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Le double visage de mai 68 et le mitterrandisme : Macron héritier?

27 Fév

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Le mouvement de mai 68 dans le monde des intellectuels, celui des facs et des Beaux-arts en grève a été plein de créativité. L’alliance entre intellectuels et prolétaires a été au cœur de cette créativité. Mais cette alliance était déjà fantasmée, pour une partie des gauchistes, ce qui l’interdisait était le « stalinisme », celui du PCF et donc de l’URSS. Ils étaient des traîtres à la classe ouvrière, mais ce discours servait aussi d’alibi à la révolution conservatrice qui était en train, dans une nouvelle phase d’accumulation du capital,  de mener l’assaut contre tout ce que la classe ouvrière avait réussi à imposer. La dénonciation d’un « stalinisme » jamais  analysé, devenu la simple diabolisation d’un individu a servi de leurre masquant les effets d’une contre-révolution qui a mis à mal toute une manière révolutionnaire de penser le monde et de prétendre le transformer. De quoi Staline est-il le nom ? Voilà la question que nous avons prétendu poser à l’histoire de ces cinquante dernières années et dans lesquelles mai 68 prend place.

Macron, l’héritier du projet mitterrandien de réduire le rôle politique de la classe ouvrière

Macron s’apprête à célébrer l’événement, une sorte de danse du scalp sur la destruction programmée de la sécurité sociale, de la fonction publique et de la SNCF, une manière a-t-il avoué d’en finir avec « la soviétisation » de la France imposée au patronat collaborationniste par la classe ouvrière qui n’avait pas trahi et mené « la bataille du rail ». En quoi cette revanche a-t-elle à voir avec mai 68? Aussi étrange que cela puisse paraître cela n’a rien d’étonnant, Macron  doit beaucoup à ce qui s’est mis en place à ce moment-là et que le mitterrandisme a imposé. Mais il y a eu aussi en mai 68 en France l’irruption de la classe ouvrière, l’augmentation des salaires de 30% , la section syndicale à l’entreprise. Ce fut souvenez-vous-en l’intervention de Mitterrand autant que la descente de la réaction sur les Champs-Elysées et l’appel de De Gaulle aux forces armées de Massu en Allemagne qui siffla la fin de partie. Le spectre aussi qui se levait du côté de la Tchécoslovaquie… mais c’est un autre chapitre… Sur tout ce mouvement inabouti l’opération Mitterrand fut un contrefeu du début à la fin et en tant que telle elle obtint l’aval des Etats-Unis, qui savait déjà si l’on en croit les documents déclassifiés de la CIA qui soutenir parmi ces soixante-huitards. On pourrait résumer l’objectif de Mitterrand, tant sur le plan de sa politique que sur le travail opéré dans le monde intellectuel, par la volonté obstinée d’isoler ce puissant acteur ouvrier, de le réduire en influence et pour cela d’utiliser les tendances anticommunistes de l’autre partie du mouvement de mai 68. C’est ce qui a été exigé des « élites », du haut fonctionnaire à l’enseignant, de « l’artiste » au personnel des médias, une véritable mobilisation. Macron n’est pas un électron libre, il a bien été couvé dans la social-démocratie, le PS que met en place Mitterrand et qui se caractérise partout par la volonté de couper le monde ouvrier de sa capacité d’intervention y compris dans le PS lui-même dont la composition ouvrière est minorée. Cette opération contre le monde ouvrier s’est réalisée au dépend de l’ensemble des autres catégories sociales, y compris les intellectuels, pour le seul bénéfice de ceux que représente aujourd’hui Macron.

L’offensive idéologique tout azimut contre « le collectivisme » au nom des droits individuels

On a du mal à mesurer le travail opéré par la contre-révolution sur la capacité à penser elle-même, on en voit les résultats dans l’émiettement, la victoire d’une pseudo compétence technocratique sur le simple bon sens, les applaudissements face au démantèlement du « modèle français », de la sécurité sociale à la SNCF, l’acceptation de faire payer aux pauvres, aux isolés, la toute puissance du capital devenu logique irréfutable, le monde des enseignants, de la culture, tous les fantassins du social invités à courber l’échine devant la modernité. L’incapacité à exprimer la colère qui emplit les cœurs et l’invite à passer sous les fourches caudines. Tout cela n’est pas né aujourd’hui mais on a le sentiment d’assister à l’assaut final qui a réussi à individualiser, interdire toute coalition, ne plus voir que midi à sa porte et l’ennemi dans le voisin. Les histrions ont accompagné cette émiettement de la force combative avec une philosophie de pacotille.

