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Monika Karbowska: compte-rendu de la comparution d’Assange le 19 et 20 décembre

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Chers Ami/es

Avec mes voeux pour une Année 2020 de Liberté et de Justice et de Victoire de nos luttes, je vous envoie mon article compte rendu des audiences de Julian Assange le 19 et 20 décembre.

Le 19 décembre Julian Assange a comparu en video extrêmement affaibli, les craintes qu’il meurt avant son procès final sont très grandes.

http://www.defenddemocracy.press/french-activism-luttes-intenses-et-audience-fantome-a-la-westminster-magistrate-court-julian-assange-comparait-le-19-et-le-20-decembre/

Le 20 il a comparu physiquement à la cour, les actions militantes étaient très fortes, mais alors même qu’il était témoin ou victime dans ce procès, la cour a décrété un huis clos. La lutte pour pouvoir le voir a été intense.

Je vous envoie cet article critique sur l’inaction de ses avocats.

https://blogs.mediapart.fr/edition/liberez-assange-ethiques-et-medias/article/261219/assange-torture-gareth-peirce-detourne-le-regard

La version anglaise de mon article a été faite et publié par les camarades du groupe Class Conscious d’Australie et de Nouvelle Zélande. Ce travail commun est une très bonne chose.

http://www.defenddemocracy.press/french-activism-luttes-intenses-et-audience-fantome-a-la-westminster-magistrate-court-julian-assange-com

https://iriscafe.net/french-activism-intense-struggles-and-ghost-hearings-at-the-westminster-magistrate-court-2/parait-le-19-et-le-20-decembre/Si vous voulez diffuser et publier mes articles, n’hésitez pas.

Prochaines audiences le 14 et 23 janvier. Fin du procès le 24 février. Venez si vous pouvez. La présence de témoins est indispensable. Si Assange meurt au court du procès, nous seuls pourrons témoigner de son état et donc agir pour la justice… De France chaque jour plusieurs trains et bus partent pour Londres de nuit ou tot le matin. C’est possible et pas très cher. Les cartes de presse ont priorité pour entrer dans la salle, des places très accessibles. Nous serons ensemble et nous organiserons l’entreaide.

Amicalement

Monika

 

« French activism », luttes intenses et audience fantôme à la Westminster Magistrate Court – Julian Assange comparait le 19 et le 20 décembre

Le monde entier sait maintenant que celle qui juge Julian Assange, Vanessa Baraitser, s’est fait traiter de « wicked witch », méchante sorcière, par un de nos camarades présents dans le public. C’est un épilogue qui aurait pu être jubilatoire pour nous, mais la joie du tacle public ne devrait pas nous faire oublier que la situation reste très grave : Julian Assange va mal, de plus en plus mal alors que l’heure fatidique du « final extradition hearing » approche et que la stratégie « gagnante » des avocats reste aussi mystérieuse pour nous qu’elle l’était 6 mois auparavant. De plus, l’audience fantôme, ultra secrète et sécurisée du 20 décembre pour l’ « ‘European Investigation Order », au cours de laquelle Julian a été amené physiquement et se trouvait donc à 20 mètres de nous n’était pas organisée pour nous rassurer. Deux jours cruciaux, durs et intenses qui nous ont épuisés. Mais deux jours de combat presque physique pour le voir,  pour lui transmettre notre soutien par les cris et les slogans, pour protester contre l’injustice de cette répression sans précédent sur un seul homme isolé et rendu malade par la torture.

Je suis arrivée une journée à l’avance à Londres avec l’objectif comprendre où et comment se passera la mystérieuse audience du 20 décembre annoncée par certains médias, mais sans qu’aucune information ne filtre par les avocats de Julian Assange ou par les sites de Wikileaks. Chemin faisant nous apprenons que le procès final de fin février aura lieu au tribunal de Woolwich, à coté de la prison de Belmarsh, dans une salle de 25 places et avec une grande galerie ouverte aux journalistes. Comment nous, associations des droits de l’homme et militants engagés pourront nous y rentrer sans que l’absence de places pour tout le monde ne dégénère en tensions et bagarres ? C’est un problème évident que le tribunal sous-estime largement. Car si le principe du « premier arrivé premier servi » est plus juste que les listes établies d’autorité par « Greeekemmy », il ne résout pas l’équation du manque d’espace. Et nous voulons être plus nombreux car nous savons que c’est justement la pression populaire sur les autorités britanniques qui peut sauver Julian Assange de l’extradition.

Cependant, pour une fois la Westminster Magistrate Court s’est donné les moyens de mettre en œuvre des  règles d’organisation dures mais justes. Notre équipe est arrivée entre 6h40 et 7h15. Le groupe de Greekemmy arrive vers 7h30 et les personnes seront plus diverses que d’habitude. A 9 heures nous entrons dans le bâtiment et nous voyons sur la liste du hall le nom de Julian Assange en tête des extradés salle 3. Devant la salle nous nous retrouverons devant la cheffe des huissiers du tribunal qui régule le flux avec le manager de la sécurité. Elle est très polie, nous fait placer en rang devant la porte et nous rassure que la file sera respectée alors que nous sentons parfois poindre une inquiétude dès que le mot « liste » est prononcé. Mais elle reste heureusement inflexible face aux tentatives de resquille.  Les journalistes sont beaucoup plus nombreux que d’habitude, ils s’asseyent sur les sièges du couloir et discutent. L’équipe d’avocats est complète : Gareth Peirce, Mark Summers et Edward Fitzgerald le barrister que nous ne pensions pas trouver aussi tôt à un simple « case management hearing ». Des assistantes portent de lourds dossiers au dos desquels est écrit « Assange ». Un homme âgé dont le visage m’est connu se trouve juste derrière nous. C’est Tarik Ali que Julian ,Assange avait rencontré en 2012 lors des mouvements Occupy Londres. Clair Dobbin arrive à la tête de l’équipe d’accusation, deux hommes jeunes et un plus âgés. Ils s’enferment dans une consultation room car l’audience ne commence pas tout de suite.

