Presque tous les bulletins sont maintenants dépouillés (97%), mais étrangement les résultats de la ville de Kiev sont les derniers à remonter.
Comme dans toutes les élections, il est préférable, je crois, de raisonner en nombre de voix, et pas seulement en pourcentage. Surtout dans une élection où la moitié des gens ne votent pas.
17 557 737 ukrainiens ont voté hier (manque 3% de bulletins non dépouillés), contre 24 588 268 à la présidentielle 2010. Il y a un déficit d’environ 7 millions.
Voici les résultats (presque définitifs) par candidats :
poroshenko 9 571 791 voix, 54,5%
timoshenko 2 260 003 voix, 12,8%
lyashko 1 467 925 voix, 8,3%
gritsenko 959 388 voix, 5,4%
tigipko 925 643 voix, 5,2%
dobkin 541 075 voix
rabinovitch 398 726 voix
bogomolets 336 329 voix
simonenko 268 290 voix
tiabigniok 204 887 voix, 1,16%
iarosh 123 241 voix, 0,7%
lyashko a siphoné bon nombre de voix de svoboda et praviy sector, attention à l’analyse qu’il faut en tirer. Notamment dans les régions du centre-ouest : Tchernivsti, Volhinie, Rivne, Tcherkassi, Ternopil : entre 10 et 17%. Si l’on ajoute tiabignok+iarosh+lyashko ça fait 10% des voix au national.
pour mémoire, en 2010, au premier tour :
ianoukovitch 8 686 642 voix
timoshenko 6 159 810 voix
tigipko 3 211 198 voix
iatseniuk 1 711 737 voix
iouchenko 1 341 534 voix
simonenko 872 877 voix
litvin 578 883 voix
tiabigniok 352 282 voix
gritsenko 296 412 voix
la princesse du gaz a perdu 4 millions de voix en 4 ans.
et au deuxième tour en 2010:
ianoukovitch 12 481 266 voix
timochenko 11 593 357 voix
Poroshenko se situe donc entre les résultats de ianoukovitch des premiers et deuxième tours de 2010. Si timoshenko avait réussi à forcer un deuxième tour, pas évident que les réserves de voix aient permis au vainqueur de l’élection (Poroshenko) de faire beaucoup plus de voix qu’au premier tour.
La participation annoncée est de 60%, mais attention car elle ne tient compte que des bureaux de vote ouverts, ce qui fausse la donne à Donetsk et Lougansk, et en Crimée. 35 500 913 ukrainiens étaient inscrits au vote, la participation réelle est donc de 50%.
Cette participation a été forte dans les régions de l’ouest :
78% à Lviv
74% Ivano-frankivsk
72% Volhinie
71% Rivne
Assez moyenne à Kiev, qui élisait son maire en même temps : 62%
Moyenne à faible dans les régions russophones :
55% à Dniepopetrovsk,
46% à Odessa, qui élisait son maire aussi
47% à Kharkov
Il est annoncé 39% à Lougansk et 15% à Donetsk, mais seulement sur les bureaux ouverts, attention !! (respectivement 2 sur 12 et 7 sur 22).
Timochenko perds partout, y compris à Lviv.
Porenchenko est en tête partout, y compris dans les régions russophones (à modérer avec la grosse abstention). Les scores de Porochenko :
70% à Lviv
67% à Vinitsi
65% à Ivano-frankivsk
64% à Kiev ville
………..
48% à Kherson
46% à Nikolaev
44% à Dniepopetrovsk
41% à Odessa
38% à Zaporije
35% à Donetsk
35% à Kharkov
33% à Lougansk
à corriger de la participation.
C’est-à-dire qu’il n’a pas de majorité dans les régions russophones, y compris si l’on ne tient compte que des gens qui sont allés voter. Le pays n’a donc pas surmonté sa coupure. Les gens qui soutiennent que les ukrainiens ont clairement voté pour un choix européen, à mon avis, n’ont pas un traitement objectif de la situation.
Evidemment les absents ont toujours tort, mais en aucun cas Porochenko peut se targuer hier d’une victoire éclatante. L’élection d’hier est très claire je pense: l’ouest et une partie du centre ont choisi leur président, parmi leurs candidats. Ils ont aussi voté contre le pouvoir intérimaire en place, malgré tout.