Comment est-on passé de la France intellectuelle de Jean-Paul Sartre, des intellectuels communistes, bastion contre l’américanisation à celle de Macron, il n’y a pas de rupture, mais offensive continue dans laquelle l’idéologie anti-totalitaire, la stigmatisation de toute révolution devient le fer de lance au prix d’une véritable déroute des exigences : on est passé de l’école de Soboul et d’autres à la popularisation de Stephan Bern et Lorant Deutch (la transition ne s’est-elle pas opérée dans la gauche française non seulement grâce à Furet mais par la popularisation de quelqu’un comme Olympe de Gouges, l’apologie de la contre-révolution au nom du féminisme dont l’ennemi devient Robespierre et les sans-culottes). Toutes les aspirations « sociétales » ont été ainsi utilisées par les tenants de l’anti-totalitarisme comme un retournement contre le prolétariat et sa capacité politique qu’avaient symbolisé les victoires de l’Union Soviétique… ce n’est pas seulement les communistes, leur parti, mais bien la classe ouvrière elle-même, la possible dictature du prolétariat tuée dans l’œuf. Et ce en violation de l’évidence des faits, à savoir le rôle joué par les communistes, de l’URSS et du PCF dans la promotion de la condition féminine, dans la libération des mœurs, le combat mené contre les forces réactionnaires partout.

L’affaiblissement du parti révolutionnaire est un objectif dit et répété, pas un complot. Comme l’est la volonté de faire surgir l’extrême-droite destinée à diviser la droite, en rabattre une partie vers la social-démocratie qui poursuit sa dérive vers un parti démocrate à l’américaine. Cette extrême-droite joue un rôle de repoussoir qui assure la victoire électorale mais aussi d’éclaireur en matière idéologique jusqu’à la confusion actuelle.

Quelques prises de conscience rapidement isolées… 

C’est Deleuze qui a eu le courage de s’atteler aux  nouveaux philosophes en montrant leur absence de travail conceptuel. « Une pensée creuse comme une dent creuse qui ne mord sur rien », une pensée qui joue avec des oppositions binaires élémentaires, pourquoi à cause de ce qui devait être dit et surtout ce qui devait être exclu du champ, la pensée de supermarché, ainsi les décrivait-il était vide mais pas dénuée d’objectifs préconçus. Tout cela était hélas vrai, mais il y a eu plus que ça, dans le sillage de cette « nouvelle philosophie » s’est opéré un véritable travail de déconstruction sur la manière de penser la réalité, le monde et les possibles offerts à ceux qui cherchaient à résister. Ce travail idéologique a essentiellement porté sur la dénonciation de toute forme collective devenue appareil d’aliénation. L’idéologie anti-totalitaire qui a en France plus que partout prétendu à une scientificité que personne ne lui a jamais reconnu en matière de recherche s’est étalée sur les plateaux de télévision et est devenue pour des milliers de Bouvard et Pécuchet l’équivalent d’une explication du monde, voire une morale de l’attitude à défaut d’être une attitude morale. En France, elle a connu un soutien actif à travers l’organisation courtisane de la notoriété et l’accès aux prébendes sous l’ère Mitterrand. Il n’y a plus eu la moindre tentative de démocratisation de la culture depuis la décentralisation de la Libération, mais celle-ci a été utilisée pour favoriser le clientélisme. Tout cela en rupture parfaite du monde de l’art et des intellectuels avec « le prolétariat ».

De ce point de vue quand Derrida dans le spectre de Marx retourne à celui-ci, il note l’essentiel, la capacité à dire l’injustice, mais pas comme un balbutiement comme une conception du monde, de l’action.