Les journalistes peuvent entrer à 9h30 au nombre de dix. Joseph Farell possède cette fois une carte de presse et entre avec eux. Les autres protestent. Je crains que le manager de Mitie ne sacrifie nos places à leur indignation et je m’engouffre avec mes collègues de Wikijustice aussi rapidement que possible dans le box du public. Alors l’huissière et le responsable de sécurité font encore entrer 5 journalistes qui se serrent debout. Les avocats et les accusateurs prennent place. Le secrétaire est le même que le 18 novembre et le 13 décembre.

Nous sommes assis au premier rang au milieu. Tarik Ali prend place à coté de John a ma droite. Derrière nous, alors que le groupe de « Greekemmy » clarifie qui prendra les 9 places restantes, je remarque une femme encore jeune, aux cheveux bruns et visage rond assise au fond. Elle s’avèrera être Stella Morris qui avait accompagné Julian Assange dans l’appartement équatorien de 2015 jusqu’à la fin. Je suis  intriguée par la présence à ses côtés d’un adolescent de 15 à 18 ans qui lui ressemble. Que peut bien faire un jeune dans ce genre de procès ?. A 10 heures Clair Dobbin est en place pour l’accusation au premier rang. Les trois hommes qui l’accompagnent s’asseyent juste devant l’écran ou Julian Assange va apparaitre. Je réussis après l’audience à coincer le plus âgé et lui demander quel est son rôle. Il sourit et répond « observers». Du côté de l’accusation ? Oui. C’est eux les « Américains » que nous recherchons. Tout est presque en place, les agents de sécurité nous disent d’éteindre les portables. Une femme dit qu’elle est handicapée et exige de pouvoir utiliser un ordinateur. Des journalistes protestent toujours contre des cartes de presse apparues à la dernière minute. Apparemment des médecins n’ont pas pu rentrer alors qu’on leur avaient certifié qu’ils rentreront avec la liste. L’atmosphère tendue et étouffante nous pèse. Le mécontentement est justifié, mais les agents de sécurité nous disent que la salle 1 est impossible car elle n’est pas équipée. Alors il faut faire venir Julian physiquement; ce qui n’aura pas lieu jeudi mais ce sera possible vendredi pour autre chose que son procès… Etranges, les priorités de ce tribunal !

Vanessa Baraitser entre à 10h, on se lève. Très vite apparait dans la vidéo de droite une pièce sombre avec 3 sièges bleus et l’écriteau « HMP Belmarsh Visitor court room 1 » avec la petite fenêtre. La juge demande : « officer, Mr Assange please ». Le gardien répond mais reste invisible. Une à deux minutes s’écoulent. On voit une silhouette passer derrière la vitre, une démarche un peu dodelinante, et Julian Assange apparait. Il s’assied comme avec peine sur le premier siège. On le voit à moitié. Baraitser lui dit de s’asseoir sur le siège du milieu ce qu’il fait. Il est cette fois filmé frontalement et de plus près, ce qui donne une impression de volume, et qu’il est moins maigre que le 13 décembre. Il porte un pantalon gris , une chemise claire et un pull bleu ciel qui semble un peu grand. Il porte ses lunettes et regarde par au-dessus. Ses cheveux sont courts, sa barbe courte. A côté de nous quand Tarik Ali il a vu Julian, il a crié d’effroi. Quelque chose comme «  Ce n’est pas Julian, ce n’est pas possible »! en nous regardant avec stupeur. Hélas oui, et depuis octobre, la cinquième fois nous commençons à nous habituer à ce spectacle brutal.

Baraister lui demande s’il entend, il répond« I think so », « oui je crois ».  La juge prononce elle-même son nom et sa date de naissance et lui demande de confirmer. Il dit «  Correct » et pose ses mains croisées sur ses genoux. Ses gestes sont lents, ses paroles sont lentes. Il fait un effort, pousse discrètement sa tête vers l’avant comme quand on a besoin de se rapprocher pour faire la focale. Cette fois il n’a pas de cernes noires autour des yeux, mais il parait épuisé et reste immobile et prostré. Comme toujours, une impression de tristesse et d’indignation nous envahit. Pourrons nous enfin un jour extérioriser cette colère ?

Vanessa Baraitser introduit le « case management hearing », la préparation des audiences finales d’extradition de fin février. Elle donne la parole à Fitzgerald. Alors une des femmes de derrière moi s’exclame qu’on n’entend rien. Elle se fait vertement rappeler à l’ordre par l’agente de sécurité qui menace de la faire sortir de force. Maitre Fitzgeral annonce que le « full extradition hearing » est prévu pour 5 jours mais il faudrait 3 ou 4 semaines ce qui n’est pas faux. Il souligne la « grande difficulté de voir Monsieur Assange ». Il reste très poli, il parle même d’être reconnaissant pour un délai supplémentaire. Tarik Ali nous regarde avec un air stupéfait. Je crois qu’il n’a jamais vu la « ‘justice » britannique ni les avocats de Julian Assange en action. Je lui fais comprendre du regard que tout cela nous indigne mais ne nous étonne plus….

Cependant Edward Fitzgerald pose enfin le problème politique : pour la première fois depuis le début de toute cette affaire il est enfin dit qu’il est interdit d’extrader pour des motifs politiques, or le motif est politique! Certes l’avocat de Julian Assange ne va pas jusqu’à demander la libération immédiate de son client… Il dit que 21 témoins doivent comparaitre, puis il évoque un résumé du procès espagnol pour l’espionnage dans l’appartement équatorien qui est visiblement utilisé comme vice de procédure pour contrer la demande d’extradition. J’ai du mal à en saisir la logique. Dire que le procès de Julian Assange n’est pas équitable du fait que les Américains ont eu connaissance de la stratégie de défense de leur cible ne me parait pas suffisant pour invalider le fait que les Etats Unis se donnent le droit de poursuivre un journaliste pour ses publications. Pis j’ai l’impression que cette idée persistante du  « vice de forme » évacue justement la question de fond : le scandale de cette l’exigence exorbitante de faire taire et punir quelqu’un qui n’est pas ressortissant américain et a publié à l’extérieur de leurs frontières. En 2011 les mêmes avocats étaient convaincus qu’ils et elles feraient tomber le mandat d’arrêt européen pour vice de forme. Or, ils ont perdu car le formulaire européen est politiquement rédigé de façon à ce que son écriture formelle ne puisse être contestée. C’est le vice de fond qui doit être examiné; c’est à dire le dossier complet dans le pays émetteur…Julian Assange avait perdu sa liberté et maintenant sa santé à ce jeu des vices de forme ratés.