A Odessa : à Odessa on votait pour le maire également, comme à Kiev, et dans d’autres plus petites villes de province et la participation est différente pour le maire et pour le Président. Les résultats qui ont été annoncés à Odessa pour le maire sont les suivants:
Trukhanov 43,5% parti des régions, « anti-maidan »
Gurvits 29,5% parti oudar, « pro-maidan »
puis Matkovski (ancien vice-gouverneur), puis Dark vador (!), puis Tchekita.
Donc nous avons non seulement la moitié des gens qui n’ont pas voté mais ceux qui l’ont fait ont voté majoritairement pour un maire « anti-maïdan », alors que le candidat communiste et celui fédéraliste avaient retiré leur candidature.
mais je crois qu’il y a contestation des résultats, extrapolant sur le fait qu’il y des différences entre quartiers aux niveau des votes, mais également de la participation.
En tout cas au niveau de la présidentielle à Odessa, c’est Porochenko qui arrive en tête, devant Tigipko, puis Timochenko beaucoup plus loin. Mais le point important, il me semble, est que plus de la moitié des gens n’ont pas voté.
QV
mai 27, 2014 at 3:50
Merci beaucoup pour cet article très détaillé. En pleine préparation de dossier pour le concours d’une école de journalisme, cette page est de loin la plus complète que j’ai pu trouver en une recherche Google, et les analyses sont objectives et bien pensées (notamment les reports de voix des sympathisants d’extrême-droite sur Lyatchko, qui ont été ignoré sur Le Monde et ailleurs)
Jeanne Labaigt
mai 27, 2014 at 7:27
@QV
Le travail accompli par Danielle Bleitrach sur ce site Histoire et société est tout à fait extraordinaire, elle a dit quelque part ici il y a quelques jours qu’elle a un flair et une obstination « de sanglier » cherchant sa pitance pour aller dénicher les textes ,et c’est bien cela, elle nous en fait part généreusement. En outre sa lucidité, son expérience et sa culture lui permettent de remettre à leur place les documents. Comme elle a ,nous a t-elle dit, une formation d’historienne les trois étapes de la méthode historique classique : euristique (recherche des sources), critique (évaluation et mise en perspective de la documentation), et herméneutique (dernière et pas première étape d’interprétation) lui permettent de rendre compte des choses.
Les historiens du contemporain et les journalistes devraient retenir ces fondements.
Ce n’est donc pas de la simple information qu’elle fait, mais cette formidable humaniste nous permet de comprendre le monde.
Je trouve sympa que quelqu’un de jeune comme vous devez l’être pour être dans une Ecole ait su repérer cela chez une dame dont la vie militante nous en impose à tous.
Jeanne Labaigt
mai 27, 2014 at 5:20
A la lecture des résultats je me pose une question:
Le Simonenko, 9ème sur la liste de cette année qui a obtenu 268 290 voix, est-il Piotr Simonenko, le dirigeant du PKU ?
Comment cela se fait-il ? puisqu’il avait renoncé aux élections avant d’être attaqué.
Des gens, malgré tout auraient-ils exprimé leur volonté dans ces terribles circonstances de voir le PKU aux affaires ?
S’agit-il en fait des présidentielles ou d’autre chose ?
Marianne
mai 27, 2014 at 5:51
Il s’agit bien du même Piotr Simonenko. Comme il avait retiré sa candidature assez tardivement, les bulletins de vote étaient déjà partis à l’impression.
histoireetsociete
mai 28, 2014 at 4:16
chère jeanne, je n’épiloguerai pas sur tes commentaires concernant le travail de ce blog, mais il me semble que tu oublies quelque chose qui pour moi est issu de l’expérience mulitante, la contribution collective. C’est vrai des amis qui interviennent dans ce blog et qui souvent apportent réflexion, connaissance, liens dont toi, Marianne, Marcel, mais aussi joe, Pierre et l’ami qui a produit ce texte… mais ça l’est également de jeunes militants que j’ai découvert Olivier, Nico… Ce qui est frappant est justement entre nous l’absence d’appropriation, l’échange… Bref ce que nous étions comme communistes, une expérience qui marque à jamais l’intellectuel qui y est confronté…