérêt. D’où sa décision de quitter First Boston en 1988 pour fonder un gestionnaire d’actifs spécialisé en matière de risques, BlackRock.
Lancé par le Blackstone Group (un très important gestionnaire d’actifs non boursiers), BlackRock prend son indépendance dès 1994 et ne tarde pas à grossir, ce qui lui permet d’intégrer les services similaires d’importants acteurs de la finance comme Merrill Lynch en 2006 ou Barclays en 2009. Aujourd’hui, BlackRock est le premier gestionnaire d’actifs mondial avec 12000 employés et 4900 milliards de dollars [passés à 6300 en 2017] d’actifs gérés (dont 150 en France et 35 dans les entreprises du CAC40).
L’inégalité met le système social français en danger
Tout à fait d’accord sur cette analyse, la vraie question est qui peut lutter contre cette tendance, aucun des partis qui ont été au pouvoir depuis l’ère Mitterrand qui a été le déclencheur en France de la dite tendance.. Seul un parti communiste qui retrouvera ses fondamentaux et ne se vivra pas dans un rafistolage permanent de la gauche plurielle,une subordination acceptée parce qu’on ne croit plus au socialisme et n’ose pas le défendre (ce qui est le cas actuellement) peut impulser un changement profond. Sans ce parti là, il n’y aura pas de gauche mais des gens prêts à nous installer des Macron sur ordre du grand patronat, des soutiens d’une UE belliciste, néo-libérale, anticommuniste et proche de fait des fascistes des syndicats vendus au patronat comme la CFDT, tout cela perdurera et avec cette situation l’abstention, l’extrême droite. La seule question est de savoir s’il est possible qu’un véritable parti communiste colonne vertébrale du changement réel pourra enfin apparaître? Un projet de société contre un autre projet de société, pas les petits arrangements , pas l’éternel constat mais le Que faire? … (note de danielle Bleitrach)
En France, le modèle social est aussi « en danger », selon l’ONG, « car notre fiscalité repose de manière croissante sur des impôts régressifs comme la TVA et la CSG, des impôts qui pèsent proportionnellement plus sur les citoyen.ne.s les plus pauvres ». A l »inverse, l’impôt sur les sociétés est en baisse de 23 % depuis 20 ans.
Oxfam dénonce clairement les mesures fiscales prises par le gouvernement de M. Macron : « L’instauration de la flat tax et la suppression de l’ISF [impôt de solidarité sur la fortune] ont accentué cette tendance en diminuant de nouveau la participation des plus riches à notre système de redistribution ». D’après un rapport du Sénat, le top 100 des contribuables qui payaient l’ISF a gagné en moyenne 1,7 millions d’euros chacun grâce à ces mesures, sans impact visible sur l’investissement, qui était pourtant la justification de la réforme.
L’ONG en tacle au passage le projet de réforme des retraites, qui « pourrait pénaliser les carrières hachées qui concernent le plus souvent des femmes ». « Les grand.e.s gagnant.e.s de notre système actuel de retraite sont les plus riches puisqu’ils profitent en moyenne plus longtemps de leur retraite par répartition, avec une espérance de vie de treize ans supérieure à celle des plus pauvres, indique le rapport. Au lieu de les mettre plus à contribution, le projet de réforme actuel prévoit de baisser leurs cotisations au-delà de 10.000 euros de rémunération par mois. »
Pour Pauline Leclère porte-parole d’Oxfam France, « les inégalités indécentes sont au cœur de fractures et de conflits sociaux partout dans le monde car personne n’est dupe : la crise des inégalités traduit la complicité plus que l’impuissance des États à agir pour la combattre. Les inégalités ne sont pas une fatalité, elles sont le résultat de politiques sociales et fiscales qui réduisent la participation des plus riches – entreprises et particuliers – à l’effort de solidarité par l’impôt, et fragilisent le financement des services publics. Transports, éducation, santé, système de retraites…. sont sacrifiés alors qu’ils sont décisifs pour lutter contre la pauvreté. »
Pour lutter contre les inégalités, Oxfam recommande de :
Reconnaître le travail de soin peu ou non rémunéré effectué principalement par les filles et les femmes comme une forme de travail ou de production apportant une vraie valeur.
Rétablir une fiscalité plus équitable sur les plus aisé.e.s n, supprimer les niches fiscales qui bénéficient disproportionnément aux grandes entreprises sans bénéfice pour l’économie et lutter efficacement contre l’évasion fiscale.