A 10h10 Julian Assange s’approche de l’écran, essaye de suivre, pose les bras sur les cuisses, en position d’écoute et d’attention, pendant 1 ou 2 minutes. Fitzgerald propose le16 janvier comme date limite de remise des preuves. Mais Clair Dobbin s’y oppose. Lorsqu’elle parle Julian Assange a un mouvement de recul, ses épaules s’affaissent un peu plus, son regard se vide. Il n’arrive plus à se concentrer. Plus les discussions sur les dates avancent, plus il luttera pour ne pas dormir, comme quand on est épuisé et que la pression du sommeil est trop forte. Fitzgerald qualifie la date du 10 janvier de « guillotine » (j’ai bien aimé le terme  mais il aurait fallu que le fameux instrument se retourne ici contre les élites au pouvoir) : il décrit les énormes dossiers à étudier, 40 000 pages rien que celui de Chelsea Manning  ainsi que les documents du procès espagnol. Il faudrait de plus au moins un jour et demi pour prouver que la juridiction ne permet pas d’extrader pour raison politique. Selon moi, il faudrait plus. Julian Assange reste immobile comme s’il n’entendait pas. C’est déroutant et dérangeant de voir que l’accusé ne peut pas participer à son procès et qu’on s’habitue à ce que tout le monde parle à sa place. L’avocat apparait alors comme une espèce de tutelle sur le mode – il est malade donc l’avocat prend sa place. Les « Américains », eux, suivent les événements avec attention. Dans la bataille des dates, la juge ne fait même plus attention à Assange, elle parle aux avocats et à Clair Dobbin qui défend son beurre âprement. En l’absence de procureur britannique, la guerre est livrée directement entre les avocats de Julian Assange et les Américains. L’Etat britannique a abandonné même son rôle d’arbitre et abdiqué sa souveraineté… Julian Assange a l’air plus que jamais d’un humain en cage. Je vois qu’il fait un effort pour toucher les papiers du dossier qu’il tient en main, mais n’y arrive pas. Fitzgerald demande alors pourquoi le tribunal de Belmarsh a été choisi pour le procès mais la juge ne répond pas. L’avocat consulte alors l’écran vidéo du regard, mais Julian Assange ne dit rien et l’avocat s’en contente et n’insiste pas. Alors qu’il aurait pu parler plus fort et constatant la non réaction de son client dire « stop, on ne peut continuer ainsi ».

C’est encore plus flagrant pendant la pause à 10h30. Alors que la juge est partie la salle vaque à ses affaires. Les avocats se mettent à l’écart. On voit un petit carré dans l’écran qui montre ce que Julian Assange voit de la salle: il ne voit que la juge et la première rangée. La logique voudrait que ses avocats lui parlent, le saluent, rien, ils se sauvent de son champ de vision et il reste seul. Par contre les trois « Américains » se lèvent. Ils sont debout devant nous et l’observent d’un air gourmand et satisfait. On dirait qu’ils regardent leur gibier. Nous sommes derrière eux et nous voyons leur manège, leurs sourires entendus. On n’entend pas ce qu’ils se disent, mais ils sont visiblement contents. On bouillonne dans notre impuissance et on a hâte à ce que cette pause finisse. Car ceux qui ont le droit de parler à Julian Assange ne le font pas et nous on nous interdit de lui parler, de lui écrire et de lui faire le moindre signe.. On nous fait participer à l’isolement qu’on lui inflige. Enfin dix minutes plus tard le ping-pong des dates reprend. Tout le monde parle de « more flexibility » et sort son agenda : « ‘Pouvez-vous le 20 janvier, le 21? Non. Alors le 22 peut être? On va voir si ces dates sont possibles » . C’est déroutant pour nous.

Vanessa Baraitser se tourne enfin vers Julian Assange : « Vous allez comparaitre le 14 janvier pour le « call over hearing » et le 23 janvier pour la prochaine audience de gestion en video. » Personne ne se donne plus la peine de se demander qu’il ait droit à un procès physique. Baraitser ne lui demande même plus s’il a compris. Visiblement c’est tellement plié qu’elle s’en moque. Il ne réagit pas à l’annonce des dates. Puis il dit « J’ai entendu le programme ». J’entends distinctement le mot « schedule ». Sa voix est hésitante et hachée. C’est alors que John se lève et s’approche de la vitre. Sans crier il dit d’une voix forte « J’ai apprécié la pantomime avec madame le juge en « wicked witch », la sorcière méchante »… John prononce trois phrases. L’émotion est à son comble. C’est la stupeur. Le responsable de la sécurité entre dans notre espace et saisit John par le bras, mais John résiste. Je prends le bras du manager doucement pour le calmer…  Dans un espace confiné ce corps à corps face à la violence institutionnelle ultime est étrange. Julian a du entendre la début du cri de John avant que le garde ne se rende compte et éteigne l’écran. Baraister se sauve, Fitzgerald et Dobbin qui étaient en train de discuter ensemble sont stupéfaits, immobiles, bouches bées, face à face, le public est évacué, car on sent la peur que l’émotion soulevée par John ne dégénère.

J’ai tellement chaud que je suis prise de vertige et je perds l’équilibre en essayant de ramasser mes affaires. La sécurité m’entoure, ils ont peur qu’on invente encore une autre action. On se retrouve dans le couloir un peu sonnés. Je saisis l’Américain pour lui demander qui il est. Puis on voit Joseph Farell, Tarik Ali, Stella Morris enfermés dans la consultation room numéro 2. Le jeune garçon y est aussi assis par terre. Lorsqu’il sort j’essaye de comprendre son rôle dans cette affaire. Il me dit qu’est étudiant et fait une recherche avec Gareth Peirce. Le plus dur, l’audience du lendemain, nous attend encore.