Le structuralisme et l’Eurocommunisme… Et sur le plan économique le démantèlement européen 

Le fait essentiel par rapport à cet ultime recours à Marx c’est qu’il n’y a pas eu de résistance dans le contexte de l’eurocommunisme du côté du parti révolutionnaire qui avait pourtant eu une influence hégémonique France. La tentative de barrage opérée par Althusser s’est retournée contre la volonté de son auteur, en laissant un groupe de jeunes gens issus de Normale supérieure opérer un retour à Marx sans sortir de la salle d’étude autrement que pour y dénoncer la traîtrise conceptuelle du Parti communiste Français qui était censée redoubler celle de l’Union soviétique, le projet venait renforcer celui de l’anti-totalitarisme et celui qui faisait de mai 68 le premier de la série des révolutions de couleur. Chez les anti-althussériens, le retour à l’individu a été accueilli avec enthousiasme dans le cadre de la dénonciation du « stalinisme » et l’adhésion à l’eurocommunisme. Althusser se voulait un contrepoison à l’abandon de la dictature du prolétariat, le « retour à Marx » à travers le structuralisme l’a accompagné, la meilleure preuve comme il le disait lui-même qu’on ne sort pas de l’idéologie par l’idéologie. Mais il faut noter que tout cela se présente comme une tentative de sauver le communisme après le « stalinisme ».

Un certain nombre de ces jeunes gens regroupés autour d’Althusser, de Robert Linhart à Pierre Goldman ont dénoncé l’opération, ils ont perdu la vie à tenter de s’y opposer. Ils étaient plus ou moins seuls. Ils n’avaient pas pu faire jonction avec le mouvement ouvrier français qui une fois de plus dans notre histoire avait fait de mai 68-maidan réactionnaire, libéral libertaire, un moment de la lutte des classes en France, comme en 1848 face au reste de l’Europe, le prolétariat s’était invité dans le mouvement petit bourgeois qui continuait à mener un combat parodique contre les féodalités, mais attaquait déjà en priorité le parti révolutionnaire symbole de collectivisme honni. Tout le travail de l’ère mitterrandienne a été d’isoler ce mouvement ouvrier surgi en 68 et contre lequel dès cette époque il s’était employé à manœuvrer. Il s’agissait, il ne s’en cachait pas de lui faire perdre en influence et de s’ouvrir largement au libéralisme libertaire, non seulement au plan artistique et intellectuel, mais en opérant une restructuration en profondeur de l’économie française, attaquant l’industrie et renforçant son pouvoir financier; les nationalisation ont servi à ça. Et si aujourd’hui nous avons du mal à employer ce terme, ce n’est pas seulement à cause de la manière dont a avancé dans les esprits la dénonciation de « la collectivisation soviétique », mais également à cause de l’expérience concrète de l’ère Mitterrand : achat largement payé aux anciens propriétaire, restructuration, perte de milliers d’emplois et transformation d’entreprises nationales comme EDF et d’autres en vaisseaux de guerre pour annexer des marchés étrangers.

En Amérique latine, le capital flanqué de ses bourreaux torturait pour obtenir cela, en France un socialiste au pouvoir, flanqué de ministres communistes imposait la même orientation, il a été difficile de s’en dégager, l’assaut a même été mené à l’intérieur du parti contre Marchais qui voulait quitter le gouvernement, un assaut contrôlé par Mitterrand allié avec les autres dirigeants de l’eurocommunisme de Rome à Madrid. Retour au stalinisme criaient-ils et il s’est trouvé pas mal d’intellectuels pour appuyer l’opération de déstabilisation, pour obliger le parti communiste à devenir le vassal de la social-démocratie totalement intégrée aux visées du capitalisme européen et à l’UE.

La mise en pièce de tout un patrimoine intellectuel, organisationnel accumulé depuis des siècles, la mémoire ouvrière, la transmission et l’actualité

C’est peu dire qu’attaquée de toute part la classe ouvrière a eu du mal à résister. La chute de l’Union soviétique a accéléré une liquidation de tout un énorme patrimoine intellectuel révolutionnaire. Il suffit de relire Marx, de voir comment lui-même a opéré un travail conceptuel sur des termes hérités de l’antiquité et déjà repris à travers des luttes et les balbutiements de la théorie socialiste. Le terme de prolétaire par exemple récupéré depuis les Romains en passant par les canuts qu’il a fait passer de pauvres a exploités, nous ne l’employons plus, en revanche les « gens » ont envahi toutes non pas analyses, il y en a peu, mais proclamations. Pour masquer ce détournement on a utilisé les poètes comme le défunt almanach Vermot utilisait les citations. Ce qui ne muscle rien et renforce au contraire l’impression du vide et du confus. C’est un signe terrible de faiblesse que de ne pouvoir penser que dans les termes qui vous sont imposés par l’idéologie dominante.