Les milliardaires détiennent plus d’argent que 60% de l’humanité selon Oxfam
pendant que l’on invite les communistes à se battre la coulpe sur leur pseudos-crimes, ceux qui ont largement profité de la liquidation de leurs véritables opposants prospèrent à un point inimaginable, ils ont même réussi à convaincre une large part de la population que c’était par leur travail qu’ils accumulaient tant de richesses. Pourtant ça laisse rêveur que si à 8000 euros par jour depuis le 14 jullet 1789, on n’en serait encore à 1% de la fortune actuelle de Bernard Arnault. Que ces gens là aient réussi à nous convaincre de leur droit à une telle accumulation repose sur le dévoiement de l’analyse marxiste, la fin de l’analyse en terme de classe sociale au profit d’un sociétal qui ne gêne personne… Après avoir abattu l’URSS, ce qui était pour eux « un air de liberté » flottant sur la planète, ces gens là ont imposé partout leur petit personnel y compris à la tête des partis communistes et des syndicats. On en aurait fait autant à leur place (note de danielle Bleitrach)

Bernard Arnault, le patron de LVMH, lors de l’inauguration d’une usine Louis Vuitton à Alvarado (Texas), aux Etats-Unis, le 17 octobre 2019. –
Nicholas Kamm / AFP
« Le fossé entre riches et pauvres ne peut être résolu sans des politiques délibérées de lutte contre les inégalités. Les gouvernements doivent s’assurer que les entreprises et les riches paient leur juste part d’impôts » affirme Amitabh Behar, responsable d’Oxfam en Inde, et qui représentera l’ONG cette année au Forum de Davos, cité dans un communiqué.
Le rapport annuel d’Oxfam sur les inégalités mondiales est traditionnellement publié juste avant l’ouverture, mardi, du 50e World Economic Forum (WEF) à Davos, en Suisse, rendez-vous traditionnel de l’élite économique et politique du globe, et après une année 2019 marqué par de grands mouvements de contestation sociale du Chili au Moyen-Orient, en passant par la France.
« Les inégalités indécentes sont au cœur de fractures et de conflits sociaux partout dans le monde (…) Elles ne sont pas une fatalité (mais) le résultat de politiques (…) qui réduisent la participation des plus riches à l’effort de solidarité par l’impôt, et fragilisent le financement des services publics« , insiste de son côté Pauline Leclère, porte-parole d’Oxfam France.
Selon les chiffres de l’ONG, dont la méthodologie s’appuie sur les données publiée par la revue Forbes et la banque Crédit suisse mais reste contestée par certains économistes, 2 153 personnes disposent désormais de plus d’argent que les 4,6 milliards les plus pauvres de la planète.
Par ailleurs, la fortune des 1% les plus riches du monde « _correspond à plus du double des richesses cumulée_s » des 6,9 milliards les moins riches, soit 92% de la population du globe, une concentration qui « dépasse l’entendement », détaille le rapport.
La Banque mondiale, avait estimé en 2018, que près de la moitié de la population mondiale vivrait avec moins de 5,50 dollars par jour.
Les hommes détiennent 50% de richesse de plus que les femmes
« Les femmes sont en première ligne des inégalités à cause d’un système économique qui les discrimine et les cantonne dans les métiers les plus précaires et les moins rémunérés, à commencer par le secteur du soin« , insiste Pauline Leclère.
Selon les calculs d’Oxfam, 42% des femmes dans le monde ne peuvent avoir un travail rémunéré « en raison d’une charge trop importante du travail de soin qu’on leur fait porter dans le cadre privé/familial« , contre seulement 6% des hommes.
L’ONG ajoute également que la richesse des 22 hommes les plus fortunés du monde est supérieure à celle de l’ensemble de la population féminine d’Afrique.
En France, sept milliardaires possèdent plus que les 30% les plus pauvres
Les 10% les plus riches des Français concentrent la moitié des richesses du pays, relève par ailleurs Oxfam.
Par exemple la fortune du Français le plus riche, Bernard Arnault est évaluée à 116 milliards de dollars, soit plus de 104 milliards d’euros, selon le classement en temps réel de Forbes. Le patron de LVMH serait même en ce début d’année l’homme le plus riche de la planète, détrônant ainsi l’Américain Jeff Bezos, le dirigeant d’Amazon.
A titre de comparaison, Oxfam s’est livré à un petit calcul. L’ONG indique ainsi « que si quelqu’un avait pu économiser l’équivalent de 8 000 euros, par jour depuis la prise de la Bastille, il n’arriverait aujourd’hui qu’à 1 % de la fortune de Bernard Arnault« .