Mais le soir je peux me détendre, me disant qu’avec un peu de chance Vanessa Baraitser rentrera chez elle, retrouvera ce soir sa famille et pensera qu’elle s’est fait à quelques jours de Noel traiter de « wicked witch » « méchante sorcière » par un homme lucidement désespéré. Peut être qu’elle en aura assez d’endosser ce rôle et accorderait le plus beau cadeau à Julian Assange : la justice…

Nous comprenons que les médias qui présentent l’audience de demain comme le procès de la « legal team » contre l’entreprise espagnole Undercover Global accusée de violation de vie privée et de corruption ne nous disent pas qui est exactement le plaignant. Nous ne savons pas si Julian Assange est plaignant ou témoin. Le lendemain sera encore une journée intense et active, passée à arracher les informations cachées par le Cour et à essayer à tout prix d’apercevoir Julian dans le fourgon des prisonniers et dans la salle d’audience. Assurément un moment important de son procès dont nous ne savons rien avec certitude et dont les journalistes seront absents.

Vendredi 20 décembre 2019. Retour à la Westminster Magistrate Court sous une pluie battante. C’est peut être aujourd’hui le vrai procès, au contraire de la pantomime d’hier si bien caractérisée par John. Naturellement, comme dit Maitre Goscinski, il suffirait que la juge soit courageuse et ordonne par la force de loi de son indépendance l’arrêt des poursuites et la libération immédiate de Julian Assange et on pourrait lui préparer une jolie Fête de Noel familiale et chaleureuse pour son premier jour de vraie liberté. Rêvons, mais pas trop tôt. Où est passé l’indépendance de la justice en Occident ?

Ce 20 décembre la Cour ne nous est pas hostile mais nous a préparé dissimulations et chausses trappes. A 7h15 plusieurs journalistes attendent déjà devant la porte métallique de la rue latérale par laquelle arrivent les accusés prisonniers. Ils sont sûrs de leur scoop, Julian sera là. Moi je pense au tribunal espagnol où ce procès pour corruption n’est pas censée être secret mais tout à fait public et accessible. Il doit être possible dans ce tribunal de voir Julian Assange parlant d’ici en vidéo vers l’Espagne. Nos camarades nous rejoignent et dès 8 heures des voitures noires sortent en convois du tribunal, puis des fourgons des entreprises Serco et Geoamey. On se déchaine. A chaque fois on se dit que Julian peut être dedans. Les photographes se ruent sur les hublots des fourgons, flashent, me bousculent alors que j’essaye d’atteindre les mêmes hublots avec notre message « SOS received ». Il pleut, tout est mouillé, il y a une grosse flaque devant la porte et chaque fois qu’une voiture passe on est arrosés d’eau sale. Le troisième fourgon s’arrête dans la rue avant de tourner vers l’entrée. On se précipite. Un des journalistes me pousse tellement fort que je tombe dans le caniveau. On tambourine sur la voiture. Je colle le message sur le hublot au-dessus de ma tête, un journaliste me dit de dégager, je réponds « Non. Notre message est important aussi ». Alors je remarque que les photographes regardent leur photo après avoir shooté et voient donc la tête du détenu dans leur écran. Aucun n’est certainement Julian sinon ils seraient vite partis avec leur butin. Mon papier est tellement mouillé qu’il colle à la vitre du fourgon. Je réfléchis si je ne dois pas le laisser là entrer dans le tribunal avec la voiture. Car alors peut être que le message va rester et Julian pourra le voir, ou quelqu’un lui donnera le message…Justement une des gardiennes actionne la porte qui remonte comme un store. Elle nous parle, nous dit qu’elle l’a vu, qu’elle l’aime bien… On entre directement dans le tunnel discuter avec elle, on est donc à l’intérieur du tribunal. Les agents de sécurité privée ne lui sont pas hostiles, ils et elles doivent juste gagner de quoi vivre.

Entre temps toute notre équipe est arrivée et on décide d’aller à l’intérieur. On a la petite queue avec le public habituel des extradés, leurs familles et leurs avocats. Il est bientôt 9h30 et les listes sur les panneaux d’affichage sont toujours celles de la veille. On se partage le travail, on va à tous les étages, on vérifie toutes les portes. Des rumeurs courent que Julian est arrivé avec une voiture noire, que l’audience sera salle 1… Devant cette salle je discute avec une femme polonaise dont c’est le propre procès d’extradition. Elle va se défendre seule et elle est inquiète. Ca parle beaucoup Polonais dans la salle d’attente dont les sièges sont remplis, des fêtes de Noel et du retour au pays. J’ai l’impression d’être dans un endroit très familier. Enfin un employé sort du bureau changer les listes. Celle de la salle 3 affiche pas moins de 40 personnes à extrader ! Je suis l’employé au deuxième et au troisième étage dédié aux « crimes ». Sur la porte de la dernière salle 10 je lis : « EIO Home Office ». European Investigation Order, Mandat d’Enquête Européen, et Home Office, ministère de l’intérieur britannique : c’est là.

La lecture de la directive européenne de 2014 m’apprend que ce nouveau dispositif, qui n’existait pas quand Julian Assange était poursuivi en 2010, permet d’interroger un suspect, une victime ou un témoin qui habite dans un autre pays européen par une procédure accélérée via un simple formulaire par vidéo ou par un ordre de transfert dans le pays émetteur. Le pays exécutant, ici la Grande Bretagne, doit amener à l’audience des représentants de son institution chargés d’exécuter la procédure, ici le Home Office. Les délégués du Home Office sont aussi chargés, article 24, point 5 de la directive, de veiller au respect des droits fondamentaux du citoyen interrogé, ne riez pas s’il vous plait.