Mais sans remonter aussi loin que cet abandon de toute référence au prolétariat et surtout à sa possible « dictature », il faut mesurer comment pour se faire accepter, pour collaborer à la modernité social-démocrate nous communistes avons souvent contribué à la mise en pièce du « collectif ». En relisant l’analyse que fait Maurice Thorez de la nécessité des cellules et les critiques adressées aux sections qui sont tout à fait appropriées pour rendre compte de l’état du parti aujourd’hui, nous voyons mieux en quoi au Congrès de Martigues, il y a eu un choix – conscient ou non? – de démembrer le travail d’organisation dudit prolétariat, de le faire revenir de l’état de classe sociale aux « gens ».

Le travail de sape mené dans le cadre d’une contre-révolution et la difficulté dans laquelle les communistes se sont trouvés pour y résister est devant nous. Cela ne sera certainement pas traité au Congrès, pour beaucoup cela apparaîtrait comme un travail inutile face à la nécessité de mener le combat contre l’assaut néo-libéral de Macron, une potentielle division. Ce travail se fera néanmoins à partir de ce combat et d’une réflexion sur l’état du monde. On s’aperçoit bien qu’il faut une organisation à la hauteur des tâches autant que des concepts pour penser la situation internationale, la crise d’hégémonie des Etats-Unis, l’apparition de nouveaux rapports sud-sud, le devenir de la Chine à lui seul exige un travail énorme de réflexion, appelle on le voit un travail conceptuel, l’étude des faits, des collaborations avec d’autres partis communistes.

Si le PCF a survécu, il le doit sans doute au coup de frein à l’eurocommunisme que Georges Marchais a su imposer à temps et plus encore à son non renoncement total à sa dimension de classe. Il faut partir de là sans s’en contenter.

Je suis convaincue qu’il y a des choses à transmettre, des choses « attendues » de fait… Si nous prenons par exemple l’écho qu’a eu la découverte du rôle d’Ambroise Croizat et en tirant le fil on découvre cette intervention ouvrière imposant au niveau de l’Etat une tout autre conception des droits du monde du travail étendu à tous, une autre conception de la société faite de solidarité y compris intergénérationnelle, comme la conscience que nous sommes au niveau international en pleine mutation et que le communisme n’y est pas étranger, cela pose l’urgence d’un renouveau stratégique et des moyens, une autre base de l’alliance entre intellectuels et classe ouvrières dont les frontières se sont transformées mais dont la dynamique reste celle de la lutte des classes.

On a employé le mot de chantier, pourquoi pas, celui-ci donne envie de s’y atteler.

Danielle Bleitrach

 
13 Commentaires

Publié par le février 27, 2018 dans HISTOIRE, THEORIE

 

13 réponses à “Le double visage de mai 68 et le mitterrandisme : Macron héritier?

  1. Frank

    février 27, 2018 at 11:24

    bonjour chère danielle,
    Je suis trés étonné,par le fait que tu écrives que Robert Linhart a oerdu la vie alors qu’aprés une carrière brillantissime de prof d’université paris 8,il est trés bien portant à 75 ans.
    De plus Louis Alhusser est mort dans son lit,malgré sa maladie pour lequel il était traité depuis 1950,sans aucun rapport avec ses écrits mais qui l’a malheureusement conduit à assassiner sa femme.
    Quand à Pierre Goldman(1/2 frère du chanteur),il n’était pas un théoricien,mais un activiste,qui fut apparemment assassiné par des barbouzes de droite.
    Si ce sont des aides à ce blog,qui sont responsables de ces erreurs grossières,il faut rectifier..
    bien à toi.
    Frank