Enfin, l’Hexagone compte actuellement 41 milliardaires, soit quatre fois plus qu’après la crise financière de 2008. La richesse cumulée de ces derniers représente 329,9 milliards de dollars ( plus de 296 milliards d’euros), soit cinq fois plus qu’après la crise financière.
Le gouvernement chinois se prépare à célébrer la fin de la pauvreté en 2020
La Chine a sauvé plus de 850 millions de personnes de la pauvreté depuis le début des réformes économiques en 1978, selon la Banque mondiale. C’est plus que l’ensemble de la population d’Amérique latine et cela est la donnée essentielle qui explique l’évolution mondiale. L’article porte sur le défi lancé en 2015, la Chine qui jusqu’ici a rempli tous ses objectifs aura résorbé toute la misère de sa population. Il ne s’agit même pas des taux de la banque mondiale à 1,90 dollar par jour mais à 5,50. Cet article brésilien permet de concrétiser ce que dit Xi Jinping sur le fait pour le parti communiste chinois qui dirige la République populaire de Chine de ne jamais oublier le but réel du parti (note et traduction de Danielle Bleitrach).
Publié le 10/01/2020

Faire des prédictions est certes une tâche risquée. Mais dans ce cas, il est possible d’oser: d’ici 2020, la Chine prétend mettre fin à la pauvreté dans le pays, elle atteindra alors l’objectif adopté en 2015. Même si certains questionnent les critères et les données, le chemin du pays vers une « société modérément prospère » est spectaculaire, c’est le but chinois du moment.
La Chine a sauvé plus de 850 millions de personnes de la pauvreté depuis le début des réformes économiques en 1978, selon la Banque mondiale. C’est plus que l’ensemble de la population d’Amérique latine.
En plus de suivre le seuil de pauvreté international (1,90 $ par jour et par personne), la Banque mondiale a commencé en 2017 à mesurer le revenu dans deux autres fourchettes – jusqu’à 3,20 $ et jusqu’à 5 $,50.
La Chine comptait 10 millions de personnes sous le seuil de pauvreté international en 2015, selon la Banque. Coïncidence, le Brésil (en 2017) avait également ses 10 millions d’habitants vivant avec 1,90 $ par jour. La différence est qu’en Chine ce nombre correspond à 0,7% de la population et au Brésil, 4,8%.
Le défi pour la Chine a été de faire progresser 373 millions de personnes vivant avec 5,50 $ par jour (2015). C’est beaucoup, mais les progrès sont indéniables: en 1981, 98,3% de la population chinoise vivait avec moins que cela, et en 2015, 27,2%.
Le monde est fier des progrès accomplis dans la lutte contre la pauvreté, l’ONU a annoncé la réussite de l’objectif du Millénaire pour le développement dans ce domaine. Mais les données globales masquent le fait qu’il s’agit d’un phénomène principalement chinois. La Chine représente à elle seule plus de 70% de la réduction de la pauvreté dans le monde depuis les années 80.
La croissance économique était le grand remède anti-pauvreté en Chine. Deng Xiaoping s’est fixé pour objectif de quadrupler, d’ici 2000, le PIB chinois et le PIB par habitant de la Chine en 1980. Comme l’a dit l’économiste, Deng s’est avéré d’une exactitude spectaculaire. En 1995, le PIB avait quadruplé en termes réels, et en 1997, le PIB par habitant également. De nouveaux objectifs de croissance ont été annoncés et atteints. La croissance n’explique pas tout, mais sans elle, il n’y a pas d’espoir.
La croissance n’est pas non plus exempte de problèmes: la dégradation de l’environnement, les inégalités et la corruption sont des effets secondaires que le pays a aujourd’hui du mal à combattre. La Chine parle de plus en plus de la qualité plutôt que de la vitesse de croissance – d’autant plus qu’il est impossible de maintenir les taux antérieurs.
Le gouvernement chinois adopte un critère différent pour mesurer la pauvreté, qui s’avère plus strict que la norme internationale. Selon le gouvernement, fin 2018, il y avait encore 16,6 millions de personnes dans cette condition (plus de 10 millions par le dirigeant de la Banque mondiale en 2015). Certains experts estiment que pour lever la dernière vague de pauvreté, la Chine devrait croître d’au moins 6,2% en 2019 et 2020, ce qui pourrait être trop ambitieux dans les circonstances actuelles.