Mais qui est le plaignant, qui est l’accusé ? Nous attendons devant la porte avec une autre militante et deux avocats. C’est alors que la femme brune qui fait les rapports sur les audiences de Julian Assange sous le nom twitter de Naomi Colvin apparait avec une autre jeune femme. A 10 heures nous entrons, salle 10 il n’y a que le juge et le greffier ainsi que les avocats des affaires numéro 1 et 3. Bientôt un jeune homme arrive comme accusé dans l’affaire numéro 1. Son cas est ajourné car il n’y a pas de procureur. Son avocat n’est pas content mais ne peut rien dire, il sort avec son client. Je m’efforce de bien comprendre pour ne rien perdre de ce que le juge et le greffier marmonnent entre eux, j’ai bien trop peur de rater le EIO. Mais il apparait vite que ce ne peut pas être ici que Julian va apparaitre, la salle est vide, il n’y a ni gardiens ni agents de sécurité. On persévère néanmoins tout en comprenant que rien ne sera public et qu’on ne nous dira pas la vérité. L’affaire 3 est reportée aussi. Alors que le juge est parti, je demande au greffier « ou est le EIO » ? « Salle 4 » me répond-il. En sortant je vois Naomi Colvin et son amie désorientées. Je leur crie « salle 4 » et je cours au premier étage.

Est-ce un vice de procédure que l’audience fantôme est annoncée publique salle 10 et reportée oralement en catimini salle 4 ? C’est possible.. Pourquoi ce secret? Pour qu’on ne sache pas ou est Julian qui normalement devrait comparaitre libre? La salle 4 se trouve au bout du couloir dans l’aile gauche, juste au-dessus de la porte blindée ou les fourgons amènent les prisonniers dans l’espace de derrière, le back office, à coté des toilettes femmes. Elle est vide et fermée. On ne peut communiquer avec les militants restés dehors à cause du brouillage des portables. On attend, on discute. Il est 11h passées quand brusquement on aperçoit dans la consultation room 2 en face de la salle 4 Stella Morris, la jeune femme brune avec le garçon adolescent d’hier. Je ne sais pas exactement qui est Stella Morris, les articles parlent d’encore d’une avocate de Julian Assange mais j’ai des doutes. Rares sont  ceux qui disent la vérité sur leur rôle dans cette affaire. Alors un homme en costume sort de la pièce suivis par les deux protagonistes. C’est Fidel Narvaez, l’ancien consul, puis premier secrétaire de l’ambassade de l’Equateur sous Raphael Correa. J’ai été en contact avec lui par les réseaux de gauche. Je suis néanmoins surprise. Est-il le plaignant en tant que responsable de l’administration des locaux équatoriens espionnés ? Et Stella Morris la victime témoignant en tant qu’ancienne employée ? Le huis clos c’est à cause de la minorité de son fils à l’époque des faits ? Mais pourquoi le cacher ?

Nous demandons poliment à Monsieur Narvaez si et quand Julian Assange va comparaitre. A 14h30 nous dit-il. Des agents de sécurité font courir le bruit que c’est plié, qu’il est parti, ou qu’il ne va passer qu’en vidéo. Notre ami John arrive alors et nous dit que ça y est, Julian était arrivé. Les photographes en sont certains car ils ont fait la photo. C’était un grand fourgon, le plus grand de tous. Il est midi, nous ne pouvons pas espérer arracher Julian aux entrailles du back office du tribunal. Nous ne pouvons qu’espérer qu’ils vont lui donner à manger et  tout le monde part déjeuner. Nous revenons à 14 heures et croisons Stella Morris dans les couloirs qui refuse de nous donner la moindre info. Le couloir est rempli de Polonais et de Roumains en attente de jugement, on s’assied avec eux, puis petit à petit le couloir se vide, les affaires sont expédiées. Un peu avant 14h30 Fidel Narvaez arrive et attend devant la salle 4. Je me présente et je lui parle de l’audience d’hier, que Julian va mal… Il reste très évasif. L’affaire est très très compliquée. Mais aujourd’hui qui est le plaignant exactement? On ne comprend rien, pourquoi le huis clos, pourquoi pas la salle 10, alors Julian sera là ou non? On espère juste que Julian Assange est bien témoin et pas encore accusé de quelque chose. L’idéal serait qu’une plainte en son nom soit rédigée pour violation de SA vie privée.

Monsieur Narvaez reste à attendre sur un des sièges du couloir à étudier un dossier. Vers 15 heures je reconnais Alistar Lyon, du cabinet de Gareth Peirce qui fait les 100 pas devant la salle 4. C’est le seul avocat auquel Julian Assange parlait pendant sa comparution le 21 octobre. Je n’attends pas, on doit au moins savoir ce qui se passe. Il est gentil, nous discutons de la situation sociale et de la vie en France. Oui, il est aujourd’hui avocat de Julian Assange. C’est tout ce qu’il peut me dire. Je me dis qu’au moins Julian ne sera pas tout seul. Quelques minutes plus tard, vers 15h10, la salle 4 est éclairée et on s’affaire à l’intérieur. Le manager ouvre la porte et tout va très vite. Alistar Lyon entre précipitamment dans la salle, puis un homme et une femme genre fonctionnaire sortent d’une salle de consultation et le suivent. Le « Home Office » disent nos amis. Le manager de la sécurité de Mitie verrouille la porte de la salle tout en restant à l’intérieur. Mais juste avant que deux agents de sécurité ne bouchent toute la vue en se plaçant devant la porte, Julie a eu le temps de voir Julian. Elle a pu le voir debout, cheveux blancs coupés, plutôt rasé et sans lunettes . Il parle à Lyon face à face avec derrière la vitre du box de droite. Moi je vois bien Lyon mais plus à droite la sécurité bouche la vue. Dès que Julian sera assis on ne verra plus rien. Mais on reste, dans l’espoir de le voir et pour faire pression.