     
  2. histoireetsociete

    février 27, 2018 at 11:38

    Bonjour cher franck, merci d’être aussi attentif. Tu as raison mais c’est lié à mon incpapacité à trouver le mot qui convient. quand je dis perdu la vie c’est un raccourci, parce que Robert Linhardt est certes bien en vie, j’ai passé il y a trois ans le jour de l’an avec lui, mais il y a une incapacité à dire à partir d’un moment. Ce qu’il a de commun avec Goldman c’est non seulement leur origine de juifs polonais, (et cela concerne mes réflexion actuelles) mais leur dénonciation de mai 68. Effectivement le terme de perdre la vie était en quelque sorte une manière de désigner la sève qui crée l’écriture autant que la puissance de l’engagement. je te remercie de me le faire préciser. Althusser a connu la même incapacité à être. C’est une aporie non seulement individuelle mais que je crois générationnelle et qui a quelque chose à voir avec « la dictature du prolétariat ».
    On retrouve ces êtres brisés dans le romantisme allemand et l’incapacité à faire la Révolution française, c’est le cas d’Hölderlin et de Lenz (qui intéressait non seulement Buchner, mais Brecht). A la seule différence près que ces êtres brisés selon Lukacs sont confrontés soit à ceux qui choisissent le romantisme réactionnaire comme Schelling dont la postérité est le nazisme, soit celui qui accepte d’aller au bout des possible de son siècle comme hegel ou Goethe, soit ceux qui se taisent par impossibilité à renoncer…la figure de cette plénitude créatrice fait singulièrement défaut dans notre temps. Lukacs raconte une scène où Hegel, Hölderlin et Schelling plantent un arbre de la liberté pour célébrer la révolution française et il analyse comme je viens de le faire les trois issues possibles à l’impossibilité révolutionnaire. Ce ne sont pas des destins individuels mais des allégories générationnelles. Il y a incontestablement une dimension métaphysique voir messianique dans cet engagement dans la Révolution chez des gens comme Linhart et Goldman, comme je les comprends, quelque chose qui a été très bien mis en évidence dans le principe espérance ou même dans l’ange de l’histoire de walter benjamin, et que l’on retrouve dans le pacte entre Hegel, Hölderlin et Schelling. ll y a d’ailleurs un texte qui a été décrit comme « énigmatique » d’une extrême densité et magnifique comme peut m’être celui de Büchner sur la folie de Lenz: « Le plus ancien Programme systématique de l’idéalisme allemand » (1795-1796). Fruit probable d’une rencontre les trois étudiants, il a été écrit de la main de Hegel et mêle des idées de Hölderlin à une conceptualité schellingienne. À la confluence du romantisme, de l’idéalisme allemand et de beaucoup d’autres mondes, cet écrit anonyme en appelle, pour finir, à « une nouvelle mythologie au service des Idées et de la raison ». Ce n’est qu’au prix d’« une nouvelle religion » que « l’unité éternelle régnera parmi nous ». je crois qu’il y a quelque chose de cela dans la manière dont les plus purs, ceux qui reflètent cette enfance y compris sous le nazisme, cherchent sinon une nouvelle religion à tout le moins le désir de participer à l’épopée et à cause de ce qu’est mai 68, ils en mourront de devoir y renoncer. Il y aura d’autres morts au champ de la révolution impossible mais eux de corruption, de médiocrité et ils pourrissent au milieu de nous. C’eszt ce creuset d’une révolution impossible et d’une contre-révolution à l’oeuvre qui m’intéresse dans mai 68 et que je tentais de signifier par la mort.

     
  3. Frank

    février 27, 2018 at 12:15

    Merci pour ta réponse pleine de vécus,de ressentis et de considérations personnelles,mais expertes au vu de ta position, qui sont ton ‘charme’…En plus je partage tes considérations,avec 20 ans d’âge en moins.
    Bravo aussi pour tes intuitions,qui sont aussi souvent des fulgurances,aussi les miennes et bonnes continuations….Frank
    NB:pour le cas d’Althusser,dont j’ai essayé de lire toutes les bios,sa facette psychiatrique est prégnante ;.il me semble aussi,(je peux me tromper)que par rapport à ses écrits ,tu étais trés prudentes (en 1980,comme rédac de ‘Révolution’),ne serait ce que parce que BHL clamait partout que la notion althussérienne ‘d’anti-humanisme’ ,est soi disant la sienne…