En 2019, la lutte contre la pauvreté a valu le prix Nobel d’économie à trois universitaires du sujet. À l’époque, la presse chinoise a publié un article qui disait alors que la Chine méritait vraiment le Nobel – parce que cela était devenu une réalité dans la pratique. Certes, le monde n’est pas disposé à encenser tout ce que le gouvernement chinois considère comme une réussite, mais dans la lutte contre la pauvreté, la Chine est probablement imbattable. À la fin de 2020, vous pouvez l’écrire, il y aura des célébrations. En plus de lutter contre la pauvreté, l’annonce de l’atteinte des objectifs est une spécialité locale.
Publié à l’origine dans Folha de S.Paulo
L’Allemagne se prépare à l’arrivée d’une pauvreté de masse
Retraites : Les bas salaires progressent fortement en Allemagne. Plus d’un retraité sur cinq vivra sous le seuil de pauvreté dans 20 ans… Cet article de la Tribune de Genève nous montre que partout le néo-libéralisme, cette phase du capitalisme où profitant de la chute de l’URSS, dans le cadre d’une contre-révolution qui a débuté au Chili, a été mise en place une véritable paupérisation d’une masse grandissante d’individus, précarisation, pression sur les salaires. C’est pour cela qu’effectivement une réforme des retraites est nécessaire mais pas dans le sens des gouvernements qui ne font qu’aggraver le problème comme on le voit en France qui était le pays qui avait le mieux résisté. Cette paupérisation est partiellement masquée au niveau des statistiques mondiales par la lutte contre la pauvreté en Chine, mais elle ne fait que grandir et atteint désormais les pays développés. La réponse de l’UE comme celle des USA est double: premièrement faire encore plus pression sur les travailleurs pour nourrir le cancer financier, comme on le voit avec le cas des retraites et ce qui va avec engendrer la guerre sous prétexte de lutter contre un terrorisme qui est la créature de l’impérialisme (note de Danielle Bleitrach).
«Les retraités sont de plus en plus nombreux à venir chez nous», déplore la directrice de la soupe populaire de Berlin.
Malgré la pauvreté qui augmente chez les personnes âgées, l’Allemagne n’a toujours pas engagé une réforme de fond de son système de retraite par répartition. Plus les années passent, plus le nombre de retraités qui vivent dans la précarité progresse. Selon le dernier rapport de l’Institut de conjoncture à Berlin (DIW), plus d’un retraité sur cinq (21,6%) vivra sous le seuil de pauvreté dans vingt ans, contre 16% aujourd’hui.
Ces chiffres sont d’autant plus alarmants qu’ils sont calculés avec l’hypothèse d’une économie évoluant «positivement». «Le fond du problème n’a pas été réglé», constate Johannes Geyer, l’auteur de l’étude. «Les ajustements, comme une meilleure prise en compte du congé maternité ou la retraite à 63 ans à partir de quarante-cinq ans de cotisations, n’apportent rien de significatif sur le fond. Ce ne sont que des réformes cosmétiques», poursuit l’expert du DIW.
Glaner pour survivre
«Les retraités glanent aujourd’hui des bouteilles consignées pour arrondir leurs fins de mois. Ils n’ont plus honte», déplore Sabine Werth, directrice de la soupe populaire de Berlin. «Le développement du secteur des bas salaires décidé par le gouvernement social-démocrate de Gerhard Schröder (ndlr: dans les années 2000) a été une catastrophe. Les retraités sont de plus en plus nombreux à venir chez nous», insiste la bénévole.
Selon le DIW, l’Allemagne compte 6,5 millions de contrats en «minijob», qui permettent une dispense partielle des cotisations sociales. Or, 4,5 millions de ces derniers sont considérés comme l’emploi principal des gens concernés, et non pas, comme le voulait l’idée de départ, un job d’appoint. «Tous ces gens seront dans des situations de précarité quand ils arriveront à la retraite», prévient Sabine Werth.
«Les retraités d’aujourd’hui ont également une biographie complètement différente de leurs aînés. Ils n’ont pas accumulé autant de trimestres – ou points – parce que le marché du travail s’est transformé. Ils comptent plus de périodes de rupture (chômage, formation, etc.) et ont moins cotisé», ajoute Johannes Geyer.