Julian est derrière deux portes et une vitre mais à peine à 20 mètres de nous. C’est horrible et rageant de le savoir si près. Alors qu’on pense aux murs infranchissables de Belmarsh, à la prison plus secrète ou il est si bien dissimulé au monde. Il n’y a pas de mots pour décrire notre impuissance. C’est étrange, car en même temps toute notre soumission n’est que volontaire. Je connais la profession d’agent de sécurité, boulot de prolétaires. Personne ne prendrait de risques. Il suffirait qu’on les bouscule, ils s’effaceraient… Mais les autres derrière ferait disparaitre Julian dans les profondeurs des oubliettes de béton et nous serions interdites d’entrée ou expulsées…

Alors on reste campées devant la porte  devant les hommes dans l’espoir que notre présence va se sentir à l’intérieur de la pièce. Tant d’efforts de la part du système pour soustraire à la vue des proches un homme si affaibli que la veille il n’a pas pu dire ni son nom ni s’il a compris ce qui se joue dans son sort… A ce moment-là les proches c’est nous, il n’y a plus personne d’autre pour être proche de lui. Et dehors les militants dont la clameur monte. De plus en plus fort. La salle jouxte le mur donnant sur la rue du rassemblement. Il est possible que Julian entende « Free Free Julian Assange », tellement les voix sont sincères et puissantes. Les agents de sécurité bougent d’un pied sur l’autre, ils sont fatigués. Je guette des signaux d’ennuis pour pouvoir agir. Ils plaisantent sur la clameur militante en parlant de « french activism ». On ne sent pas d’hostilité de leur part, mais un espèce de devoir résigné par la nécessité de garder son boulot. On essaye de les amadouer. On leur demande de juste nous permettre de voir Julian à travers la vitre du sas, le manager de la sécurité a de toute façon verrouillé la porte de l’intérieur. Quels sont les secrets de l’audience? Aucun journaliste ne pourra rien écrire dessus de vrai. Est-ce que cela dure aussi longtemps parce qu’il faut un interprétariat? Comment Julian peut-il aujourd’hui se concentrer pendant deux heures d’interrogatoire alors que la veille il n’arrivait pas à finir une phrase sans hésitation ? L’audition d’un homme dans un tel état ne peut pas avoir de valeur juridique. Il faut arrêter cela, le relâcher er le soigner dans un endroit de confiance pour qu’il soit apte à se défendre lui-même. C’est ce que Wikijustice réclame depuis le début…Comment se fait il que le juge espagnol ne voit pas l’état de santé déplorable du témoin ? Il y a-t-il un juge anglais dans la salle ou est-ce que le Home Office joue le rôle de l’autorité judiciaire ? Que de questions. Et pourquoi le manager de la sécurité privée Mitie assiste à un procès qui se déroule à huis clos ? Dans un huis clos aucune personne autre que les justiciables concernés et l’autorité judiciaire ne peuvent être présents. Je le vois à coté du garde en pull bleu foncé s’activer à déplacer des meubles. A la fin c’est lui qui ouvrira la porte métallique pour laisser sortir le fourgon ou Julian Assange est enfermé. Le tribunal sera vide à 17 heures, lui restera faire des heures supplémentaires consciencieusement. Fidel Narvaez est parti vers 16h30 sans avoir attendu la fin.

Car l’audition dure deux heures. C’est lourd pour nous aussi car nous sommes épuisés, mais toujours à l’affut de la moindre possibilité de le voir. Les militants continuent de faire monter la voix de la protestation. Puis brusquement le manager déverrouille la porte, les agents de sécurité s’effacent et je vois Alistar Lyon sortir en trombe de la salle et courir vers les locaux du secrétariat à l’autre bout du tribunal. Il a le visage défait de quelqu’un qui a fait face à une mauvaise nouvelle. On s’inquiète pour Julian. Puis sort un homme âgé qui pouvait être l’interprète et les deux fonctionnaires du Home Office. Les agents nous signifient que c’est fini sans formellement nous chasser. On ne veut pas rater la sortie de Julian. On sait qu’ils l’ont déjà évacué par derrière. Il faut très vite dire aux militants de guetter le fourgon.

Il pleut, il fait noir, mais comme on sait qu’il est juste derrière la porte métallique il faut crier fort car il peut entendre. On crie, des militantes chantent. L’ambiance est forte et solidaire. Il y a un camion de police et 6 ou 7 flics devant la porte. Ils n’ont pas l’air agressifs et nous disent que c’est pour nous empêcher d’entrer dans le bâtiment. Ils savent qu’on ne va pas le faire, tout le monde est bien trop obéissant ici. Notre attente dure encore une heure. Ils attendent que le trafic du vendredi soir passe pour que le fourgon ne soit pas coincé dans les embouteillages? Ils veulent le faire passer par l’autre porte de derrière? On ne sait pas. Puis lentement la porte se soulève. D’abord deux fourgons entrent vides, puis sortent, un petit et un grand  tous deux SERCO. On se rue dessus, exténués et en rage. Surtout sur le deuxième dont tout le monde dit que Julian est dedans. On est dix à tambouriner sur le blindage en hurlant « ‘we are with you », « free Julian. ».de toutes nos forces. Les photographes flashent l’intérieur. Une militante, Cynthia nous dira que Julian Assange était assis du coté ou elle se tenait et qu’elle a pu le voir quand le photographe a flashé et éclairé l’intérieur.

Les fourgons quittent le bâtiment et les policiers ne nous empêchent pas de les suivre dans la rue, alors on les course à pieds. Il y a des travaux, le convoi est bloqué 100 mètres plus loin. On court encore rattraper le fourgon! On essaye d’ouvrir la porte… Dans des temps plus anciens les gens auraient été plus offensifs mais, qui oserait faire aujourd’hui ce que faisait les Résistants des années 40 et les militants des années 60 et 70 ? On est épuisés mais on l’a accompagné jusqu’au bout. Julian Assange n’est pas seul. J’espère qu’il a pu emporter derrière les murs de la prison le  cri de notre indignation et de notre solidarité.

