L’Etat va reprendre l’exploitation jusque-là assurée par Arriva, la filiale de Deutsche Bahn. C’est la deuxième nationalisation en deux ans, alors que le gouvernement prépare une remise à plat plus large du système de franchises mis en place au moment de la privatisation du secteur.


Les trains opérés par Arriva dans le nord de l’Angleterre transportent 108 millions de passagers par an. (AFP)
L’Etat fait son grand retour dans le secteur ferroviaire outre-Manche. Alors que la privatisation du milieu des années 1990 est particulièrement critiquée , le gouvernement de Boris Johnson a annoncé mercredi la renationalisation des lignes ferroviaires du nord de l’Angleterre, que gérait jusque-là la filiale de Deutsche Bahn Arriva, et connues pour une qualité de service que le ministre britannique des Transports Grant Schapps a qualifiée de « cauchemardesque ».
C’est la deuxième nationalisation en deux ans, après celle des lignes de l’est de l’Angleterre à la mi-2018, jusque-là opérées par Virgin Trains East Coast. Et d’autres pourraient suivre, comme la South Western Railways, a prévenu le gouvernement.
La privatisation du secteur, qui a donné lieu à la création de 16 franchises régionales confiées à des opérateurs privés ou non (dont la SNCF), est loin d’avoir donné les résultats escomptés . Retards, annulations, surcoûts et autres inefficiences : beaucoup d’opérateurs peinent à atteindre les revenus auxquels ils se sont engagés pour décrocher leur franchise. Le matériel roulant tarde à être renouvelé, et le réseau ferré appartenant à la société publique National Rail, à être modernisé.
Geste politique fort
Le gouvernement se prépare ainsi à revoir tout le dispositif. L’ex-directeur général de British Airways, Keith Williams, doit bientôt rendre un rapport très attendu, qui devrait préconiser de mettre à bas le système de franchises, sans aller pour autant jusqu’à une complète renationalisation.
L’Etat jouera son rôle d’« opérateur en dernier ressort » sur les lignes du nord en reprenant la main sur leur exploitation au 1er mars, soit 5 ans avant la fin de la concession accordée en 2016 à Arriva. Il a déjà promis d’agrandir 30 gares pour qu’elles puissent accueillir des trains plus grands, de veiller à une meilleure propreté des wagons ou encore de continuer à remplacer le matériel roulant. Invoquant la vétusté des infrastructures et les grèves, mais reconnaissant qu’« un nouveau plan est nécessaire », Arriva a dit « comprendre la décision du gouvernement ».
Il s’agit d’un geste politique fort vis-à-vis des élus et des électeurs des anciens bastions travaillistes du nord de l’Angleterre qui ont largement voté conservateur aux élections législatives de la mi-décembre. Boris Johnson, qui leur a promis d’investir dans les infrastructures, joue sur du velours : les retards sont particulièrement nombreux sur ces lignes desservant des villes comme Manchester, Leeds, Liverpool et Newcastle (seuls 50,6 % des trains ont été à l’heure entre le 10 novembre et le 7 décembre, contre 62,2 % en moyenne au niveau national) et les annulations aussi (7,3 % des trains contre 4,7 %).
Alexandre Counis (Correspondant à Londres)