La grande coalition d’Angela Merkel, une alliance entre conservateurs (CSU/CDU) et sociaux-démocrates (SPD), a tenté une réforme des retraites pour anticiper cette pauvreté de masse. L’objectif est la stabilisation d’ici à 2045 du niveau des pensions à 46% des revenus nets (contre 48% aujourd’hui) et un financement des déficits par l’impôt (4,5 milliards d’euros à partir de 2030 et 8 milliards en 2040). L’âge légal de la retraite va passer progressivement de 65 à 67 ans. Cette réforme a prévu aussi des cotisations retraites obligatoires pour les travailleurs indépendants.
En 2018, 100 actifs en Allemagne finançaient les retraites de 31 personnes de plus de 67 ans. Avec l’arrivée des «baby-boomers» (pic de natalité de la fin des années 60), ce sera en 2038 pratiquement deux actifs pour un retraité (100 pour 47).
Cotisations trop faibles
L’introduction en 2015 du salaire minimum (8 euros 50 de l’heure) n’a pas réglé le problème. Les cotisations restent trop faibles. «Il faudrait être payé au moins 14 euros de l’heure. Un tiers de la population active est en dessous de ce barème», remarque Ulrich Schneider, président de l’Union des associations caritatives d’Allemagne.
Pour freiner les effets pervers du système, le gouvernement prépare un projet de loi sur une retraite minimum accordée à ceux qui ont cotisé au moins trente-cinq ans. «Mais elle concernera surtout les classes moyennes. Elle ne permettra pas de lutter contre la pauvreté. Ceux qui n’ont pas cotisé cette durée resteront à l’aide sociale, qui est très faible, comme les chômeurs de longue durée, les travailleurs indépendants, qui n’ont pas d’obligation de cotiser, et les étrangers qui sont arrivés tard dans le pays», poursuit l’expert.
Le phénomène devrait s’amplifier avec l’arrivée à l’âge de la retraite des chômeurs de longue durée est-allemands qui n’ont jamais retrouvé de travail après la réunification. «Aucune catégorie de la population n’est autant concernée par la précarité», estime Ulrich Schneider. «Avec eux, la pauvreté des retraités va exploser dans les vingt prochaines années», ajoute-t-il. C’est également la conclusion du rapport du DIW.
Créé: 22.09.2019, 19h15
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L’addiction américaine au commerce des armes – Par William Hartung
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De quoi la Légion d’honneur du patron de BlackRock France est-elle le symbole ?
Ce 1er janvier, Jean-François Cirelli, patron de BlackRock France [BlackRock est le premier gestionnaire d’actifs au monde, ndlr], a été promu au rang d’officier de la Légion d’honneur par Edouard Philippe. Alors que BlackRock est accusé de faire du lobbying pour que la France passe au système de retraite par capitalisation, que vous inspire cette décision ?
Monique Pinçon-Charlot – Cette promotion au rang d’officier de la Légion d’honneur de Jean-François Cirelli confirme la camaraderie de classe et l’entre-soi oligarchique qui existe de fait. Alors que nous sommes dans une phase particulièrement difficile du point de vue des rapports de classe, cette reconnaissance symbolique à travers la Légion d’honneur – qui n’a pas d’autre valeur que symbolique – est une façon sidérante, cynique et insupportable, d’ajouter de la violence à la violence.
Matignon estime que “ce qui prévaut, c’est le parcours de M. Cirelli au service de l’Etat depuis 35 ans”…
Ce personnage est pourtant emblématique des oligarques prédateurs, c’est-à-dire qui pillent l’Etat par tous les bouts, en étant au cœur de celui-ci. Jean-François Cirelli a commencé sa carrière à la direction du Trésor, au ministère de l’Economie et des Finances. Puis il est passé au cœur de la finance en devenant administrateur suppléant pour la France au Fonds Monétaire International (FMI) pendant deux ans.
Ensuite, il est devenu secrétaire général du Club de Paris pendant trois ans, à Bercy. Le Club de Paris est un groupe informel de créanciers publics et privés, qui se retrouvent à Bercy, afin de négocier les restructurations des dettes des pays les plus pauvres. A chaque fois, pour avoir des nouveaux prêts, ils conviennent de politiques d’ajustements structurels. Enfin, en tant que délégué général de GDF Suez, il a mené à bien sa privatisation. C’est caractéristique de ce que Laurent Mauduit décrit dans son livre, La Caste. Qu’il ait obtenu cette promotion est donc parfaitement logique : c’est le coup symbolique qu’il faut asséner aux grévistes, à ceux qui tentent de lutter, de faire valoir leur droit à cette retraite basée sur la solidarité et la répartition.