     
  4. etoilerouge

    février 27, 2018 at 3:38

    Excellente analyse des deux MAI 1968 et de la Révolution impossible du fait d’un courant ouvrier révolutionnaire se trouvant en butte à un courant individualiste anti ouvrier, anti collectif, anti marxiste rejoint dans la balance des forces par une droite extrême ou non, social démocrate anti révolutionnaire. La conjonction de ces courants et la faiblesse de l’analyse du soi-disant stalinisme par les communistes va mener ces forces à une contre révolution générale toujours active. Vous réalisez fortement que 3 moments historiques ne sont pas analysés ou peu de manière marxiste, dialectique, matérialiste que sont le rapport KROUTSCHEV signal d’une remise en cause de la première expérience socialiste par des moyens de grande faiblesse, des ragots, des mensonges mêlés de demi vérités, puis pour la France MAI 1968 et les fleuves anti marxistes , anti soviétique anti PCF, un PCF englué déjà dans une non analyse du stalinisme, manquant d’une pensée claire pour apporter des réponses claires, le courant se rejoignant de tous les fleuves anti socialistes et anti communistes, des individualistes libertaires, des sociaux démocrates, de la droite, des institutions de l’état capitaliste de la France d’hier et d’aujourd’hui. Votre réflexion ouvre à la nécessité de revenir sur ces moments qui mènent à l’effondrement des partis communistes européens puis à leur influence en Union soviétique même avant la disparition de celle ci, l’eurocommunisme ayant joué un rôle nécessairement parmi d’autres.
    Pour le stalinisme , ce serpent de mer, rappelons la réaction de STALINE lui-même à son fils qui, enfant, voulait se faire appeler STALINE dans son école. STALINE le réprimande et lui dit : il n’ y a qu’un STALINE et moi même je ne suis pas STALINE.
    Comment mieux exprimer que STALINE est un symbole collectif, d’une période historique collective, de décisions qui peuvent être contradictoires mais toutes collectives, et que analyser l’homme STALINE, comme le font ses ennemis, c’est analyser un homme qui n’existe pas pour donner au fait collectif que fut cette immense aventure révolutionnaire les couleurs du Diable!
    De quoi STALINE est -il le nom est une question non résolue mais que vous avez pris du bon côté, celui de l’histoire réelle, analysée de façon marxiste, dialectique et historique. Il faut aller au bout. Cela passe par un parti qui se maintient comme communiste, qui défend lorsque nécessaire son passé et celui de la Nation Française Républicaine contre toute attaque, qui doit reprendre son combat de classe avec le retour , lors du congrès du Marxisme, du Léninisme, d’autres comme GRAMSCI, et bien d’autres et d’une organisation nécessairement en cellules pour reprendre pied dans le peuple et la classe ouvrière, les sections ayant une faible activité politique doivent redevenir un lieu de direction et d’échanges. Aussi j’apprécie votre travail et votre blog, celui de LOSURDO, le travail de GASTAUD si courageux.
    J’ajoute que vos lecteurs devraient tous voir votre intervention à la librairie TROPIQUES sur ce qui vous motive dans votre écrit sur STALINE. La direction du PCF ne peut continuer à vous interdire et vous censurez et prétendre rassembler ainsi les communistes. Votre livre et vos réflexions qui ne sont pas isolées doivent être portées à la connaissance de tous ceux prétendant être communiste et entrainer un vaste débat.
    Merci pour tout.

     
  5. histoireetsociete

    février 27, 2018 at 4:05

    Oui ils sont bête et méchants. Mais avec le temps j’ai appris à vivre avec et trouvé le moyen d’être un peu entendue. Ce que je suis contente d’avoir mis en oeuvre dans cette analyse c’est bien une analyse de classe, une dynamique autour de l’alliance entre intellectuels et classe ouvrière, alors même que le développement des forces productives crée des zones d’indistinction entre ces groupes, ne serait-ce que pour avancer sur la question de l’Etat.

     
  6. lemoine001

    février 27, 2018 at 7:25

    Le petit film présenté il y a quelques temps le montrait bien : Staline c’est le nom qui faisait tenir ensemble la lutte pour la paix, pour une vie meilleure (la satiété et le confort), l’État soviétique et l’internationalisme, le léninisme et les traditions nationales. Ce qui caractérise la période du stalinisme c’est la construction et la mise en œuvre d’une vision commune du monde et de l’avenir, celle d’un monde uni dans sa pluralité. Quand cette unité s’est fissurée (la rupture sino-soviétique) c’est ce monde qui s’est effondré. C’est cela la véritable déstalinisation. Quand le bloc de l’Est s’est défait c’est l’union soviétique qui a volé en éclat et avec elle le mouvement communiste international.

