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L’anticommunisme, le gouvernement ukrainien et l’origine de l’oligarchie

09 Juil

 http://slavyangrad.es/2015/07/07/anticomunismo-ucraniano-oligarquia/

Lugansk, 2010. “¿Así que os gusta vivir bajo el capitalismo?

Article original : Révolution Journal Marxiste


Des lois récentes qui interdisent non seulement les symboles historiques du communisme (approuvé par le Parlement de l’Ukraine le 9 avril) sont un cadeau pour l’extrême-droite, ils ont ouvert une nouvelle étape dans la tentative de l’oligarchie d’asseoir sa légitimité. Les déclarations affirmant que « le communisme est mort en Ukraine » n’ont pas démarré lorsque les activistes de droite ont abattu la statue de Lénine à Kiev sur le marché Bessarabsky lors des premières semaines du mouvement Euromaidan. En réalité dès la chute de l’URSS, au début des années 1990 il y a eu une première interdiction du parti communiste de l’Ukraine en 1991. L’histoire racontée  par les médias ukrainiennes et de l’occident nous a expliqué alors la « satisfaction supposée du peuple ukrainien – qui avait souffert si longtemps l’oppression soviétique – et peut maintenant profiter de la liberté offerte par la démocratie capitaliste ». Les activistes de cette action ont ajouté qu’une nouvelle classe capitaliste serait capable de revitaliser l’économie post-soviétique, apportant la modernité et l’efficacité... A cette époque, cet enthousiasme pour l’économie de marché emplissait tous les segments de la société ukrainienne, en particulier parmi l’élite intellectuelle et les agents libéraux de la bureaucratie. Cet optimisme – pour mal avisé qu’il était – au moins pouvait être justifié par le fait que l’économie soviétique avait stagné pendant de nombreuses années en comparaison avec les pays capitalistes avancés. Cette stagnation et, en particulier, les efforts voués à l’échec de la bureaucratie pour faire face, avait touché en profondeur la société soviétique, conduisant à une augmentation de l’alcoolisme, des crimes violents et des tensions intérieures. Tout cela avait fait avancer la promesse d’une « approche de l’ouest » en termes de niveau de vie (bien que l’URSS n’ait pas dérivé d’un point de vue global, en particulier dans le cas des catégories plus modestes de la population). En ce qui concerne l’élite intellectuelle, il y avait l’attirance du mode de vie de leurs homologues occidentaux jouissant d’une richesse assez inimaginable dans leur existence de « Soviétique ».

La naissance violente de l’oligarchie

Le résultat final des « réformes » et de la dissolution de l’Union soviétique a conduit à un effondrement économique et social que l’histoire n’avait jamais connu et que l’on n’a pas connu depuis. En Ukraine, cela a entraîné un effondrement de 60 % du PIB et une réduction de quatre ans dans l’espérance de vie entre 1991 et 1999. Ces chiffres sont tout de même effrayants. Et ils ont été, bien sûr, accompagnés d’une baisse de l’emploi et du pouvoir d’achat ; une dégradation importante des infrastructures rurales et urbaines ainsi que des systèmes éducatifs et de santé ; une dépréciation parallèle des droits des travailleurs ; une migration forcée de millions de personnes et le naufrage de beaucoup d’autres dans les limbes de l’abus d’alcool et de drogues.

Alors que certaines républiques ex-soviétiques ont été capables de générer une croissance économique (en grande partie au profit de leurs oligarchies) vers la fin des années 1990, dans le contexte de la croissance économique mondiale et la stabilité qui l’accompagne, l’Ukraine n’a jamais récupéré la totalité de ce qu’elle avait perdu lors de son effondrement post-soviétique.

L’oligarchie s’est formé à partir de la partie la plus libérale de la bureaucratie et des différentes mafias qui sont apparues pendant les émeutes des années 1980. Ces forces se sont souvent constituées dans le seul but de conforter leurs profits. Une bureaucratie moyenne – liée à la gestion des industries d’Etat et des ressources naturelles – a utilisé sa position comme un levier pour l’ascension sociale. Elle a saisi l’occasion qui lui était offerte de prendre le contrôle des institutions en charge de la gestion. Le plan de privatisation par un système de coupons, qui avait été regardé avec optimisme, même par la gauche, a été un désastre. Alors qu’il été présenté  comme une occasion pour le peuple soviétique de contrôler sa propre industrie, la distribution des obligations, parmi une population ignorante en matière d’économie de marché et un système judiciaire totalement inefficace, a conduit à une situation similaire à l’anarchie de l’américain « Wild West », du XIXe siècle. Il n’y eut que quelques cas rares dans lesquels les obligations furent honorées par les nouveaux cadres de l’industrie, ce qui a conduit à leur concentration dans toutes sortes de circuits de type mafieux. Les Investisseurs occidentaux étaient rares, puisque la législation du travail soviétique était plus stricte avec les investisseurs étrangers que celles qui existaient en Asie, par exemple. En outre, les industries légères plus modernes, considérées comme moins compétitives que la production capitaliste des marchandises, ont été massivement privatisés et délaissées. Cela a eu un effet boule de neige sur l’ensemble de l’URSS, avec une économie très solidaire et une production se déplaçant constamment entre les différentes républiques. Les industries lourdes et  de matières premières ont subsisté en grande partie en raison de leur rentabilité, mais elles n’étaient désormais que l’ombre d’elles-mêmes. Les oligarques qui sont nés de ces industries ont sacrifié les normes de sécurité afin d’accroître leurs profits, menaçant les travailleurs de  licenciement pour parvenir à leurs fins. L’industrie minière de l’Ukraine est devenue l’une des plus dangereuses au monde, avec des centaines de mineurs qui meurent chaque année dans des accidents évitables. Le secteur financier a également été privatisé, et de nombreuses banques ont été créées dans la décennie des années 90 grâce au pillage des biens publics. Certains ont eu recours à des stratégies de type « Ponzi », proposant de grands bénéfices aux naïfs en investissant leur épargne pour fermer le robinet peu après. Le système judiciaire n’a rien fait pour éviter cette dérive des situations.