>> A lire aussi : Monique Pinçon-Charlot : “Macron est monté d’un cran dans la violence de classe”
La secrétaire d’Etat Agnès Pannier-Runacher a défendu que BlackRock ne faisait pas de lobbying car “il n’a pas grand-chose à gagner” dans la réforme des retraites. Le gouvernement accuse pour sa part ceux qui défendent cette thèse de “complotisme”. Qu’en pensez-vous ?
Rien ne m’étonne. A bout d’arguments, les deux mots mobilisés contre nous sont systématiquement “complotisme” et “populisme”. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’en effet, notre travail d’ethnologues et d’entrisme pendant plus de trente-cinq ans dans la haute bourgeoisie nous rend légitimes pour affirmer que cette classe sociale est en permanence dans un entre-soi, qui se décline sous toutes les formes possibles et imaginables.
Le lobbying en est une, les conseils d’administration, les beaux quartiers, les cercles, les rallies pour jeunes, etc., en sont d’autres. La nébuleuse institutionnelle de mobilisation de cette classe à l’échelle mondiale est absolument sidérante. Si ça, ce n’est pas un complot, qu’est-ce que c’est ? Ils retournent ce terme en nous accusant de complotisme, c’est le propre de la manipulation. Le second mot qu’ils utilisent pour nous stigmatiser, c’est populisme. Ce faisant, ils stigmatisent en fait la colère des grévistes et des salariés, qui est immense dans le pays.
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Par ailleurs, dans la liste des décorés du 1er janvier, Jean-François Cirelli n’est pas le seul représentant de la finance…
En effet. La stratégie de cette classe a toujours été de masquer la forêt, pour qu’on ne voie que des arbres. En l’occurrence, on nous donne en pâture Jean-François Cirelli, mais dans la même promotion, il y a plusieurs représentants de la finance et du monde de l’assurance. Antoine Flamarion, cofondateur de Tikehau Capital, a été fait Chevalier de la Légion d’honneur, de même que Jean-David Chamboredon qui est patron du fonds d’investissement ISAI, fondé en 2008 par Geoffroy Roux de Bézieux (le président du MEDEF depuis 2018, ndlr), ou encore Karima Silvent, DRH du groupe d’assurance Axa.
Le patron d’Axa, Thomas Buberl, a pour sa part été promu à la dernière promotion du 14 juillet… Les réseaux sociaux se braquent sur Cirelli à juste titre car il est exemplaire : il est responsable de BlackRock pour la France, la Belgique et le Luxembourg, qui est le plus grand paradis fiscal. C’est le symbole d’une oligarchie mobilisée pour le dépeçage systématique de l’Etat. Il n’y a plus de conflits d’intérêts. Ils sont dans la synthèse permanente des intérêts de l’oligarchie.
Qu’est-ce que cela changerait, si les fonds de pension tels que BlackRock faisaient main basse sur les retraites des Français ?
C’est un problème de solidarité, et de rapport à l’humain. Ce qu’on nous propose est une retraite par point, c’est-à-dire le chacun pour soi. Les femmes seraient massivement pénalisées dans ce système. Dans le système actuel en revanche, les jeunes payent pour les vieux, et ils seront payés ainsi à leur tour lorsqu’ils prendront leur retraite. Nous avons un minimum garanti pour tous, un système d’évaluation des retraites assez juste, et on est le pays où les retraités sont les moins pauvres et les moins malades d’Europe. Avec le système de retraite par point individuel, géré par des fonds de pension, ce qui est en route, c’est un processus de déshumanisation.
Propos recueillis par Mathieu Dejean
2019, année record pour les marchés financiers mais pas d’argent pour les retraites
TOUT POUR LES UNS RIEN POUR LES AUTRES ! Ce n’est pas seulement la France, partout dans le monde les peuples se révoltent contre la pression exercée sur leur vie par des gouvernements livrés au capital, aussi corrompu que l’est celui de Macron, qui dans la même nuit du 31 décembre fait s’évader le PDG de Renault, accorde la légion d’honneur au PDG des fonds de pension et insulte les grévistes et les Français qui protestent (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société).