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Publié par le janvier 2, 2020 dans civilisation, SOCIETE, textes importants

 

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A des amis : quelques faits sur le Venezuela et les futures présidentielles

Le président vénézuélien Hugo Chavez et Jean-Luc Mélenchon, le 6 juillet à Caracas, lors du Forum de Sao Paulo.

ce matin, un inconnu sur facebook a lâché sur le ton de la rumeur villageoise  » je connais  des « gens de gauche » au Venezuela qui souhaitent le départ de Chavez, c’est un pitre, un bouffon ». j’ai siffloté: « au village sans prétention, j’ai mauvaise réputation »… le forum du village global ressemble plus à clochemerle qu’à autre chose et c’est navrant…  Ce « corbeau » du café du commerce  avait adopté tout le vocabulaire de la presse d’opposition vénézuelienne qui ne fait pas dans la dentelle dans l’injure et le racisme… le tout assorti du je connais quelqu’un qui connait quelqu’un…

Alors moi je connais le Venezuela. Je suis loin même trés loin d’éprouver pour ce pays et même pour Chavez l’empathie que je ressens pour Cuba, son peuple courtois et raffiné, cultivé. Caracas est une ville laide, sale, invivable… Et après…

Chavez n’a cessé d’affronter les scrutins démocratiques et il a changé la vie de son peuple

Mais  je ne connais aucun vénézuélien « de gauche » qui pense ainsi sauf les stipendiés de la CIA et ceux qui appartenaient au pétrole et qui se faisaient un fric pas possible en le vendant aux majors du pétrole. Toutes les forces syndicales, sauf un groupuscule complétement isolé et qui est directement lié aux Etats-Unis, soutiennent Chavez. Autre chose est son parti. le Venezuela est un immense pays avec des provinces dont certaines sont encore détenues par les grands propriétaires de l’opposition anti-chavez en particulier à Zulia et ces derniers aidés de la mafia des narcotrafiquants font régner la terreur… Il y a dans l’Etat le plus riche celui de Miranda un gouverneur qui tente de jouer un centre gauche et qui a quelques accointances avec les grands propriétaires mais aussi certains syndicalistes, le tout trés proche des nord-américains. Il y a eu des primaires entre eux pour présenter une opposition unifiée et c’est le gouverneur de Miranda, Henrique Capriles qui sera opposé à Chavez. En tant que figure rénovée de l’ opposition, moins caricaturale que l’antichavisme haineux et primaire, nul doute que les Etats-Unis aient pesé dans le sens d’une telle candidature. Comme par hasard Zulia et Miranda sont des zones aux richesses pétrolières et minérales visées par les grands monopoles et compagnies pétrolières.

Il y a également des notables apparternant au parti de Chavez qui peuvent être corrompus.

Mais sur le fond Chavez non seulement est estimé de son peuple qui le soutient et vote pour lui à toutes les élections reconnues comme transparentes par toutes les commissions internationales, il a littéralement changé leur vie.

Pratiquement toutes les années il y a eu des réferendum, des élections et Chavez les a emportées et tout indique qu’il en sera de même à ces présidentielles. Tout simplement parce qu’il a effectivement changé le Venezuela, la vie politique y était si corrompue que quand Chavez s’est présenté la première fois, il n’y avait que lui, un ancien officier putschiste et une miss Venezuela comme candidats, les partis traditionnels s’étaient écroulés sous le poids des scandales. Les gens crevaient de faim, étaient humiliés et allaient piller les magasins pour se nourrir

. La rente pétrolière était appropriée par les cadres du pétrole qui en échange livraient le pétrole vénézuélien aux majors nord-américaines.

Chavez a changé beaucoup de choses, il en reste pas mal encore à transformer mais la rente pétrolière a été utilisée par le peuple et pour le peuple, des institutions démocratiques de gestion locale ont été mises en place.

La liberté de la presse est totale et les insultes de cette presse liée aux monopoles espagnols sont indignes, racistes, immondes… De surcroît Chavez a apporté à toute l’Amérique latine des aides en particulier avec l’aide des cubains en matière de santé (opération miracle) d’éducation (opération yo si puedo) et l’alphabétisation du Venezuela est une grande réussite… De surcroit et c’est ce qui lui vaut la haine des USA et des capitalistes du pétrole, il a  imposé une rénégociation des contrats pétroliers et entraîné l’OPEP avec lui. Mais on va bien voir si Chavez est ou non détesté par son peuple, il va y avoir des élections libres ouvertes…

La lutte des Etats-Unis contre le Venezuela

A  propos de ces élections présidentielles qui auront lieu à la rentrée, je signale que non seulement elles seront transparentes mais le candidat de l’opposition bénficie trés officiellement du soutien financier des Etats-Unis. Ce qui est tout de même quelque chose qui n’est pas ordinaire et qui devrait soulever nos interrogations. Imaginons qu’il y ait dans le budget des Etats-Unis une ligne officiellement consacrée à soutenir l’opposition de droite en France… Et bien cela se passe comme cela en Amérique latine, à Cuba depuis longtemps et contre Chavez désormais.

Le président Barack Obama a présenté au Congrès un budget de 3 700 milliards pour 2012, le plus élevé de l’histoire des États-Unis. Il prévoit d’importantes baisses dans les programmes sociaux et dans les emplois publics fédéraux partout dans le pays, mais il prévoit une ligne budgétaire pour le financement des organisations anti-chavistes du Venezuela.Sur ces 3 700 milliards :  670 milliards iront au Pentagone, dont le budget continue de croître ;75 milliards aux différents services d’intelligence ;55,7 milliards au département d’État et à l’Agence états-unienne pour le développement international (USAID) (1)

Pour la première fois dans l’histoire récente, le Foreign Operation Budget, qui relève du département d’État, détaille ouvertement le financement des organisations anti-chavistes à hauteur de 5 millions de dollars.

Alors je voudrais que les insultes qui pleuvent sur Chavez soient au moins un peu réparties sur l’élégant président des Etats-Unis qui considère ce genre d’aide aux oppositions et fabriquants de coup d’Etat comme relevant du budget des Etats-Unis. Pour autant je n’ai pas envie que les Républicains l’emportent aux Etats-Unis.

OUI l’extrême-droite tente de prendre pied en Amérique latine

Oui en France, l’extrême-droite, les conspirationnistes, les antisémites veulent s’approprier Chavez. Mais c’est bien là la specificité de toutes les instrumentalisations, partir de faits réels pour les tirer vers la défense de causes étrangères à l’intérêt des peuples. Incontestablement il se passe au Venezueka et dans toute l’Amérique latine des choses importantes en matière de souveraineté des peuples, de l’appropriation de leurs ressources, de la redistribution de celles-ci. La gauche, celle qui cherche réellement une issue, doit savoir les reconnaître et ne pas les laisser dévoyer par une propagande infame qui utilise ce progrès pour tenter d’imposer un néo-nazisme.

