On a dit que le coup d’Etat ukrainien fomenté par les USA et appuyé par quelques pays européens n’avait aucune incidence sur les élections européennes…Et pourtant, outre le fait qu’une grande partie de la France demeure très réservée sur une expédition lointaine contre la Russie et le moins que l’on puisse dire est que le bellicisme de notre gouvernement ne lui a rien rapporté…
Il est possible qu’il n’y ait pas eu d’incidence, mais vous devriez regarder sans a priori les effets: non seulement au plan international POutine sort renforcé, l’intégration en Eurasie avec la CHine, et avec les Brics a été accélérée, mais regardez ce nouveau Parlement de ce point de vue, ceux qui contestent l’opération ukrainienne, et ils sont très divers ont gagné en nombre. Ce qui correspond également à une fragmentation de l’Europe accrue… Les adversaires plus ou moins déclaré de cette expédition n’ont pas perdu de position mais en ont gagné. Et le fait que cela n’ait pas été au centre des débats montre l’affaiblissement de fond d’un certain type d’Europe qui pourtant demeure celle qui dirige mais de plus en plus loin des lignes forces qui frappent par leur diversité.
Il y a donc une contradiction à l’œuvre entre l’accélération de la vassalité dans le marché atlantique et cette fragmentation très diverses qui va de forces opposées sur l’échiquier au refus de certains pays de payer le prix des ambitions otanesques en matière d’énergie… Des forces opposées! En effet qui peut comparer le PS français complètement vassalisé aux Etats-Unis et qui de fait s’est construit dans l’anticommunisme et les 30 députés italiens appartenant à la même formation européennes, mais qui eux sont nés de l’ancien parti communiste? Ils sont nettement moins chauds pour ce genre d’aventure… Ou encore la jeune gauche radicale grecque et allemande opposés aux communistes grecs et portugais, mais s’entendant avec eux sur la question de l’OTAN et de l’Ukraine… sans parler des souverainistes, ceux issus du gaullisme et de ses adversaires le Front national à l’autre bout de l’échiquier qui tente un rapprochement avec Russie unie de Poutine… Le tout tentant de vaincre le bipartisme imposé à l’américaine… et se disputant la colère des peuples sans jamais l’exprimer réellement…
Bref l’hypothèse que je défend,s qui veut que nous assistons l’ébranlement des institutions issues de la seconde guerre mondiale -avec au centre l’hégémonie des Etats-Unis s’appuyant sur les anciennes puissances coloniales-, est en train de se vérifier, chaque assaut affaiblit un peu plus le système et accentue la crise politique, économique et culturelle… ce sont comme l’a dit Marx dans un texte célèbre, les superstructures, institutions juridiques, représentations, qui paraissent ne plus correspondre à la réalité parce que dit-il les forces productives sont entravées par les rapports de production… l’ébranlement peut être long, lent et connaître des accélérations imprévues… incontestablement la crise ukrainienne a déclenché une de ces accélérations…
Il serait urgent d’envisager une stratégie qui tienne compte de ces ébranlements de fond… pour que tout cela ne se fasse pas dans la guerre aux dépends des peuples… Mais nous en sommes loi…
Ce qui manifeste le mieux cette absence de stratégie me paraît donc être l’abstention…
Danielle Bleitrach