     
  7. etoilerouge

    février 28, 2018 at 12:26

    En effet la division d’avec la CHINE doit être mieux perçue dans ses conséquences contradictoires sur le socialisme d’alors, sur le rapport avec l’impérialisme, son évolution , de cette CHINE jusqu’aujourd’hui , la modification de fait du rapport actuel des forces économiques d’un point de vue capitaliste comme ce que cela rend peut-être possible pour le socialisme de demain comme des pays communistes actuels et de leur politique. La CHINE fait partie de vos préoccupations, c’est très heureux.

     
  8. histoireetsociete

    février 28, 2018 at 12:56

    Lemoine et étoile rouge, je vois que nous arrivons au même parcours, il n’est pas encore question de conclusion en ce qui me concerne. J’attribue le même rôle que vous au rapport Krouchtchev. Le diagnostic d’un Maurice Thorez et bien d’autre sur le caractère imbécile et irresponsable de ce rapport, un mélange de ragots et de faits surestimés et d’autres réels qui a brisé la confiance de millions d’hommes et de femmes qui participaient à la plus fantastique épopée accomplissaient des miracles. C’était de cela que Staline était le nom. Les Chinois qui pourtant s’étaient lancé dans une voie autonome ou peut-être parce qu’ils s’étaient lancés dans cette voie autonome l’ont très bien compris et on refusé comme ils refusaient les illusions Khroutchvienne et sa brutale tutelle alors qu’il avait perdu le droit d’imposer quoi que ce soit. Le deuxième acte de cette crise a été la querelle sino soviétique. J’ai fait le tour de ce que j’appelle l’archipel communiste, c’est-à-dire ce qui a plus ou moins résisté à ces deux premiers choc et à ceux qui ont suivi. On trouve les mêmes traits, une capacité à s’ancrer dans sa propre histoire communiste, nationale mais aussi de maintenir la possibilité d’une internationale y compris sans s’engouffrer dans la querelle sino-soviétique, sans conscience de la nécessité de la dépasser. Ce fut le cas des Cubains, c’est toujours leur cas, la présence à leur porte du pire ennemi qui se pouvait imaginer les rendait intelligents, réalistes. Ils étaient obligés très vite de comprendre chaque nouvelle donne. Nous Français, nous avons vécu sur l’acquis thorézien. Marchais s’est engouffré dans l’eurocommunisme, l’alliance avec Mitterrand mais il avait un excellent instinct de classe et il a fait machine arrière toutes, ce qui nous a évité le sort du parti communiste espagnol et italien, mais le mal était profond, les successeur de Marchais, son entourage complètement pourri et ceux qui ne l’étaient pas ont été écartés. Ils se sont laissés faire à la manière dont un kaganovitch et un Molotov se sont laissé faire… Depuis c’est la dérive, nous avons même été incapables de défendre nos acquis, nous les redécouvrons comme avec la redecouverte du rôle d’Ambroise Croizat et des ministres communistes, jamais on aura vu entreprise de destruction de la mémoire aussi totale, y compris sur ce qui n’avait pas lieu d’être. Il n’y a plus rien, ni cellules, ni théorie, ni formation, il y a quelques individus comme nous qui conservons la mémoire qui protestons et cela a été possible parce que ce parti et sa direction ont été incapables de réagir au chocs suivants, la fin de l’URSS et la révolution conservatrice, néolibérale intervenant dans une mutation des forces productives. Nous avons été incapables de percevoir ce qui était en train de changer dans le monde et qui pouvait nous être favorables.