Comme les mêmes utilisent la lutte pour la paix que nous ne menons pas pour faire avancer leurs idées nausabondes et leurs soutiens des tyrans. Comme les mêmes utilisent ce que subissent les Palestiniens et la politique israélienne pour faire avancer le réhabilitation du nazisme.

L’Iran joue un rôle sur lequel j’ai plusieurs fois insisté mais si l’on voit bien la manière dont ce pays finance l’extrême-droite négationniste on a tendance à ignorer les principaux soutiens du fascisme islamiste que sont l’Arabie saoudite et le qatar… qui sont en train de modeler avec l’appui de l’occident tout le proche orient et à s’attaquer au Maghreb.

Il faut regarder de près les nouveaux rapports sud-sud, les politiques en faveur des souverainetés nationales menées par les pays émergents du BRIC (Brésil, Russie,Inde et Chine), être inconditionnel de personne mais ponctuellement appuyer  ce qui défend paix, souverainté des peuples sur leurs ressources et dénoncer qui utilise des prétextes pour se les approprier en favorisant partout les guerres.

Il faut arrêter de caricaturer les forces en présence et partout rester axés sur la souveraineté et le développement endogène, au profit des peuples et de leur émancipation collective et individuelle, de ce point de vue Chavez représente une force positive.

Donc prenons l’habitude premièrement de mener ensemble des combats ponctuels sans prétendre imposer aux autres l’ensemble de notre conception du monde… Apprenons à discuter des faits dans le respect les uns des autres.

Danielle Bleitrach

(1)  vous n’êtes pas obligés de connaître ce que révèle ce budget et le détail des opérations et l’exemple de USAID notée ici nous permet de mesurer que même l’aide « humanitaire » peut être l’instrument d’une domination sur la souverainté d’un pays : L’Agence des États-Unis pour le développement international (United States Agency for International Development ou USAID) est l’agence indépendante du gouvernement des États-Unis chargée de développement économique et de l’assistance humanitaire dans le monde. Elle a  été créée par Kennedy dans l’esprit du plan Marshall mais en fait sous couvert de l’humanitaire et de la démocratie, elle soutient l’opposition qui convient aux Etats-Unis contre les chefs d’Etat qui lui déplaisent. De surcroît elle agit pour les trusts de l’agroalimentaire et gros producteurs d’OMG. Selon l’ONG Les Amis de la Terre, les autorités américaines utiliseraient « la faim à des fins commerciales et politiques, au bénéfice des grosses industries agroalimentaires », notamment par le biais de l’USAID pour livrer du « maïs transgénique dans les pays d’Afrique australe »

 
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Publié par le juillet 22, 2012 dans Uncategorized

 

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Parlons terrasses…

Parlons terrasses…

Souvenez-vous du  film d’Ettore Scola qui annonçait le début de la fin en Italie mais aussi en Europe, ce fut un mouvement général, une débâcle contrerévolutionnaire y compris sur le plan intellectuel: dans le film la Terrasse, des intellectuels de gauche amers et désabusés se réunissent sur une terrasse pour étaler leurs désillusions. J’ai vécu une soirée à Rome, que j’ai raconté dans un bouquet d’orties, une nuit  où les têtes pensantes du PCI préparaient leur sortie du communisme. Ce qui se disait aurait fait ressembler Roccard à un affreux gauchiste,  tout à fait le film de Scola, c’était en 1986.Nous avons quitté ce lieu avec  Eric  Hobsbawm et nous nous sommes promenés dans la nuit sur le forum, la conversation est tombée sur un film de Straub et Huillet qui débutait par l’histoire d’un Résistant communiste caché là… le temps des maquis étaient bel et bien révolus, plus personne ne songeait à résister. Tout autour de moi ça tombait comme à gravelotte, ils se ruaient tous vers la social démocratie et quittaient un PCF en perte de vitesse. Ce devait être pareil partout à ce que me racontait Eric Hobsbawm et quand je vois aux actualités le reponsable actuel du parti travailliste Miliband je ne puis m’empêcher de songer à son père un marxiste de choc Ralph Miliband.

Par quelle folle naiveté me suis-je obstinée?   Le fait est que quel soit le choix personne n’en ressort bien frais… Peut-être que le moins pire a été de cultiver son jardin, de mener à bien des recherches encore que quand on voit ce qui est attendu de l’Université un doute vous saisit, la débâcle est bien globale et il y avait peu de voies qui permettait d’y échapper…

Quand je mesure la crise qui est en train de déferler sur nous, je me dis que je me suis débattue pour pas grand chose. Ce n’est d’ailleurs pas une nouvelle crise mais bien celle qui a débuté en août 2007, souvenez celle dite des subprimes, à la seule différence près que jadis c’étaient le ménages nord américains les plus pauvres maintenant ce sont les Etats…mais c’est la même crise systémique, un vague, un tsunami qui ne cesse de creuser son élan… On nous parle beaucoup de la Grèce, de l’invention d’un FMi régional, d’une gouvernance européenne économique et cependant toujours est attendu l’arbitrage des marchés… En revanche l’épée de Damocles de la faillite étatique est toujours aux Etats-Unis. la Chine poursuit ses experimentations, la ville de Chongqing, territoire-ville, qui s’était récemment illustrée par une mafia et par la plus caricaturale des corruptions est en train d’être le lieu où la « gauche » chinoise met en oeuvre une politique destinée à freiner les inégalités sociales. Il est question de combiner Mao et Deng Xiaoping et surtout comme cela s’est fait à Shangai, le chef du parti est entré dans la course à la magistrature suprême, former des cadres, les envoyer sur le terrain y faire leurs preuves, l’un part au Xinjiang mater les révoltes ouïgoures, l’autre exécute les corrompus, fait des expériences de réduction des tensions sociales… C’est passionnant et témoigne de beaucoup de pragmatisme et de vitalité. Mais je n’ai plus envie de parler de ça, ce fut le temps de Chabgement de société… A quoi cela servirait il n’y a plus de peuple pour s’en emparer…

Donc parlons de ma terrasse, voici des photos du lieu où je vis, où je lis, écris…
Danielle Bleitrach

 

 

 

 
 

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