2019 aura tutoyé les sommets en matière de valorisation financière, le CAC 40 terminant l’année aux alentours des 6000 points soit à peu de choses près, autour des valeurs d’avant la crise de 2008. En contrepartie de ces résultats éclatants pour les investisseurs et les actionnaires, pour les travailleurs, c’est l’exploitation accrue, la précarité du travail et finalement l’appauvrissement qui sont promis, à moins qu’ils ne soient capables d’inverser la tendance, comme le mouvement de révolte à l’échelle mondiale le laisse présager.
mardi 31 décembre 2019
Crédits photos : Reuters
Malgré la guerre commerciale et les incertitudes, les marchés financiers battent leurs records
Malgré les remous, 2019 aura été une année faste pour le marché des actions, dans un contexte de fortes turbulences commerciales. Les grandes facilités de crédits, accordées par les banques centrales, ont surtout conduit les investisseurs à injecter d’énormes quantités de capitaux dans les actions, portées par les bénéfices records des grandes multinationales et une croissance mondiale assez solide. Pour autant, tous les observateurs s’accordent à dire que la santé de l’économie mondiale ne saurait justifier de telles envolées. Sur un an, le CAC 40 aura progressé de 28%, le Dow Jones de 23% et le Nasdaq de 36% alors même que leurs valeurs respectives étaient déjà aux niveaux des records historiques il y a un an.
Une année 2020 qui pourraient voire éclater ces contradictions
L’extraordinaire solidité du marché des actions qui se base pour l’essentiel sur des prévisions de croissance pourrait être confronté à une série de « corrections » d’importance si ce n’est à des avaries plus profondes encore. Alors que la croissance mondiale pourrait continuer à ralentir, de nombreux marchés hautement spéculatifs comme celui des starts-up pourraient s’effondrer. La faillite de Wework à l’automne dernier pourrait d’ailleurs à ce titre présager une tempête de plus grande envergure sur ce front des entreprises à fort potentiel qui aspirent d’immenses quantités de capitaux pour des résultats plus qu’incertains.
Vent de révolte à l’échelle mondiale et lutte des classes en France
Cette frénésie spéculative est le symbole d’un capitalisme dont l’essor ne correspond à aucun progrès réel pour les populations et les travailleurs qu’il exploite. Alors que les cartels industriels se sont relevés de la crise, les inégalités ont explosé et les conditions de travail se sont massivement détériorées dans les pays capitalistes avancés. Les résultats économiques ne sauraient masquer le vent de révolte qui souffle sur le monde entier, comme en France depuis un an ou au Chili depuis deux mois. Alors que Macron et ses alliés essayent de faire admettre aux travailleurs qu’il n’existe aucune richesse dans un pays comme la France pour financer des retraites ou des salaires, et plus généralement que tout travailleur est un « coût » pour le patronat qui pourtant n’existerait pas sans lui, 2020 s’annonce pour notre camp social, comme une excellente année pour repartir à l’offensive. La fortune du grand capital est une misère pour le plus grand nombre et le fameux « ruissellement » un mirage. Contre la réforme des retraites et son monde, il est temps de passer à l’attaque.
Pauvreté et baisse de l’espérance de vie au Royaume-Uni et aux Etats-unis, le désastre de l’économie libérale
les résultats de la politique que Macron veut nous imposer, parce que dites vous bien qu’il ne s’arrêtera pas aux retraites, c’est la vie qu’ils veulent prendre, tels les brigands qui ont fondé bien des fortunes, c’est non seulement « la bourse ou la vie », mais les deux. Prenez garde, Macron est en train de mener la Révolution conservatrice de Reagan et Thatcher jusqu’au bout et selon la stratégie de Thatcher en Grande Bretagne, il prétend isoler les forces structurées les plus combatives comme Thatcher l’a fait avec les mineurs, lui c’est la SNCF, la RATP, le résultat est là il ira jusqu’à atteindre notre espérance de vie au nom des profits d’une minorité. (note de danielle Bleitrach)
L’espérance de vie stagne au Europe depuis plusieurs années, ce qui n’est pas une bonne nouvelle. Mais qu’elle aille jusqu’à reculer en Grande-Bretagne, la sixième économie mondiale, est un signal inquiétant qui alerte les spécialistes : des pans entiers de population subissent un recul alarmant de leurs conditions de vie. Les Etats-unis ont déjà entamé cette abaissement de la longévité depuis deux ans. Comment ces deux pays parmi les plus riches de la planète peuvent-ils produire de tels reculs ?
Dans certaines régions des Etats-Unis l’espérance de vie est plus basse qu’au Bangladesh et au Viêt Nam.