    Nous en sommes là et la question est de savoir si c’est irréversible ou non? En tous les cas pour le moment je suis convaincue que rien ne peut se faire en dehors de ce qui reste de ce parti, ni lui changer de nom, parce que ce qui est en train de surgir de potentiellement fort pour une voir révolutionnaire part bel et bien de la base politique communiste antérieure à tous les niveaux. C’est cela qui me différencie de gastaud pour lequel j’ai beaucoup d’estime et qui me rapproche du réseau, des camarades de venissieux en particulier. Ces camarades ont une manière de s’ancrer dans le terrain disons balisé par Marchais qui correspond bien à ce qui résiste dans le parti y compris chez les « légitimistes » qui votent tout ce que veut la direction et qui dans leur pratique le refusent. Mais les camarades de venissieux à l’inverse des légitimistes ne se contentent pas de préserver l’acquis local, ils conservent le souci de relations internationales et de l’archipel communiste, ce qui est aussi le cas de gastaud. CC’est aussi beaucoup à travers leur critique de l’UE qu’ils sont conduits à cette conception internationaliste. Dans le parti, l’échec retentissant, la pression exercée en ce sens, la conscience de l’offensive de Macron a un peu fait évoluer les choses dans le bon sens après le constat du désastre électoral de l’effacement du parti. Les élus, députés poussent dans le bon sens, avec pragmatisme et ne veulent surtout pas compliquer la situation en soulevant des questions telles que je les pose. Cela donne tout l’intérêt de ce Congrès, ses limites aussi. Ce ne sera qu’un Congrès de transition, mais soit on sera en capacité d’avancer soit ce sera la fin. L’essentiel est de reprendre pied dans les luttes, le reste peut suivre. C’est du moins ma position, celle-là et la nécessité de continuer la pression.

    je pourrais écrire pendant des heures sur le sujet et je suis heureuse de voir que ce à quoi j’aboutis est partagé sans que j’ai eu à l’exprimer.

     
  9. frank

    février 28, 2018 at 5:42

    bonjour,
    Oui,Danielle,je partage aussi,ton mécontentement,face à cette catastrophe pour le mouvement communiste international,constitué par le conflit armé en 1969,sur le fleuve Amour entre l’URSS et La République populaire de Chine.D’autant,que ce conflit a embrasé le monde entier jusqu’au Vietnam,Inde etc..Que s’est il passé ?
    Tout ça ne m’empêche pas d’être au PCF,même si j’éprouve du ressentiment lorsqu’on me manipule ou me malmène intellectuellement.
    bien à toi
    Frank

     
    • histoireetsociete

      février 28, 2018 at 7:37

      moi aussi franck je suis au PCF, moi aussi je prépare le Congrès même si cette foutue bronchite m’empêche de participer aux réunions pour le moment… Moi aussi je n’aime pas être manipulée, alors continuons…

       
  10. Monika Karbowska

    février 28, 2018 at 1:43

    Chère Danielle merci beaucoup pour cette excellente et pertinente analyse… Je pense à ce que tu as dit chaque fois que je discute dans mon boulot avec mes collègues ouvriers et que je me heurte, dans la génération des 45-55 ans (génération Mitterand!) à cette espèce d’individualisme égoiste, après moi le déluge, « moi je n’ai pas de problème », eux qui ramène tout à leur nombril, se placent au centre du monde, meme quand ils voient que cela ne mène qu’à des défaites. Quelque part on ne peut pas reprocher aux ouvriers de ne pas savoir conceptualiser leur appartenance de classe et de se penser en « classe moyenne’ si les théoriciens du parti ouvrier ont cessé de réfléchir à ce qu’est ma conscience de classe; Les ouvriers ne font que répéter ce qu’ils entendent dans l’air du temps. Si nous on n’inverse pas la courbe en répétant inlassablement que personne ne s’en sortira tout seul, qu’on doit reconstruire des collectifs de travail et de lutte… ce ne sont pas eux qui vont inventer cela en génération spontanée. Donc… allons y… créons la théorie! La théorie d’une nouvelle solidarité de classe, d’entraide concrète et de soutien mutuel dans les luttes et la dessus basons notre parti ouvrier. Il y va sans dire que le parti doit etre au SERVICE de la classe ouvrière, il ne doit donc pas servir les intérêts de Pierre Paul Jacques qui veut devenir député…

     
  11. histoireetsociete

    février 28, 2018 at 1:49

    Monika nous sommes quelques uns (et beaucoup d’unes) à être convaincus et à le mettre en action y compris jusqu’à nos forces ultimes.

     
  12. Jean-Paul Galibert

    mars 24, 2018 at 7:46

    Appelons-le Micron ! Voici une fable qui peut vous plaire :

    Micron et l’éléphant qui rit

     

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