Comment justifier le vol massif

Bien que cela ne correspondent à aucun développement, ni modernisation de l’économie ukrainienne, la privatisation de la grande industrie d’État a donné aux oligarques une puissance économique qui leur a permis de devenir la nouvelle classe dominante. Cela a conduit à la formation de partis politiques représentant les intérêts des différents clans des oligarques, avec des alliances entre eux qui fluctuent souvent. De cette façon, ils ont réussi à renforcer leur contrôle sur l’économie de l’appareil d’État. Dans le même temps, des chaînes de télévision, des stations de radio et des journaux ont été créés pour représenter les intérêts des différents clans oligarchiques. Les journalistes indépendants informant sur la corruption des oligarques ont été menacés ou tués. Cela a permis l’émergence d’une génération de journalistes soumis à n’importe quel type de puissance sous condition d’un accès suffisant aux ressources financières. Le résultat a été un certain nombre de reportages, dans différents moyens de communication,  dont l’objectif était de réduire l’expérience soviétique de l’Ukraine à une longue  famine. Les motivations de cette propagande anti-communiste n’avaient rien à voir avec la sympathie pour les victimes de ces purges ou famines des années 1930. Au contraire, ces tragédies ont été cyniquement utilisées pour faire oublier aux gens (et éviter que les générations futures puissent connaître la réalité) les crimes qui avaient permis que les actuels dirigeants prennent le pouvoir. En raison de l’absence de développement économique, la grande majorité des actifs sous le contrôle des oligarques est équivalente au potentiel industriel qui s’était développé au cours de la période soviétique.

Pouvoir oligarchique dans la guerre civile

La crise de 2008 a frappé très durement la fragile économie ukrainienne, déclenchant une crise économique intense qui a culminé avec le renversement du Président Yanukovich au début de 2014, lors du mouvement Euromaidan. Son régime oligarchique a été remplacé par un autre encore plus brutal livré aux groupes d’extrême-droite pour écraser toute rébellion, en particulier de toutes les forces militantes de la gauche. Il est intéressant de noter que même les fractions de l’oligarchie dans le Donbass, qui avaient constitué le principal support de Ianoukovitch, ont semblé l’abandonner  très vite durant la tempête. Akhmetov et ses acolytes aussi se sont opposés radicalement au mouvement anti-Maidan ainsi qu’à la rébellion anti-Kiev qui a suivi. En fait, les empires financiers de ces oligarques ont longtemps souffert de la perte de cette région qui représentait 40 % du PIB de l’Ukraine avant la guerre. Malgré cela, les oligarques propulsés à la tête de  l’Euromaidan font des bénéfices records, à l’aide de la guerre civile, les privatisations et les difficiles mesures d’austérité pour exploiter au maximum le peuple ukrainien. Ils essaient maintenant de renforcer leur pouvoir, en alimentant le nationalisme et l’attaque sans pitié de toute opposition. Ils espèrent ainsi détourner l’attention des masses en ce qui concerne la pauvreté et les inégalités qui atteignent un niveau sans précédent depuis l’indépendance. Toutefois, le fait est que, même un quart de siècle après la chute de l’URSS, la mémoire des crimes d’où est née l’oligarchie est actuellement toujours vivace dans l’esprit de tous les Ukrainiens dans tout le pays. Plusieurs enquêtes ont montré que la réclamation de l’expropriation des richesses volées par les oligarques est une idée qui est populaire dans l’ensemble de l’ex-URSS. La lutte contre l’oligarchie – et, par là -, le capitalisme est la seule lutte susceptible d’unifier la classe ouvrière de l’Ukraine des clivages nationaux. Les organisations qui soutiennent cette lutte sont encore petites et sont soumises à la répression du gouvernement et des groupes d’extrême droite, mais elles sont les seules à pouvoir  fournir une solution pour sortir de la crise actuelle. .

 
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Publié par le juillet 9, 2015 dans Europe, HISTOIRE, SOCIETE

 

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