Etats-Unis : chômage faible mais grande pauvreté
Etrangement, alors que de nombreux économistes montrent en exemple les Etats-Unis pour leur quasi plein emploi, avec 4% de chômage, c’est pourtant ce pays qui génère le plus grand nombre de pauvres et d’écarts salariaux au sein des pays développés. Les injustices sociales sont une caractéristique des Etats-Unis. Le candidat à la primaire démocrate, Bernie Sanders faisait ce constat en 2016 : « Une vingtaine de personnes détient la même richesse que les 50 % les moins nantis du territoire américain« . Plus de 5 millions d’Américains vivent avec moins de 4 dollars par jour et comme le soulignait le prix Nobel d’économie Angus Deaton dans un éditorial du New York Times fin 2017, : « Dans certaines régions [des Etats-Unis] comme le delta du Mississippi et les Appalaches, l’espérance de vie est plus basse qu’au Bangladesh et au Viêt Nam. »
Les enfants américains sont ceux qui sont confrontés au plus haut niveau de pauvreté dans le monde occidental développé
Les calculs de taux de chômage aux Etats-unis ne reflètent pas la réalité de la bonne santé économique et sociale des citoyens : des millions de personnes ne sont pas comptabilisées comme étant sans emploi parce qu’elles sont soit en prison, subissant des mini-jobs, malades, ou simplement n’étant pas inscrites dans l’équivalent des pôles-emploi américains. Près de 45 millions de personnes sont considérées comme « pauvres », soit 13,5% de la population . Ces chiffres sont contestés par des universitaires qui estiment que la pauvreté aux Etats-Unis est bien plus importante. Une étude publiée fin 2009 sur la pauvreté des enfants fait ce constat effarant : « Les enfants américains sont ceux qui sont confrontés au plus haut niveau de pauvreté dans le monde occidental développé« .
Les Etats-Unis sont le pays le plus riche du monde, avec les plus hauts revenus par habitants et pourtant une part importante de sa population vit dans de très mauvaises conditions, au point de faire baisser l’espérance de vie de l’ensemble de la nation. Les raisons concrètes de cette baisse sont connues et sont dûes principalement à la mauvaise alimentation, la difficulté d’accès aux soins, la prise de drogues et de médicaments opiacés.
Royaume-Uni : quand l’austérité tue
Le Royaume-Uni subit des problèmes d’inégalités sociales et de grande pauvreté depuis des décennies, mais avec une explosion de ceux-ci depuis 2011 : la crise financière de 2008 a incité les différents gouvernements britanniques à appliquer des cures d’austérité budgétaires drastiques.
Dans le quartier le plus cher de Londres, à Chelsea, les riches vivent en moyenne 16 ans de plus que les pauvres.
La longévité est en baisse au Pays de Galle et en Ecosse et cette baisse est clairement reliée au niveau de vie des habitants : francetvinfo explique que « Dans le quartier le plus cher de Londres, à Chelsea, les riches vivent en moyenne 16 ans de plus que les pauvres ».
La population la plus touchée et la plus fragile au Royaume-Uni est celle des personnes âgées qui ne peuvent souvent pas se payer une alimentation correcte, les prix ayant flambé, pas leurs pensions. Le budget du système de santé a été grévé et de nombreux services ne sont plus fournis, comme les repas livrés à domicile ou les bus en zone rurale. Les prises en charge de problèmes de santé causés par la pollution sont le plus souvent effectuées en urgence. Alcoolisme, prises d’anti-dépresseurs, suicides causés par l’isolement social et économique : les personnes âgées meurent de plus en plus prématurément au Royaume-Uni.
Interrogé par Le Monde, un chercheur de l’université d’Oxford, Danny Dorling résume la situation : « Si plus de gens vivent sous le seuil de pauvreté, qu’on réduit les aides aux personnes âgées, que le budget du système de santé ne progresse pas, qu’il y a plus de sans-abri, peut-être qu’on ne devrait pas être surpris des conséquences« .
Sachant que le taux de longévité a été « gonflé » par l’arrivée des jeunes immigrés polonais venus chercher du travail, la réalité de la baisse de l’espérance de vie britannique va très vite devenir difficile à cacher. Le chercheur Danny Dorling n’est pas optimiste et pense que cette baisse va continuer et s’amplifier. Le problème central qui n’est pour l’heure pas discuté, pour cause de batailles politiques sur le Brexit, est en fait celui de la redistribution des richesses. Mais l’Etat britannique ne semble pas désireux de s’emparer du sujet, surtout quand il se vante de son taux de chômage à 4% gagné par des mesures de restrictions des droits des chômeurs, de contrôles ultra sévères et de « contrats 0 heure »…